Blaise Droz
La chaise du prévenu était vide hier devant le tribunal de trois juges présidé par Jean-Mario Gfeller, et pour cause puisque ce Congolais de 26 ans qui s’était établi dans le vallon de Saint-Imier en 2004 en vertu d’un regroupement familial avec ses parents au bénéfice de l’asile politique, a été expulsé de Suisse l’année dernière.
Au mois d’octobre 2015, il avait été contraint d’embarquer sur un vol spécial à destination de Kinshasa au terme d’une détention administrative en vue de son renvoi assorti d’une interdiction de refranchir la frontière suisse pendant 10ans. Le tribunal n’en avait été informé que tardivement, ce qui ne changeait pas grand-chose puisque l’affaire devait être traitée même en l’absence de l’intéressé.
Cela n’a pas été la seule particularité de ce procès pour injures, violence et menaces contre les autorités et les fonctionnaires, conduite inconvenante, infraction à la loi sur la circulation routière et infraction à la loi sur les stupéfiants.
Fragile sursis
En effet, la peine que risquait le prévenu était sans commune mesure avec le risque bien plus grand de révocation d’un ancien sursis pour une peine résiduelle de 27 mois.
Avocat du prévenu, Me Pascal Labbé a renoncé à d’inutiles gesticulations. Son client a reconnu les faits qui lui ont été reprochés un soir de mai 2014 à Saint-Imier. Son comportement pour ainsi dire hystérique s’était ajouté à celui de sa compagne qui ne l’était pas moins et avait mobilisé jusqu’à 16 policiers.
Les deux premiers policiers arrivés sur les lieux, avaient répondu à un appel à l’aide. Ils avaient toutefois été accueillis pour le moins fraîchement par celle qu’ils devaient protéger. Les choses s’étaient envenimées, le prévenu, ami de la victime mais en froid avec elle, avait voulu s’interposer violemment entre les policiers et la jeune femme qui était tout autant imbibée d’alcool et de produits stupéfiants que lui-même.
Il avait insulté les policiers, donné des coups de boule et autres amabilités, à tel point que des renforts avaient été massivement sollicités. Les violences du prévenu s’étaient encore prolongées au poste de police et un des policiers avait déposé plainte pénale tout en renonçant à des prétentions civiles.
Quelques mois plus tard, alors que le prévenu et son amie vivaient en couple, cette dernière avait été interpellée par la police parce qu’elle conduisait sans permis un véhicule non conforme. Les plaques d’immatriculation avaient été retirées par les agents mais dans la foulée, le prévenu avait déplacé sur 120 mètres le véhicule sans plaques, sans RC et alors qu’il n’était pas lui-même titulaire d’un permis conforme.
Rien de fondamentalement méchant, mais cet épisode s’ajoutant à une liste déjà très longue de méfaits de toute nature, il ne pouvait pas être ignoré.
Le procureur a requis au total 90 jours de prison ferme sans sursis et 30 jours amende à 10 fr. Me Labbé jugeait quant à lui que 60 jours fermes suffiraient. Au final, le Tribunal a entièrement suivi le procureur. Il l’a aussi suivi sur le point essentiel qui était la révocation d’un sursis pour 27 mois.
Sans dévoiler les anciens dossiers, le président Gfeller, comme le procureur Fischer avant lui, a rappelé que le prévenu n’en était vraiment pas à son coup d’essai.
Mineur la première fois!
Sa première condamnation à trois mois avait été prononcée par le tribunal des mineurs. C’était déjà du lourd. Puis il y avait eu une lourde condamnation en 2012 à 36 mois dont 9 fermes et ces 27 mois avec sursis. Depuis, les condamnations se sont succédées contre celui qui est désormais père d’un enfant d’un an.
Mais visiblement, rien n’a pu le convaincre de changer de vie. «À un moment, il faut arrêter de jouer au chat et à la souris, assez c’est assez!», a tonné Jean-Mario Gfeller en annonçant que cette fois-ci, ce sursis est révoqué.
Si le prévenu s’avise de revenir en Suisse après ses dix années d’interdiction, il devra commencer par purger une peine totale de 30 mois de prison ferme et s’acquitter d’amendes et de frais pour quelques dizaines de milliers de francs. C’est bigrement dissuasif!
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