Vous êtes ici

Abo

Cyclisme

Nino Schurter change de monde

Le triple champion du monde de VTT tente sa chance au Tour de Romandie

Nino Schurter en position d’un coureur de contre-la-montre:c’est dans cet exercice que le Grison risque de souffrir le pluslors du Tour de Romandie. Keystone

Ascona
Julián Cerviño


Les attractions du 68e Tour de Romandie (TdR), qui s’élance aujourd’hui au Tessin, ne manquent pas: Froome, Nibali, Rui Costa devraient tenir la vedette; la rampe de la Maladière va faire causer, la météo aussi. Mais la présence du triple champion du monde de VTT, Nino Schurter (27 ans), attire particulièrement l’attention.
Même si tout n’a pas été simple pour parvenir à effectuer ce passage sur route (lire ci-dessous), le Grison se réjouit de vivre cette première expérience. «J’ai déjà disputé quelques petites courses sur route, mais jamais à ce niveau», indique-t-il depuis son hôtel de Locarno. «C’est un rêve pour moi. J’aime toutes les disciplines du vélo et c’est vraiment super pour moi d’avoir la possibilité de participer à une course comme celle-ci.»
Le spécialiste de VTT a obtenu une licence pour disputer le TdR et le Tour de Suisse cette saison avec le Team Orica-Greenedge. Il aborde l’épreuve romande avec nervosité. «Il y a beaucoup de nouvelles choses pour moi», constate-t-il. «Dans ma discipline, nous sommes un peu livrés à nous-mêmes. Nous sommes deux professionnels dans mon équipe, ici il y en a 20. L’encadrement est parfait. On s’occupe de moi. C’est un autre monde.»
Nino Schurter ne se lance tout de même pas dans l’inconnu. «Normalement, j’effectue 50% de mon entraînement sur route», explique le triple vainqueur de la Coupe du monde de VTT. «Cette saison, j’ai un peu plus privilégié cette discipline. J’ai effectué de plus longues sorties, durant 5-6 heures. Cela ne m’a pas trop handicapé en VTT (3 victoires cette saison). Physiquement, je ne me fais pas trop de soucis, je sais que j’ai un gros moteur. Je suis peut-être un peu trop musclé en haut du corps.» Avec 68kg pour 172 cm, son gabarit serait plutôt celui d’un puncheur.

La peur du chrono

Le plus gros souci pour le Grison est le contre-la-montre. «J’ai roulé pour la première fois en novembre dernier sur un vélo de chrono au vélodrome de Granges», raconte-t-il. «Les sensations étaient étranges, mais j’ai apprécié. Au niveau de la position sur le vélo et de l’aérodynamisme, j’ai appris des choses. Cela me servira peut-être en VTT.»
Mais il ne s’attend pas à réaliser des exploits lors du prologue d’aujourd’hui et au cours du chrono final à Neuchâtel dimanche prochain. «Je suis un peu effrayé par cet exercice», avoue-t-il. «Je suis un bon technicien en VTT, mais avec un tel vélo, c’est différent. J’espère que les routes seront sèches.» Ce n’est pas gagné...

Pas que les résultats

Même si certains anciens vététistes ont connu des problèmes d’adaptation dans le peloton, l’Alémanique ne se fait pas trop de soucis. «J’ai déjà roulé dans ces conditions et je n’ai pas eu de problèmes», assure-t-il. «Je vais essayer de ne pas perdre trop d’énergie à cause de cela. La différence en course, c’est qu’en VTT, le statut d’équipiers n’existe pas vraiment. Chacun court pour soi. Nous avons peut-être plus l’instinct de gagneur et pas vraiment de consignes. Mais on verra bien ce qu’on me demande de faire.» Son team australien devrait lui laisser assez de libertés...
En fait, le Grison ne se fixe pas d’objectifs précis. «J’essaie de courir sans trop de pression, sauf celle que je me mets moi-même», affirme-t-il. «Je vais faire de mon mieux tout en essayant d’avoir le plus de plaisir possible. Si cela me plaît, je pourrais retenter ma chance à l’avenir. Mais ce n’est pas qu’une question de résultats.»

D’abord Rio 2016

Comme beaucoup de vététistes, Nino Schurter ressent surtout le besoin de voir d’autres choses. «Je me réjouis de découvrir des coureurs différents, de voir comment fonctionne ce milieu», confie-t-il. «Les exemples d’autres anciens vététistes, comme Evans ou Sagan, m’ont inspiré. Cela prouve que nous pouvons nous défendre sur la route.»
Cette semaine sur le TdR apportera un premier élément de réponse à Nino Schurter et à ses fans. Mais il n’envisage pas sa reconversion totale sur la route pour tout de suite. «Dans mon cœur, je reste un coureur de VTT», confirme-t-il. «Je veux encore disputer des courses et mon objectif reste d’aller aux JO de Rio en 2016. La médaille d’or que j’ai manquée à Pékin (bronze) et à Londres (argent) me manque toujours. Peut-être que cette expérience sur la route va me permettre de m’améliorer. Je verrai bien après Rio, lorsque j’aurai 30 ans, si je reviendrai sur la route.» On est déjà curieux de voir comment il va s’en sortir sur la Boucle romande face à Froome, Nibali et consorts.

Articles correspondant: Sport »