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Hockey sur glace

Le long chemin de croix de Luca Hischier

Commotionné il y a deux mois, l’attaquant haut-valaisan du HC Bienne n’est toujours pas apte à rejouer. Il vit des moments compliqués, à l’image de trois de ses collègues souffrant du même mal.

Luca Hischier est le joueur du HC Bienne qui se bat depuis le plus longtemps pour guérir de sa commotion cérébrale.

par Vincent Criblez


Miné par les blessures depuis le début de la saison, le HCBienne est surtout victime d’un phénomène aussi récurrent qu’inquiétant: les commotions cérébrales. Mardi, face au HCAjoie, pas moins de quatre des six éléments annoncés blessés souffraient d’un bobo entre les deux oreilles. Si le Suédois Viktor Lööv, touché il y a trois semaines face au CPBerne, devrait retrouver l’action ce soir, Luca Hischier, Ramon Tanner et Lori Korpikoski sont eux encore en plein combat contre ce mal pernicieux et passent leurs journées à espérer une amélioration.

«Au-delà des symptômes, c’est surtout le fait qu’on ne sache pas combien de temps il faudra pour guérir qui est frustrant», souligne Luca Hischier, absent depuis le 22septembre. Parmi les quatre infortunés, l’attaquant de 26ans est le joueur seelandais qui se bat depuis le plus longtemps pour guérir de ses lésions au cerveau.

Alors qu’il avait tenté un retour au jeu à la fin du mois d’octobre à Lausanne, le Haut-Valaisan a rapidement compris que, lorsqu’une commotion vous ronge, il vaut mieux prendre son mal en patience et laisser à son cerveau tout le temps nécessaire pour parvenir à digérer le choc encaissé.

Peur pour sa santé
Sournoises à souhait, les commotions cérébrales ne lâchent pas facilement leur os. «En allant à Lausanne, je me sentais à100%. Or, après un tiers, j’ai remarqué que je ne voyais même plus mes adversaires sur la glace», souffle Luca Hischier, d’une petite voix. «Ça a été dur à encaisser. Le matin, j’étais tout content de pouvoir reprendre le championnat et quelques heures plus tard, je ne savais pas si j’allais m’en remettre un jour. Là, j’ai clairement eu peur pour ma santé.»

Après un nouveau mois d’absence, l’ailier arrivé de Davos l’hiver dernier tente une nouvelle approche. Il a repris les entraînements sur la glace –sans contacts– depuis quelques jours.

Toutefois, aucune date n’est programmée quant à la reprise de la compétition du numéro13 du HCB . Il a ainsi décidé de vivre au jour le jour. «Si je me fixe un objectif de retour et que je n’arrive pas à le respecter, cela va à nouveau me miner et me tirer vers le bas. Je n’ai pas d’autre choix que d’attendre, en espérant que mon corps encaisse bien les entraînements», ajoute le frère de Nico, la star des New Jersey Devils en NHL, avec philosophie et conscient qu’il ne peut influencer son destin qu’en écoutant son corps.

Un aspect mental à ne pas négliger
En plus des symptômes, qui vont du mal de tête récurrent aux pertes d’équilibre, en passant par une sensibilité extrême à la lumière et au bruit, l’aspect psychologique est également un point essentiel pour un commotionné, souvent remis à lui-même, loin de ses collègues de travail. «Avec les autres joueurs, il arrive qu’on parle de nos problèmes... Mais on essaie de ne pas trop perturber le vestiaire avec ça et, une fois chez nous, on est seul face à la commotion. Les jours où ça ne va pas bien, ceux durant lesquels les symptômes sont forts, ne sont pas évidents à gérer», concède celui qui vit seul et qui n’a pas d’enfant pour égayer une convalescence qu’il affronte depuis plus de deux mois.

Pourtant, Luca Hischier fait le poing dans la poche et reste confiant en l’avenir, se refusant ardemment d’en vouloir à sa profession. «Il y a certes parfois des charges dégueulasses qui amènent des commotions, mais globalement, la majorité de celles-ci se passent sur des bêtes accidents lors desquels personne n’est fautif», constate-t-il avec fatalité. Dans son cas, il avait justement reçu un coup de canne non intentionnel face à Genève-Servette.

En incorporant des plexiglas plus souples depuis quelques saisons dans la majorité des patinoires et en améliorant la protection conférée par les casques, les instances internationales semblent avoir fait tout ce qui était en leur pouvoir pour préserver au maximum la santé des joueurs. Le reste, malheureusement, fait partie des risques inhérents au métier. Qui a dit que les hockeyeurs avaient la belle vie?

 

Un centre médical et un protocole pour faire face
 

Pour endiguer le phénomène des commotions cérébrales, un mal qui, selon plusieurs études, a déjà touché 60 à80% des hockeyeurs suisses en activité –dont plus de la moitié à plusieurs reprises–, la fédération dispose de deux outils qui ont fait leur apparition ces dernières années.

Le premier est un centre médical entièrement dédié à ces blessures. Ouvert à tous les sportifs en2015, le Swiss Concussion Center se situe dans une aile de la clinique Schulthess à Zurich et est spécialisé dans le diagnostic, le traitement et le suivi des lésions cérébrales. «Il y a à disposition des outils extraordinaires, notamment pour ce qui est des exercices de stimulation de la vue, soit un élément central pour la guérison. On s’y sent entre de bonnes mains», note un Luca Hischier reconnaissant de la qualité des soins qu’il reçoit. Il s’est rendu à Zurich jusqu’à trois fois par semaines ces derniers temps.

En parallèle à cet établissement, les instances du hockey sur glace suisse ont également mis sur pied un protocole afin de s’assurer que les clubs n’aillent pas trop vite en besogne avec leurs blessés. Un document en six étapes –allant d’une simple reprise avec 15minutes de vélo à un entraînement normal sur la glace– doit être appliqué à la lettre. Il encourage un retour au jeu tout en douceur.

«Si la commotion est classée comme importante, on prend contact avec le Swiss Concussion Center lors de chaque étape du protocole», explique Thomas Zamboni, responsable de l’entraînement hors glace du HCBienne. Des liens étroits s’établissent ainsi entre les clubs et le centre. «Le partenariat est excellent. Mais, finalement, le problème est toujours le même: chaque commotion se révèle différente. Il faut donc s’adapter en conséquence», résume le Thurgovien.

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