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Votation du 28 mars

Berne, le Jura et Moutier s’entendent sur un message commun

Un avenant rédigé conjointement par les trois parties sera joint au matériel de vote. Il actualise les informations concernant ce scrutin et présente les principaux changements intervenus depuis le 18 juin 2017.

La répétition du vote de Moutier se fera sous une surveillance encore renforcée a-stéphane Gerber

Par Philippe Oudot

Annulée par le Tribunal administratif du canton de Berne, la votation du 18juin 2017 sera répétée le 28 mars prochain. En vue de ce scrutin, les cantons de Berne et du Jura, ainsi que la commune de Moutier, se sont entendus pour rédiger un avenant commun qui sera joint au matériel de vote. Ce document complète et actualise les informations figurant dans le message aux ayants droit qu’avaient rédigé chacune des parties en vue du premier vote.

C’est qu’un certain nombre de changements sont intervenus depuis ce fameux 18 juin 2017. D’abord, les deux communes de Sorvilier et de Belprahon, qui s’étaient également prononcées sur leur appartenance cantonale le 17 septembre 2017, ont choisi de rester bernoises. Ces deux votations étant rentrées en force, «l’appartenance cantonale de ces communes est réglée définitivement. Seule la commune de Moutier doit encore se prononcer», peut-on lire dans l’avenant.

Sept députés
Si la majorité des citoyens prévôtois devait opter pour un transfert dans le canton du Jura, la cité prévôtoise formerait alors une circonscription électorale propre et aurait droit à sept députés sur les 60 que compte le Parlement jurassien. C’est l’engagement pris par ce dernier, ainsi que le gouvernement, compte tenu des statistiques actuelles de la population. La création d’une hypothétique circonscription jurassienne comprenant égale-ment Belprahon, Crémines, Grandval et Sorvilier est donc caduque.

Un autre changement majeur concerne la situation de l’Hôpital de Moutier. La société «Hôpital de Moutier SA» (HDM SA) a été créée en juin 2018; elle est entièrement détenue par HJB SA. Afin 2018, un groupe de travail intercantonal institué par la Tripartite a été chargé d’élaborer différentes pistes afin de renforcer la collaboration entre HDM SA et l’Hôpital du Jura.

En janvier 2020, le groupe privé Swiss Medical Network (SMN) a fait l’acquisition de 34% du capital-actions de HJBSA, avec possibilité d’en acquérir 17% supplémentaires dans les trois ans, ce qui ferait du groupe SMN l’actionnaire majoritaire d’HJBSA.

Par ailleurs, conformément à une décision du conseil d’administration d’HJBSAprise en février 2020, l’établissement maintient des prestations somatiques aiguës (service de médecine interne), des urgences et un bloc opératoire sur le site. Et d’ici à fin 2021, il sera agrandi et réaménagé pour accueillir les patients stationnaires actuellement hospitalisés à Bellelay, dans le cadre du Réseau santé mentale interjurassien.

De son côté, le Conseil exécutif se félicite du maintien des prestations de proximité de soins aigus sur le site de Moutier (blocs opératoires, médecins, urgences), en plus des soins de santé mentale. Il relève la contribution apportée par le groupe privé Swiss Medical Network par un partenariat public-privé novateur rendu possible par sa décision d’ouvrir une partie du capital à SMN.

Quant au Gouvernement jurassien il estime que ce rapport permet «une avancée notable en vue de la pérennisation du site hospitalier de Moutier avec des prestations nécessaires pour l’ensemble du bassin de population du Jura et du Jura bernois, et ce, quelle que soit l’issue du vote sur l’appartenance cantonale». Il a toutefois demandé des investigations supplémentaires sur la faisabilité financière du projet dans son ensemble.

Et les emplois cantonaux?
Les chiffres concernant les emplois liés à l’appartenance cantonale de Moutier ont aussi été actualisés. Aujourd’hui, les unités administratives bernoises correspondent à 144 emplois à plein temps (EPT) (+3 dans les Eglises nationales). Ils sont répartis entre la Police cantonale, l’Intendance des impôts, le Tribunal civil et pénal, le Ministère public, l’Office des poursuites et faillites et la Prison régionale. Dans l’enseignement, on compte 117 EPT. Quant à l’HDM, il compte 257 EPT, nombre auquel s’ajoutent 10 autres du Département de santé mentale, intégré à l’Hôpital de Moutier.

Si la cité prévôtoise devenait jurassienne, quelque 180 EPT y seraient implantés par le canton du Jura. Son gouvernement a en effet confirmé ses engagements. Il entend ainsi installer à Moutier le Service des contributions, le Service de l’informatique, le Contrôle des finances et l’Office des sports. Elle accueillerait aussi un poste de la police cantonale et un Office régional de placement.

Par ailleurs, les modalités spécifiques les plus importantes de la votation du 28 mars 2021 sont expliquées dans la documentation adressée avec le matériel de vote. En conclusion de l’avenant, le Conseil municipal de Moutier et le Gouvernement jurassien recommandent de voter oui, alors que le Conseil exécutif invite les Prévôtois à voter non.

 

 

L’avenir de l’Hôpital de Moutier reste un des enjeux majeurs du scrutin sur l’appartenance cantonale

L’avenir de l’Hôpital de Moutier (HDM) n’est certes pas formellement lié au scrutin du 28mars, mais si la majorité des Prévôtois dit oui, c’est le canton du Jura qui définira à l’avenir dans sa liste hospitalière les prestations que l’HDMsera autorisé à fournir. Aujourd’hui, conformément à la liste hospitalière bernoise, celui-ci offre des prestations de soins somatiques aigus, dispose d’urgences et de blocs opératoires, en plus des prestations psychiatriques qui seront rapatriées de Bellelay à Moutier d’ici à fin 2021.

