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Bande dessinée

César rend Astérix à ses lecteurs

Le 36e album des aventures de l’irréductible Gaulois sort aujourd’hui

Le suspense reste entier sur le contenu de l’album, les éditons ayant voulu réserver la primeur de la surprise du nouvel «Astérix» aux lecteurs. Les éditions Albert René/ Goscinny et Uderzo

Olivier Delcroix

«Par Toutatis!» Depuis 2013, et le retour triomphal d’Astérix en librairie (1,6 million d’exemplaires vendus) sous le pinceau et la plume du nouveau tandem Conrad et Ferri, on attend avec impatience de retrouver les irréductibles gaulois, co-créés – ne l’oublions pas – par Albert Uderzo et René Goscinny… en 1959.

Après les bourrasques écossaises d’«Astérix chez les Pictes», le 36e album promet une nouvelle aventure à domicile. Mystérieusement intitulé «Le papyrus de César», cette intrigue gauloise fait réapparaître un personnage clé de la saga, César en personne.

«L’idée de cet album est née dans un avion en revenant d’Italie, avoue le dessinateur Didier Conrad. C’est vraiment durant la promotion des Pictes que nous avons pu faire mieux connaissance, moi et Jean-Yves Ferri.» Le scénariste confirme avec sa bonhomie habituelle: «Avec «Le papyrus de César», nous sommes dans un autre registre, puisqu’il se déroule dans le village. Et des idées qui collent bien à l’univers d’Astérix, il n’y en a pas cinquante. C’est un peu notre souci.»

Un patriarche content

«Nous sommes d’ailleurs contents qu’Albert Uderzo ait apprécié notre idée. Il a trouvé qu’elle s’intégrait bien à la série.» Le patriarche de la bande dessinée française (qui a fêté ses 88 printemps le 25 avril dernier) ne tarit pas d’éloges sur les deux repreneurs: «Je tiens tout de suite à vous rassurer. Même s’ils sont nouveaux dans l’affaire, ces deux garçons sont à leur aise sur ce deuxième album. Je n’ai pas voulu les embêter. J’ai découvert cette aventure en première lecture. Et ils m’ont même bluffé avec cette nouvelle intrigue.

René Goscinny et moi avions le sentiment d’avoir tout dit dans Astérix. La preuve que non! Avec cet album qui s’inspire de la volumineuse «Guerre des Gaules» de Jules César, l’action se recentre à la fois en Gaule et à Rome, à cause de la réaction de César. Bon sang, je regrette de ne pas y avoir pensé!» (Rires.)

Toujours d’après Uderzo, «Le papyrus de César» «se rapproche de l’histoire véridique des Gaulois et des Romains. Ferri et Conrad ont osé se servir des écrits de Jules César. Il est vrai que ce dernier a grossi certains événements pour mieux servir ses propres intérêts face au Sénat romain... Cela aurait pu lui retomber dessus.»

Sur le plan graphique, Conrad a mis un certain temps à s’approprier le personnage de César d’Uderzo: «Il a beaucoup changé selon les albums. César a pratiquement doublé de taille entre le premier et le dernier album. J’essaie de faire un style intermédiaire qui regroupe des qualités de toutes les époques, afin qu’il soit reconnaissable par tout le monde.»

Le personnage s’apparente-t-il à une sorte de Dark Vador de la saga? «Pas vraiment, répond Conrad. César est toujours représenté de manière assez respectueuse. Il était plus caricaturé à l’époque d’«Astérix et Cléopâtre». Depuis, Uderzo l’a rendu plus digne. Il représente une figure historique qui doit être respectée. On ne peut pas pousser trop loin la caricature. D’où la difficulté.»

L’allure de César

Le scénariste Jean-Yves Ferri estime quant à lui que César est un superbe personnage. Au fil des albums, nous ne l’avons vu apparaître que par flash. Et ce n’est pas dans celui-ci que nous en saurons plus. Une nouvelle fois, César est présent un peu comme une ombre, en toile de fond.

Dans l’une des cases, celle qui concerne César montre un dirigeant drapé dans sa dignité, mais surpris et offusqué par les propos tenus par son interlocuteur: «Et parmi eux, qui va protester? Ils sont tous analphabètes! Ainsi, ton livre attestera que tu as conquis toute la Gaule, et le Sénat acceptera de financer tes autres conquêtes…» L’autre case présente le retour d’Astérix et d’Obélix au village, «dans la paisible Armorique, où les échos de Rome sont rares et déchaînent moins les passions».

A ce sujet, Didier Conrad note: «J’ai encore du mal avec le volume d’Obélix. Je n’arrive pas à l’avoir en tête ni à mettre les raies des braies à l’endroit où il faut. C’est à ce moment que j’ai besoin des conseils d’Albert…»

Passage de témoin

Uderzo refuse un peu l’idée d’être le mentor des deux nouveaux auteurs d’Astérix, mais il reconnaît les aider «de temps à autre. Je leur sers de boussole, je corrige parfois la position d’un personnage. Car Dieu sait si je les connais! C’est mon rôle désormais. Depuis que j’ai passé la main, conclut-il, je me rends compte qu’Astérix nous a échappé à Goscinny et à moi. Quand j’ai repris la série tout seul deux ans après la mort de René, je n’étais vraiment pas sûr de moi. D’autant que les critiques ont été assassines. J’ai été relevé par des lettres de lecteurs me disant: «Nous sommes contents qu’Astérix revienne. Vous nous devez de nouvelles aventures.» Comme on dit «il faut rendre à César ce qui appartient à César», j’ai envie de dire: «Il faut rendre Astérix à ses lecteurs. Car c’est à eux qu’il appartient... Et pas à moi.»

Ce sera donc chose faite le 22 octobre avec la parution du «Papyrus de César», édité pour l’occasion à deux millions d’exemplaires pour les francophones et quatre millions pour les traductions. Le Figaro

Info

«Le papyrusde César»
Jean-Yves Ferri, Didier Conrad, d’après René Goscinny, Albert Uderzo, Editions Albert René, 48p, 16fr.90.

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