Vous êtes ici

Abo

Course à pied

Un périlleux exercice d’équilibriste

Maintien, report ou annulation? Les organisateurs de manifestations de la région, à l’image du Pangolin Malin ou du Trophée jurassien, se trouvent face à un dilemme. Mais ils ne se laissent pas abattre.

A l’heure actuelle, nul ne sait encore si les courses prévues ce printemps pourront avoir lieu dans la région (photo Stéphane Gerber)

Christian Kobi

L’hiver, rigoureux et d’une longueur interminable, a laissé place ces derniers jours à une météo printanière. Pour les amateurs de course à pied qui avaient décidé de s’offrir quelques semaines de répit durant les mois les plus froids de l’année, l’heure est à la reprise des entraînements. Et, déjà, à la planification des premières courses. Par où commencer? Par le Pangolin Malin à Crémines peut-être, première manifestation au calendrier régional après son report de l’automne dernier au 10 avril? L’idée semble plaire, quelque 140 coureurs y étant inscrits.

Seulement voilà, ici comme ailleurs, l’incertitude règne. «Franchement, je ne sais pas trop quoi vous dire», soupire Hervé Solignac, chef de file de Moutier Trail, l’association à l’origine du Pangolin Malin, qui attend de vivre sa 1re édition (24 km et 1350 m de dénivelé positif au programme). «Pour l’instant, on poursuit l’organisation comme si la course allait avoir lieu, mais on ne se fait pas beaucoup d’illusions. A l’heure actuelle, avec une limitation à 15 personnes, on peut tout simplement laisser tomber. Mais le fait est que les mesures évoluent de semaine en semaine, sans trop de cohérence, ce qui rend la planification impossible.»

L’alternative du petit
Le Prévôtois ne se laisse pas pour autant décourager. En cette fin de semaine, il a prévu d’appeler la hotline du canton de Berne pour prendre la température. «Si on me rit au nez en me disant que je suis fou, au moins je serai fixé...» A défaut d’un départ en masse, qui semble bien illusoire, l’organisateur est prêt à envisager un contre-la-montre, sans restauration, sans vestiaire, «dans le simple but d’offrir quelque chose aux coureurs». Et s’il faut s’y résoudre, il reportera une nouvelle fois sa manifestation à des temps meilleurs, «probablement cet été».

D’ici là, une décision devra aussi être prise concernant une autre course organisée par Moutier Trail, la PoP’uP run, prévue le 8 mai dans la cité prévôtoise. «En temps normal, elle réunit 500 à 600 personnes de tous âges. Je m’imagine mal recevoir les autorisations», reconnaît Hervé Solignac, qui planche déjà sur des courses de taille plus modeste, réservées à 50 participants, en guise d’alternative. «On a dû annuler trois événements en 2020. Cette année, on veut au moins en organiser un ou deux.»

Les adaptations du TJ
Les préoccupations d’Hervé Solignac, Jacques Riat les comprend bien. Le coordinateur du Trophée jurassien (TJ), série qui doit prendre son envol le 12 mai pour le VTT et le 29 mai pour la course à pied, vit la même situation. «A l’heure actuelle, on ne peut même pas se réunir pour mettre sous enveloppe les quelque 2000 invitations que nous envoyons aux participants», grimace-t-il. Une vingtaine de personnes sont en effet nécessaires pour ce travail, qui sera probablement décalé d’un mois, en avril.  

En attendant, le TJ s’adapte: faute de savoir combien d’épreuves pourront se tenir, le système des abonnements, qui permettrait aux participants d’obtenir des prix préférentiels, a été provisoirement suspendu. Au niveau du règlement, il suffira que trois courses aient lieu dans chaque catégorie (neuf sont prévues en VTT, neuf en course à pied) pour qu’un classement soit établi. «Nous n’allons mettre aucune pression sur les organisateurs. Chacun sera libre de ses choix», assure le coordinateur.

L’espoir de la fin de saison
Le 3 mars, une séance du comité du TJ servira à dessiner les premières tendances. Si l’incertitude règne pour ce printemps, l’espoir prend le relais en vue de la suite, notamment pour les courses prévues dans le Jura bernois à l’automne  (P’tit Raid à Moutier le 5septembre pour le VTT, Trophée de la Tour de Moron le 26 septembre à Malleray et les 10 Bornes le 30octobre à Courtelary pour la course à pied). «J’ai l’impression qu’on va vers une détente pour la deuxième partie de saison»,  projette Jacques Riat.

