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Bienne

Moins de fleurs et de pompons

Après cinq ans d’activité, Vanessa Wyssbrod a clos sa boutique Mademoiselle Pompon. D’autres magasins dans et autour de la vieille ville ferment également, notamment en raison de la crise du Covid-19.

Vanessa Wyssbrod a fermé la porte de sa boutique Mademoiselle Pompon située en vieille ville, après cinq ans d’activité. Photo de Matthias Käser

Par Deborah Balmer / Traduction Marcel Gasser

Vanessa Wyssbrod exploitait depuis cinq ans son magasin Mademoiselle Pompon, à la rue du Collège, en vieille ville de Bienne. Elle vient d’en rendre les clés. Signe distinctif de la boutique, le nain de jardin à casquette rouge qui gardait fidèlement l’entrée a trouvé refuge dans un jardin de la ville de Bienne. «Mais l’endroit exact est tenu secret», déclare Vanessa Wyssbrod en rigolant. Se séparer de ce cerbère débonnaire et d’autres objets qui symbolisaient Mademoiselle Pompon n’a pas été chose facile. «Mais maintenant, au moment de rendre les clés de la boutique, je ressens surtout un immense soulagement», poursuit-elle.

Il y a cinq ans, l’aventure avait commencé à la rue des Fontaines, en vieille ville. Vanessa Wyssbrod y vendait des bijoux faits maison, des vêtements, des habits pour enfants et des objets artisanaux chics réalisés par une cinquantaine d’artistes de toute la Suisse. «Au début, il n’a pas été facile de gagner la confiance des clientes. Mais par la suite le commerce s’est mis à marcher, et j’y ai toujours eu beaucoup de plaisir», raconte-t-elle.

Sarahgold ferme aussi

Aujourd’hui, quelques semaines après la fin du confinement dû à la crise du coronavirus, la clientèle est même revenue plus nombreuse que jamais dans la boutique. «J’ai réalisé ces jours-ci des ventes records qui ont même dépassé celles de Noël. Pour moi et pour mes artistes, c’était naturellement la manière idéale de prendre congé», explique Vanessa Wyssbrod qui, pour des motifs d’ordre privé, déménage à Berne, où elle exercera un nouveau job à temps partiel dans la vente. Pour elle aussi la pandémie a été un moment difficile, même si son propriétaire a accepté de lui faire payer que la moitié de son loyer durant cette période. «Tout le monde n’a, de loin, pas eu la même chance que moi. En tout cas, mon magasin n’aurait pas survécu à un deuxième confinement», poursuit-elle.

Mademoiselle Pompon n’est pas le seul commerce à fermer ses portes en vieille ville de Bienne ou à proximité. Ces derniers jours, un stand au Ring liquidait toutes sortes de créations florales, témoignant de la fermeture prochaine du magasin de fleurs Sarahgold. Sa propriétaire, Sarah Rufer, s’était spécialisée dans les arrangements floraux originaux et de saison, qu’elle composait avec beaucoup de passion et d’amour du détail. «C’est une liquidation totale, le moment est venu de valider les bons-cadeaux», a-t-elle écrit sur Facebook, remerciant chaleureusement sa clientèle pour les bons moments passés ensemble.

Cette horticultrice et fleuriste de formation a fermé son magasin samedi dernier après sept ans d’activité, au grand dam de sa clientèle. «Encore un joli magasin, une petite oasis colorée, qui disparaît», a écrit l’une des clientes. Durant la crise du Covid-19, Sarah Rufer a eu le temps de réfléchir à sa situation et en a conclu qu’elle ne souhaitait plus travailler autant pour, en fin de compte, être toujours obligée de tirer le diable par la queue.

Des First Fridays en moins

Le magasin de fleurs de Sarah Rufer n’est pas le seul à ressentir durement les effets du semi-confinement: d’autres commerces et restaurants ont également dû s’interroger sur leurs perspectives d’avenir. Ainsi le restaurant Pfauen, sur le Ring, avait fermé ses portes pendant un bon bout de temps, et la rumeur circulait déjà dans la vieille ville que la fermeture était définitive. Depuis quelques jours, pourtant, on voit à nouveau des clients attablés sur la terrasse.

D’autres commerçants hésitent aujourd’hui à reprendre les affaires. C’est le cas de Marc Fuhrer, patron de l’Edu’s Coffee and Clothes, à la rue des Maréchaux. «La suppression des First Fridays a durement impacté les finances de beaucoup de commerces», croit savoir cet homme toujours bien informé des événements de la vieille ville. «C’était en effet une bonne opportunité de réaliser en quelques heures le chiffre d’affaires de tout un samedi.» Fort heureusement, «l’Edu’s » a pu s’appuyer sur de confortables réserves. Avant la crise du Covid-19, il était même question d’ouvrir un deuxième magasin dans une autre ville. «Mais depuis, nous avons renoncé à ce projet», déclare Marc Fuhrer. Quant à la traditionnelle boutique biennoise Hood River, située non loin de là au Pont-du-Moulin12, ses vitrines laissent également craindre une cessation d’activité. Mais aux dernières nouvelles, il s’agirait plutôt d’un renouvellement radical de l’assortiment.

Où est la vieille ville?

Mais revenons à Mademoiselle Pompon, alias Vanessa Wyssbrod, qui présidait également la guilde de la vieille ville, fonction dont elle s’est retirée. «D’une manière générale, les propriétaires de magasin ont la vie dure. Ils ne s’en sortent que s’ils ont un revenu d’appoint et savent qu’ils peuvent compter sur un salaire fixe», explique-t-elle. C’est justement cela qui complique la situation, car les clients s’attendent à ce que le magasin soit ouvert chaque jour.

«Quand on exploite un petit magasin, le plus difficile c’est de se libérer l’esprit du travail. Le soir après la fermeture, durant le week-end, même durant les vacances: ça ne s’arrête jamais, et c’est usant», résume-t-elle. «Et puis il faut constamment trouver d’autres artistes.» Vanessa Wyssbrod s’autorise également quelques critiques à l’attention de la ville de Bienne. «La vieille ville n’est pas suffisamment signalisée: les gens qui ne connaissent pas les lieux ne s’y retrouvent pas facilement et doivent donc se mettre à sa recherche», conclut-elle. Vanessa Wyssbrod a déjà rendu les clés de Mademoiselle Pompon: le local accueillera sous peu une jeune coiffeuse.

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