Sachant que ces dernières années, la stratégie sanitaire du canton du Jura a été de concentrer les soins somatiques aigus à Delémont et de faire du site de Porrentruy un centre de réhabilitation, les missions actuelles de l’HDM pourront-elles être maintenues en cas de transfert de Moutier dans le canton du Jura?

Pour Jacques Gerber, ministre en charge du Département de l’économie, de la santé et de l’agriculture, la question ne se pose pas en ces termes: «Le rôle du gouvernement est de garantir à la population des prestations sanitaires de qualité, en suffisance et de manière optimale, afin de couvrir ses besoins.» L’organisation de cette couverture n’est pas de son ressort, mais de celui du conseil d’administration de l’Hôpital du Jura (HJU), explique-t-il. «C’est ce dernier, et pas le Gouvernement jurassien, qui a choisi de concentrer les soins somatiques aigus à Delémont. Du côté politique, nous n’avons fait qu’adapter les bases légales pour cela.»

Au proprio de décider
Aujourd’hui, le capital d’HDM SA appartient à 100% à HJBSA, dont le groupe Swiss Medical Network (SMN)est actuellement actionnaire à hauteur de 34%. Le reste est détenu par le canton de Berne. SMNa toutefois la possibilité d’acquérir 17% supplémentaires d’ici à 2022 et deviendrait, le cas échéant, actionnaire majoritaire. Si Moutier rejoint effectivement le canton du Jura, poursuit Jacques Gerber, «ce sera au conseil d’administration d’HJBSA, quel que soit son actionnaire majoritaire, de décider s’il veut maintenir les prestations actuellement fournies par l’établissement prévôtois. Une fois encore, notre rôle est de veiller à garantir la couverture en soins hospitaliers de l’ensemble de la population. Aux acteurs de s’organiser en conséquence.»

Dans ce contexte, il note qu’aujour-d’hui déjà, la collaboration entre l’HDMet l’HJU fonctionne bien et qu’il n’y a aucune raison que cela change en cas de transfert de Moutier.

Mais la perspective de voir SMN devenir actionnaire majoritaire de HJBSAne dérange-t-elle pas le Gouvernement jurassien, lui qui avait tenté de bloquer la vente en faisant recours jusqu’au Tribunal fédéral? «Non, tranche Jacques Gerber. Si nous avons voulu bloquer la vente, c’est parce que le Conseil exécutif avait agi unilatéralement et sans concertation, alors qu’un groupe de travail intercantonal réfléchissait à l’avenir du site de l’HDM. Nous n’avions rien contre cet acteur privé mais craignions que cette vente n’entraîne l’abandon des discussions. Après concertation et en voyant que le groupe intercantonal allait poursuivre son travail, nous avons retiré la procédure.» Il souligne d’ailleurs que ces travaux ont abouti à une solution optimale et cohérente d’un point de vue sanitaire, avec cet hôpital intégré.

Un besoin avéré
Président de la Délégation aux affaires jurassienne du Conseil municipal de Moutier, Valentin Zuber rappelle que si les autorités prévôtoises défendent évidemment la pérennité de l’HDM, elles font également une lecture économique de ce dossier, car l’Hôpital de Moutier est un gros employeur.

Et si, en cas de oui, ce sera effectivement le canton du Jura qui fixera les missions dévolues à l’HDM, il rappelle qu’aujourd’hui, cet établissement répond à un besoin avéré pour assurer la couverture sanitaire et hospitalière de la région dans son ensemble et qu’il n’y a donc aucune raison objective à ce que cela change. D’ailleurs, la collaboration avec l’HJU fonctionne bien.

Certes, admet Valentin Zuber, il n’y a pas de garanties absolues quant au maintien de toutes les prestations actuelles en cas de changement d’appartenance cantonale. Mais il souligne qu’un non ne garantirait pas non plus le maintien de la totalité d’entre elles. «Aujourd’hui, en effet, l’HDMest dans les chiffres rouges, et un acteur privé va forcément agir pour ne pas perdre de l’argent», souligne-t-il. Dans ce contexte, il estime qu’à moyen terme, les prestations offertes par l’HDMseront sans doute plus ou moins les mêmes, quelle que soit l’appartenance cantonale de la cité prévôtoise, «et nous espérons qu’elles seront les plus proches de ce qu’elles sont aujourd’hui». Il note par ailleurs que l’intégration des patients stationnaires du Réseau santé mentale dans les locaux de l’HDMpermet d’y garantir le maintien des urgences, mais pas forcément sous la même forme qu’aujourd’hui.

Quant aux emplois qui seront proposés en cas de changement d’appartenance cantonale, Valentin Zuber souligne que le Gouvernement jurassien a confirmé les engagements pris avant la votation du 18 juin 2017, et que le nombre devrait même être supérieur: 180 emplois à plein temps, contre 170 annoncés initialement, contre 144 pour Berne. S’agissant des emplois au ceff, notre interlocuteur rappelle qu’au niveau de la formation professionnelle, les deux cantons collaborent en bonne intelligence. Et de rappeler les propos de l’ancien directeur de l’Instruction publique Bernhard Pulver qui affirmait à ce propos:«Il n’y a aucune raison de changer ce qui fonctionne bien!»

Rééquilibrage nécessaire
S’agissant du futur de l’HDM, Pierre Alain Schnegg, président du Gouvernement bernois et de la Délégation du Conseil exécutif aux affaires jurassiennes, rappelle qu’en cas de transfert, son sort est entre les mains du Gouvernement jurassien. Quant à l’avenir du ceff, des discussions seraient nécessaires pour assurer un rééquilibrage au niveau de la répartition des apprentis sur les différents sites de formation entre Bienne, le Jura bernois et le canton du Jura.

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