Un espoir auquel ils sont nombreux à se raccrocher. D’ici là, les organisateurs poursuivront leur numéro d’équilibriste.

 

Forte opposition aux tests obligatoires

L’annonce a fait grand bruit. Au début du mois, le comité d’organisation du Swiss Canyon Trail, qui doit se tenir les 5 et 6 juin dans le Val-de-Travers, publiait son règlement sanitaire 2021. «A l’entrée du site de la manifestation, chaque participant devra présenter une attestation de test PCR réalisé maximum 72 heures avant le début de l’événement», pouvait-on notamment y lire. Le début d’une vive polémique.

«Pour ma part, je suis totalement opposé à cette façon de faire. Si nous acceptons cela aujourd’hui pour maintenir à tout prix notre manifestation, cela finira par devenir notre quotidien. Je le refuse», lance Hervé Solignac, le chef de file de l’association Moutier Trail, qui craint qu’un système inégalitaire ne se mette en place entre ceux qui pourront s’offrir un tel test PCR et les autres. «Celui-cicoûte 168 francs, une somme évidemment à la charge du participant. Ce n’est pas une solution viable.»

Des craintes partagées du côté du Trophée jurassien. «Je m’exprime à titre personnel, car nous n’en avons pas discuté au sein du comité, mais j’y suis opposé», déclare Jacques Riat, coordinateur du TJ. Cette semaine, devant la polémique suscitée, les organisateurs du Swiss Canyon Trail ont annoncé «continuer la recherche de solutions plus adaptées, moins onéreuses voire peut-être gratuites».

 

MSO-Chrono ne proposera pas de deuxième Romandie Run

Les incertitudes qui entourent les manifestations censées se tenir ce printemps frappent de plein fouet MSO-Chrono. «Jusqu’à fin mars, hormis la Coupe du monde de ski alpinisme réservée aux professionnels et quelques manches du championnat de Suisse, tout a été annulé», indique son directeur, Roland Müller. Ce n’est guère mieux pour avril, où 18 événements sont d’ores et déjà passés à la trappe, portant ce chiffre à 45 depuis le début de l’année. «En ce qui concerne le mois de mai, beaucoup d’organisateurs n’ont pas encore ouvert les inscriptions. Dès qu’ils le font, cela engage des frais pour eux. De ce fait, on constate que beaucoup préfèrent désormais attendre le dernier moment, ce qui est normal au vu des incertitudes.»

Fortement impactée par toutes ces annulations, la société de chronométrage basée à Delémont a subi une baisse de son chiffre d’affaires de l’ordre de 88% pour l’année 2020, ce qui représente une perte sèche de 300 000 francs. «Heureusement, nous avons touché des aides du canton du Jura et de la Confédération, aides que nous avons l’assurance de recevoir à nouveau cette année», informe le citoyen de Moutier, qui assure que sa société vit sur des bases financièrement saines et que la situation actuelle ne la met pas en danger.

Le boom du chrono permanent
L’an dernier, pour compenser la forte baisse d’activité, MSO-Chrono avait mis sur pied la Romandie Run, dont deux étapes avaient été organisées dans le Jura bernois (Le Pommier d’Amour à Moutier et le Trail estival des Pavés à LaNeuveville). Un concept qui n’a pas connu le succès escompté et qui ne sera, par conséquent, pas reconduit cette année. «Il nous aurait fallu 300 participants par événement pour que cela soit rentable. Or, il y en a eu moins de 100 en moyenne», rappelle Roland Müller, qui reçoit de plus en plus de demandes pour la mise en place d’un chronométrage permanent sur certains parcours. C’est notamment le cas de Sierre - Zinal, qui a prévu de proposer une course sur six semaines (du 4 août au 12 septembre) si la 48e édition ne peut pas avoir lieu sur un seul jour, le 7 août.

La crise sanitaire due au Covid-19 n’a décidément pas fini de chambouler les habitudes. Dans le monde de la course à pied comme ailleurs.

Articles correspondant: Sport régional »