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Horlogerie

Davide Traxler, à l’écoute du luxe

Neuf mois après son arrivée, le nouveau directeur de Corum soigne une marque convalescente et invite des artistes à s’exprimer.

Davide Traxler, à droite, discute avec un horloger dans les ateliers de Corum à La Chaux-de-Fonds. David Marchon
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Luc-Olivier Erard

Steve Aoki, Dani Olivier… Peu de quarantenaires les connaissent. C’est pourtant à ces artistes  que Corum vient de confier la mission de personnaliser l’un de ses modèles emblématiques, la «Bubble» au verre bombé si caractéristique.

Le premier est un DJ de Miami dont les vidéos YouTube sont regardées par des millions de personnes. Le second un photographe français dont les nus éclairés par des faisceaux fascinent.

Le social-chic
Après avoir personnalisé «leur» bubble, ces artistes sont chargés d’en promouvoir une série limitée sur les réseaux sociaux. «Une démarche très libre, qui doit rester artistique avant tout. Vous ne verrez pas leur portrait à côté d’une montre sur une publicité Corum. Mais ces artistes peuvent toucher un public auquel nous n’aurions jamais accès», explique Davide Traxler, directeur opérationnel de la marque chaux-de-fonnière depuis neuf mois.

L’idée serait une réponse à l’univers changeant du luxe: «Ce que nous recherchons, c’est un exercice d’écoute avec le marché, ce que le domaine du luxe n’avait jamais fait en un siècle. Aujourd’hui, les gens veulent échanger, critiquer, et qu’on les écoute. Avec la Bubble, nous avons la chance d’avoir une icône si caractéristique qu’on peut dire aux artistes ‹faites ce que vous voulez avec›. Elle sera toujours la Bubble.»

Davide Traxler arrive fin 2015 chez Corum, alors en pleine crise:«J’ai repris un patient sortant d’une maladie très grave et qui avait subi des traitements très durs», image le nouveau dirigeant. S’il innove aujourd’hui, c’est aussi en assumant pleinement un passé qui, tout en assurant à la marque un patrimoine fascinant, garanti au manager quelques sueurs froides. Il a sur les bras quelque 25 000 mouvements et 325 000 aiguilles.

Près de 52 millions de francs de stocks à écouler. Un tiers des montres sortent avec des mouvements fabriqués avant son arrivée: «Ils sont magnifiques, on construit de superbes montres autour».

Bousculer les habitudes tout en profitant de l’histoire de l’entreprise, c’est aussi valable à l’établi.

Retour à une saine réalité
 Circulant dans les ateliers, Davide Traxler confie qu’il tient à ce qu’employés et management tirent à la même corde. Au programme: réunions régulières du personnel, et installation d’une nouvelle cafétéria. Mais il le reconnaît: ses horlogers sont taiseux. L’atmosphère dans les ateliers est en effet feutrée.

«On sous-estime la difficulté de ce travail qui nécessite une concentration extrême, et des positions pas toujours faciles». Admiratif, il entend aussi ne pas revenir à la mode des barons que l’horlogerie mettait sur un piédestal:«La différence entre les hauts et bas salaires doit diminuer. Nos montres, elles sortent parce que nous travaillons tous ensemble.»

Ses recettes semblent payer, puisqu’il enregistre lors des premiers mois de 2016 un chiffre d’affaires trois fois supérieur à celui de la même période 2015. Il espère vendre 10 000 pièces en 2016 contre 9000 en 2015. Et la crise? «Il y a bien ralentissement dans certaines régions, mais la Chine se stabilise. Ces dernières décennies, lorsqu’un marché allait mal, on comptait sur l’émergence d’un nouveau. Je crois que nous vivons un retour à une réalité très saine. Il n’y a pas de raison de paniquer pour l’horlogerie suisse».

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