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Bienne: FFFH

Enfants conquis par une courgette

Le film d’animation «Ma vie de Courgette» a été projeté hier dans le cadre de la Journée des enfants

Le cinéma Rex 1 était bondé hier après-midi. Les jeunes spectateurs ont réservé un tonnerre d’applaudissement au film de Claude Barras. Tanja Lander

Didier Nieto

Le public et les critiques du Festival de Cannes avaient réservé ce printemps une véritable ovation à «Ma vie de Courgette». Hier après-midi, le premier long-métrage de Claude Barras affrontait des spectateurs ô combien plus exigeants: des enfants! Projeté dans le cadre de la Journée des enfants du FFFH, le film d’animation a reçu le même accueil que dans la cité azuréenne: des applaudissements à tout rompre qui ont fait vibrer les murs d’un cinéma Rex archicomble.

Cerise sur le gâteau, le réalisateur valaisan était présent pour raconter la création de son film, peuplé uniquement par des marionnettes et des décors en pâte à modeler. «Nous avons tourné le film image par image. Dix animateurs ont travaillé en même temps, chacun sur son décor, avec des marionnettes différentes. Ils mettaient en boîte seulement quatre secondes de film par jour», a commenté le cinéaste. Le tournage a duré 18mois. Mais la préparation du film s’est étalée sur plus de sept ans.

Bombardé de questions
Les jeunes spectateurs ont aussi eu l’occasion de poser leurs questions. Et le réalisateur a été littéralement bombardé. «Pourquoi les cheveux du personnage de Courgette sont bleus?», s’est enquis un petit garçon. «Le film raconte une histoire réaliste dans des décors réalistes. Donner une couleur particulière à certaines parties des personnages était une manière d’emmener le public dans le domaine du rêve», a répondu Claude Barras. La marionnette de Courgette qu’il portait dans les bras a évidemment suscité beaucoup de convoitise. «On peut la toucher?», a demandé un enfant du premier rang. «Malheureusement non car elle est très fragile. Ce n’est pas un jouet.»

Au fil des questions, le cinéaste a aussi raconté comment les marionnettes avaient été fabriqués – «il s’agit d’armatures recouvertes de silicone» – et indiqué que les habits de ses «acteurs»  avaient été spécialement conçus pour le film. Il a également expliqué d’où lui étaient venues les idées pour son film. «J’ai repris l’histoire du livre ‹Autobiographie d’une courgette›. Ensuite, c’est aussi un peu mon travail d’avoir de l’imagination», a-t-il souri. «Et les personnes qui ont travaillé avec moi m’ont aussi donné des idées. Tout comme les enfants qui ont prêté leur voix aux personnages.»

Après chaque réponse, des dizaines de mains se levaient pour réclamer le micro. «Vous est-il arrivé de perdre patience pendant le tournage?» «Je ne pouvais pas me le permettre puisque j’étais le réalisateur. Au contraire, c’était mon rôle d’encourager les animateurs. Le tournage a été difficile, mais nous étions une bonne équipe de copains.» La dernière question a été posée par une petite fille. «Vous êtes sûr que c’est pas possible de toucher la marionnette de Courgette?»

Le FFFH débute officiellement ce soir avec la projection, lors de la soirée d’ouverture, de «L’économie du couple», de Joachim Lafosse. Programme complet du festival sur www.fffh.ch.

Dureté en douceur

REUSSITE  Adapté du roman «Autobiographie d’une courgette» de Gilles Paris, «Ma vie de Courgette» raconte l’histoire d’Icare, un garçon de 9 ans surnommé Courgette, qui part vivre dans un orphelinat après le décès accidentel de sa mère. Là, il se lie d’amitié avec les autres pensionnaires, qui ont tous vécu des drames personnels. A leur contact, Courgette découvre la camaraderie, l’empathie et même l’amour.

«Ma vie de Courgette» est le premier long-métrage de Claude Barras, qui s’était fait remarquer auparavant avec plusieurs courts. Techniquement parfait et esthétiquement superbe, son film dégage énormément de charme et traite des thèmes complexes et durs – deuil, abandon, solitude – avec sensibilité et douceur. Primé dans divers festivals, «Ma vie de Courgette» a été choisi pour représenter la Suisse dans la course aux Oscars. On saura en janvier prochain s’il fait partie des nominés. Avant sa sortie sur les écrans le 19 octobre, le film sera à nouveau projeté dans le cadre du FFFH dimanche à 15h45 au cinéma Apollo.

 

TROIS QUESTIONS A...

Claude Barras, réalisateur de «Ma vie de courgette»

 

«Avec le point de vue d’un enfant»

Qu’est-ce qui vous a plu dans le livre «Autobiographie d’une courgette» pour que vous en fassiez un film?
L’auteur raconte l’histoire d’enfants qui ont vécu des expériences difficiles. Et pour cela, il adopte le point de vue d’un enfant, en transmettant sa spontanéité et sa naïveté. Et c’est une histoire qui commence mal mais qui se finit bien. Le livre a une dynamique d’ouverture.
Pourquoi avoir choisi de raconter cette histoire avec des marionnettes?
Pour moi, qui viens du domaine de l’illustration, le rapport qui se crée avec des marionnettes n’est pas le même qu’avec des personnages dessinés ou animés par ordinateur. On peut les toucher, les «rencontrer» dans la réalité. Et pour le tournage, cela implique de créer des décors, de décider où placer la caméra,... Comme pour un film normal.
Les marionnettes permettent-elles de faciliter l’accès à des thématiques complexes pour les enfants?
Oui. Quand ils sont petits, les enfants se servent d’objets transitionnels pour s’exprimer. Les marionnettes ont un côté affectif que n’ont pas les acteurs. Avec eux, le film aurait été trop mélodramatique.

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