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Coupe du monde 2018

Place à la fièvre Panini

Les vignettes autocollantes tant attendues des footballeurs qui se rendront au tournoi russe au mois de juin seront en vente dès vendredi en Suisse, un des plus grands marchés au monde.

Pour le Mondial 2018 en Russie, une édition notamment plus résistante a été conçue spécialement pour la Suisse.

Sélim Biedermann

 

Dès vendredi, la fièvre Panini va gagner les cours d’école, avec des échanges de vignettes à n’en plus finir. Pas sûr pourtant que tous les enfants affichent le même enthousiasme. En effet, pour les jeunes Italiens, dont la sélection ne s’est pas qualifiée pour la Coupe du monde – une première depuis1958! –, il n’y aura aucune trace de Marco Verratti ni de leurs autres footballeurs favoris. «La déception des gens n’aide pas.» Paroles d’Ezio Bassi, directeur général pour la célèbre maison d’édition transalpine en Suisse.

C’est un fait: les ventes de ces mythiques petits et tant désirés paquets «riches» de cinq autocollants pour 1,10franc, ou moins selon l’endroit où on les achète, les prix n’étant pas fixes, se voient dopées dans les pays qui participent à l’événement. En l’occurrence le Mondial en Russie. Et sur sol helvétique, on peut carrément parler d’explosion. «Il existe un grand engouement dans notre pays depuis2006, car auparavant, la sélection nationale avait manqué deux Coupes du monde consécutives. Mais depuis lors, elle a pu fêter plusieurs qualifications à la suite (réd: on n’oubliera quand même pas l’Euro2004 au Portugal), alors c’est super!»

Une «Gold Edition»
Evidemment, Bassi se frotte les mains de la bonne santé de la «Nati». A titre d’exemple, lors du Mondial2014 au Brésil, davantage de pochettes ont été écoulées dans le pays des montres qu’en réunissant les bien plus conséquentes populations italienne et espagnole. «La Suisse est un des plus grands marchés au monde», souligne-t-il. D’où la version dorée2018, ou «Gold Edition», spécialement conçue pour les Helvètes. La couverture du cahier et la bordure des vignettes sont couleur or, les pages plus épaisses donc plus résistantes aux inombrables feuilletages quotidiens et le système de décollage plus pratique. De quoi réjouir au maximum les gamins sous nos latitudes.

Des consommateurs juvéniles qui, en creusant un brin, ne sont finalement qu’une partie des acheteurs. Oui, les petits aiment les Panini, mais les grands aussi! Il n’est effectivement pas rare de voir les adultes retomber en enfance face aux visages de leurs idoles. D’ailleurs, les footballeurs eux-mêmes se laissent volontiers séduire. «Non, non, non, ce n’est pas destiné qu’aux enfants, cela continue après! C’est tellement magnifique.» C’est avec un regard de gosse, album en main, que le «géant» Pascal Zuberbühler l’affirme.

«C’est quelque chosede culte en Suisse»
Hier à Zurich, l’ancien gardien de la sélection helvétique avait été invité au Musée FIFA à l’occasion du tout premier événement médias Panini. Et il n’a pas boudé son plaisir. «Quand j’ai reçu le coup de fil des organisateurs, il était clair pour moi que j’allais venir. Parce que je le répète, ces albums, c’est quelque chose de culte en Suisse. Et je pense que cela ne s’arrêtera jamais.»

On comprend aisément que «Zubi» raffole de remplir, tous les deux ans, avec les Euros et Coupes du monde en alternance, ses petits livres qu’il conserve précieusement. «J’ai commencé quand j’étais jeune, avec le Mondial1982 en Espagne (réd: il avait 11ans). Et depuis, je n’ai pas cessé.» Même lorsqu’il jouait. «Quand j’étais international, je n’ai jamais pu aller effectuer des échanges d’images moi-même, car c’était quand même une situation très spéciale», glisse le Thurgovien. «Mais en tout cas, il y a toujours eu un cahier à la maison», confesse-t-il. «C’est devenu normal. Même ma femme s’y est mise.»

De pères en fils
Au côté du grand brun, hier à Zurich: Stéphane Chapuisat et Georges Bregy, deux figures emblématiques de la sélection suisse ayant pris part à la Coupe du monde1994 aux Etats-Unis, la première à avoir apparu dans un album Panini. Eux aussi se sont passionnés très tôt pour ces images de joueurs internationaux. «Chappi» s’en souvient bien, en1974, il se lançait dans le «job» de collectionneur de vignettes: «J’ai attendu assez longtemps pour que je trouve la photo de mon papa (réd: à l’époque figuraient également quelques joueurs de nations pas qualifiées, dont Gabet Chapuisat, Pierre-Albert de son prénom)!», rigole l’ex-attaquant.

