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Tavannes

L’ailleurs passe par la Suisse et par l’écriture

L’exposition «Les écrivains-voyageurs et le mythe helvétique» à la Bibliothèque régionale jusqu’au 2 mai

Les bibliothécaires Isabelle Petignat, à gauche, et Isabelle Noverraz font découvrir l’exposition et la littérature des écrivains voyageurs. LDD

Yves-André Donzé

En racontant leurs histoires, les écrivains vous transportent constamment dans des lieux imaginaires. C’est là tout l’intérêt de qui pratique les plaisirs solitaires de la lecture. Mais il y a des emplumés qui écrivent sur les endroits bien réels qu’ils ont traversés pour de vrai et qui les ont fascinés. De là à en faire un genre littéraire, il n’y a qu’un pas.  
En quête, sur la toile, de bouquins sur les écrivains voyageurs, qui  rencontrent un bon succès à Tavannes, les animatrices de la Bibliothèque régionale de Tavannes sont tombées sur le site de l’Association culturelle pour le Voyage en Suisse et son exposition itinérante intitulée «Les écrivains voyageurs et le mythe helvétique». L’exposition a aussitôt été commandée pour leur bibliothèque. Elle est visible jusqu’au 2 mai.

Tout un rayon

Il est clair qu’après la vaste exposition sur Blaise Cendrars, qui vient de se terminer à La Chaux-de-Fonds, il n’était pas facile d’aborder le sujet des écrivains voyageurs juste derrière le monstre. Il ne faut donc pas s’attendre à suivre le célèbre prosateur du Transsibérien, mais on peut suivre Jean Buhler sur un baleinier, et se frotter aux froides énigmes de Kenneth White, le  concepteur de la géopoétique. «La bibliothèque régionale de Tavannes présente tout un rayon consacré aux voyage et aux écrivains voyageurs», rappelle  Isabelle Noverraz.  la bibliothécaire responsable, en désignant Mike Horn, Ella Maillart, Bernard Olivier, Bertrand Piccard, Anne-Marie Swarzenbach et une vingtaine d’autres auteurs. L’exposition, quant à elle, montre le regard de l’étranger sur la Suisse, et non le contraire.

Car cette vision a contribué à mettre en place le «mythe helvétique» dès le 16e siècle jusqu’au 20e siècle. Le regard change suivant que l’on s’appelle Byron, Voltaire, Rousseau, Chateaubriand ou Lamartine. Ce dernier dramatise les chutes du Rhin, «De rochers et d’abîme en abîme/Il tombe, il rebondit, il retombe, il s’abîme...», écrit-il en 1824. Dans la même période, Byron décrit les montagnes de Suisse comme des «créations puissantes». Tous les adeptes du «katastrofale Landschaft» apprécieront. En 1755,  on découvre un Voltaire qui joue les spéculateurs immobiliers à Lausanne. C’est pour mieux se mettre hors de la folie du monde dans son havre de paix où l’homme des Lumières cultivait son jardin.

La Suisse du Voltaire spéculateur immobilier

Parmi les nomades, il y a encore tous les écrivains de l’exil volontaire ou non. Il y a les idéalistes du paysage et des mœurs  helvétiques montrant que le 18e siècle ne se résume pas à la 5e Promenade de Rousseau. La Suisse est pendant longtemps vue comme un idéal. L’exposition montre aussi la naissance du tourisme au milieu du 19e. Au début, les montagnards étaient considérés comme des ploucs, sales et incultes. D’où l’expression «crétin des Alpes». Cela n’a pas empêché les écrivains d’exalter l’amour des cimes. Il y a enfin le regard fonctionnaliste ou technologique avec les barrages, les tunnels, les thermes. Le tout sur dix panneaux thématiques (six à Tavannes). Au dernier, la Suisse des écrivains de l’ailleurs se mue en anthropologie du tourisme. Isabelle Noverraz et Isabelle Petignat sont formelles: l’expo s’adresse aux plus de 12 ans.

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