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Parc heuer

Des enfants plutôt que des marginaux

Coincé entre la rue de la Flore et la rue Ernst-Schüler en plein centre-ville, cet espace vert prisé des marginaux fait peau neuve. Un «cadeau» de l’immobilier Ulrich Roth à la Ville

Une aire de jeu et une terrasse au Parc Heuer: d’ici à trois semaines environ, le lieu se présentera sous de nouveaux atours. Anne-Camille Vaucher

Julien Graf

Une fin d’après-midi au ParcHeuer: une dizaine de personnes refont le monde autour d’une bière, planquées derrière des arbres touffus. Terne et malfamé, l’endroit situé à un jet de pierre de la rue de Nidau n’invite guère à la détente.

Mais la situation devrait très vite changer. Dès aujourd’hui et durant les trois prochaines semaines, le Parc Heuer subira une importante cure de jouvence. Sur quelque 40% de sa surface, il sera réaménagé avec une nouvelle place de jeu et une terrasse pouvant être utilisée par le Café Flora. Au sol, les pavés seront renouvelés. Les arbres et autres arbustes délimitant l’aire seront élagués et des barrières apposées pour éviter aux enfants d’être tentés de courir sur la route.

Un cadeau à 150000 francs

Surprise: ces travaux de revalorisation ne seront pas entrepris par la Ville, pourtant propriétaire du terrain, mais par la gérance immobilière biennoise Roth.

A l’occasion de son 40e anniversaire, la firme a décidé d’offrir «un cadeau» à la Ville de Bienne et à ses habitants. «Nous aurions pu organiser une grande fête rassemblant des milliers de personnes au Palais des Congrès. Mais il nous est apparu plus judicieux de marquer le coup avec un projet portant sur le long terme»,  a expliqué hier lors d’un point presse Ulrich Roth.

En début d’année, le propriétaire et directeur de Roth Immobilien Management AG a pris langue avec la Ville pour concrétiser le projet, dont les coûts avoisinent 150 000 francs.

Une aubaine que les pouvoirs publics n’auraient pu refuser, comme l’a concédé le maire de Bienne Erich Fehr. «Je crois que tout le monde est d’accord pour affirmer que l’état de ce parc est tout bonnement insatisfaisant. Mais eu égard à l’état des finances municipales, nous sommes toujours contraints de fixer des priorités dans nos investissements. Nous ne pouvons que saluer ce genre d’initiatives émanant de privés; elles permettent de contribuer à l’attractivité de la ville et à augmenter la qualité de vie.»

Quid des marginaux?

Ce «cadeau» de l’influent immobilier biennois serait-il une élégante manière de se débarrasser des quelques marginaux squattant dans les parages? Ulrich Roth s’en défend.

Pour le fondateur de la gérance, sise à la rue de la Flore depuis 31 ans et dont les bureaux bénéficient d’une vue plongeante sur le Parc Heuer, il était devenu urgent de lui redonner son lustre d’antan.

«Lorsque nous avons déménagé nos locaux de la rue de Morat à la rue de la Flore en 1984, la place était encore accueillante et conviviale.Les enfants s’amusaient sur une place de jeu; les élèves de l’Ecole Dufour jouaient au foot sur le préau. Malheureusement la situation s’est dégradée. Nous aimerions simplement redonner au parc son affectation d’origine.»

Dès le début des années 1990 en effet l’endroit s’est petit à petit offert aux marginaux, consommateurs d’alcool ou de drogues dures. Dans les années 2000, des nouveaux logements ont été construits dans le secteur. En septembre 2003 et à la suite de conflits à répétition avec des riverains excédés par des nuisances, les pouvoirs publics avaient fait évacuer les marginaux.

Si les drogues dures n’y sont aujourd’hui plus consommées, au fil du temps certains consommateurs de cannabis ou d’alcool sont revenus.

Mais selon l’élu socialiste, pas question pour autant de les chasser manu militari. «Les espaces publics doivent être accessibles à tous, ce qui n’est pas le cas dans la situation actuelle puisqu’un seul groupe de la population occupe le parc. Nous menons là une sorte d’expérience. L’avenir nous dira comment se vit cette nouvelle cohabitation.»

Vers des locaux scolaires?

Une cohabitation qui ne devrait qu’être provisoire: un contrat d’utilisation entre le Conseil municipal et la gérance immobilière a été signé pour une période de cinq ans.

Au-delà de 2020, la Ville pourrait décider d’une nouvelle affectation pour la zone. Il est prévu qu’une extension de l’Ecole Dufour y soit construite pour pallier au manque de locaux scolaires au centre-ville. D’ici là, petits et grands auront toutefois tout loisir de profiter du «cadeau».

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