Il était parvenu à ses fins grâce à une technique très simple... «A l’époque, avec les membres de ma famille, nous nous retrouvions souvent à Saint-Prex chez mes grands-parents. Et j’embêtais tellement tout le monde qu’on finissait par me donner des sous pour aller au kiosque acheter des Panini afin qu’ils aient la paix. Je leur cassais un peu les pieds, mais ce ne sont que des bons souvenirs.» Comme le seront sans doute à l’avenir ceux de son fils de 6ans. «J’ai pris un peu le rôle qu’avait mon père, c’est moi le sponsor désormais. Mais ça fait tellement plaisir de voir son regard quand il ouvre ses paquets et colle ses images...»

Les collectionneurs de vignettes Panini, petits et grands compris, ne sont a priori pas près de disparaître.

 

Stéphane Chapuisat: «Je comprends que l’on puisse être déçu, car c’est comme une bible»

«C’est sympa de se voir là-dedans 24ans plus tard! Cela provoque d’agréables souvenirs.» Stéphane Chapuisat a contemplé avec un plaisir non dissimulé sa frimousse et ses longs cheveux dans le cahier de1994 hier au Musée FIFA.

Sur le moment, il y a donc plus de deux décennies, le Lausannois n’en était pas moins heureux, mais toutefois seulement à quelques jours du Mondial américain: «Quand tu es joueur, lorsque le bouquin sort, tu ne sais pas encore vraiment si tu seras sélectionné ou si tu seras fit», fait-il remarquer. «Donc même si ta photo figure dans l’album Panini, ça ne te sert pas à grand-chose... La première fois où tu te dis vraiment ‹c’est bien d’y être›, c’est à deux ou trois semaines de l’événement, quand la saison en club est terminée et que le camp de l’équipe nationale avec les 23sélectionnés a démarré. Là, tu es fier de signer ta photo pour les fans.»

Tout le monde ne pense cependant pas la même chose. Notamment l’attaquant international helvétique du Borussia Mönchengladbach Josip Drmic, qui a partagé sa frustration dans une récente interview de ne pas avoir été choisi, comme pour l’Euro2016 – qu’il n’avait par ailleurs finalement pas disputé pour cause de blessure. Chaque pays participant au tournoi compte en effet seulement 18joueurs dans ces petits livres. Ceux qui sont «oubliés» peuvent ainsi apparemment mal le vivre, d’où l’importance accordée aux albums Panini. «Je comprends que l’on puisse être déçu, car c’est comme une bible, où tu retrouves beaucoup d’informations sur les équipes ayant pris part aux précédents tournois», relève Chapuisat. «C’est sûr que lorsque tu regardes un cahier d’un Mondial auquel tu as participé et que tu n’y apparais pas, ce ne doit pas forcément être très chouette. Mais à l’inverse, si tu es en photo mais que tu n’es pas allé au Mondial, ce n’est pas terrible non plus...»

Marge d’erreur réduite
La maison d’édition italienne, dont le siège se situe à Modène et qui compte plusieurs filiales à travers le monde ainsi qu’une seconde usine au Brésil – s’occupant essentiellement du continent américain – a décidé de ne sélectionner que 18noms à mi-février alors que les listes définitives ne tombent qu’à la mi-mai. «Cela permet de réduire la marge d’erreur, car il est compliqué de savoir précisément qui se rendra à la Coupe du monde en juin», explique Ezio Bassi. Qui précise: «Nous opérons nos choix principalement en fonction des statistiques des joueurs.»

Drmic? Samedi dernier en Bundesliga, il a marqué son premier but de l’actuelle saison toutes compétitions confondues. Même si l’attaquant suisse demeure bien sûr redoutable, qu’il a fait ses preuves par le passé en équipe nationale et qu’il a subi une seconde grave blessure au genou droit en2017, ce dernier semble un peu gonflé de se sentir frustré avec un aussi misérable rendement offensif en club...

 

D’abord en carton
En 1970, les images du premier album Panini consacré à un Mondial – qui s’est tenu au Mexique – étaient en carton. Il fallait ainsi les coller. Ce n’est que quatre ans plus tard que la toute première version avec des autocollants, ce qui représentait une véritable révolution technologique, a vu le jour.

Ou le réel début d’une longue histoire, qui a en fait commencé en 1961, lorsque les frères Giuseppe et Benito Panini ont eu l’idée de lancer la «machine» via des photos de joueurs du championnat italien. L’entreprise familiale a ensuite vite grandi...

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