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Haltérophilie

Des records qui en appellent d’autres

Douzième des championnats d’Europe à Moscou, le Tramelot Yannick Tschan a réalisé des performances de choix.

En Russie, Yannick Tschan a soulevé un total de 323 kg, nouvelle marque de référence suisse chez les moins de 96 kg. (archives Andrea Baumann)

Laurent Kleisl

Il existe deux manières très simples d’appréhender un résultat sportif: le classement et la performance. Engagé la semaine passée aux championnats d’Europe élites à Moscou, Yannick Tschan a échoué au 12e rang final, sur 14, dans la catégorie réservée aux moins de 96 kg, tout en battant ses propres records de Suisse, autant à l’arraché qu’à l’épaulé-jeté. «Dans notre catégorie, les meilleurs d’Europe sont également les meilleurs mondiaux», souligne-t-il. «Deux athlètes se sont loupés.... Donc, il y avait quand même 16 engagés!»

Dans le cas du Tramelot de 24 ans, sur la scène européenne, le classement est anecdotique. Un futile détail quantitatif qui s’efface humblement devant la performance pure, une valeur ordinale hautement qualitative. Avec 143 kg à l’arraché et 180 kg à l’épaulé-jeté, Yannick Tschan a respectivement amélioré de 5 kg et de 8 kg ses marques de référence sur le plan helvétique, établies en automne 2019. «Avec Gabriel Prongué, entraîneur de l’équipe de Suisse, nous nous étions fixé un total de 320 kg», indique-t-il. Pour trois kilos, la mission est remplie et bien remplie. Son total record de 306 kg, également, a désormais été effacé des tabelles nationales.

Toujours plus lourd
A Moscou, pour la deuxième apparition de sa carrière à l’échelle du continent, Yannick Tschan effectuait son come-back international. Après une accumulation de blessures entre 2017 et 2018, il avoue avoir été contraint de «rattraper le temps perdu». «J’ai dû retrouver la force et le niveau adéquat pour me présenter à des championnats d’Europe», dit-il. «Depuis, à part un léger souci à un genou, je n’ai plus eu d’ennuis physiques. Mon travail commence à payer, je sens que j’ai encore une grosse marge de progression, que je peux m’approcher du top 10 continental.»

Cette ambition ne tombe pas du ciel, elle est légitime et attisée par Michel Fink, son coach au Weightlifting Club Aarau. «Nous avons établi un plan sur le long terme, un plan qui doit me permettre de soulever entre 350 et 360 kg au total», explique Yannick Tschan. A 360 kg, le Tramelot aurait grimpé jusqu’à la 6e place, la semaine dernière, sous les projecteurs de Moscou.

Dans l’immédiat, la barre est fixée à 335 kg, soit le minimum pour accéder aux championnats du monde, plateau très sélect auquel il n’a encore jamais été confronté. «Si le calendrier ne change pas d’ici là, les Mondiaux auront lieu en novembre à Batoumi, en Géorgie», complète le triple champion de Suisse toutes catégories (de 2018 à 20).

Sous la bannière biennoise
Pour soulever de la fonte sur les bords de la mer Noire, Yannick Tschan devra dénicher une épreuve sur sol suisse où il pourra tenter d’atteindre cette limite qualificative. Parce qu’en cette époque de mesures sanitaires, les haltérophiles sont également soumis aux règles imposées au sport amateur. «Le calendrier des compétitions nationales n’a pas encore été confirmé», observe-t-il. «Si aucun rendez-vous ne peut être organisé d’ici au mois d’août, une compétition interne rassemblant les cadres de l’équipe nationale sera mise sur pied. Elle nous permettrait également se savoir un peu mieux où on se situe.»

Si Yannick Tschan parvient à ses fins, il le fera sous la bannière du Barbell Club Bienne Seeland. Talent issu des usines à champions du vénérable Haltéro-Club Tramelan, il a quitté la maison mère en 2019 pour monter sa petite entreprise au bout de lac. «A Tramelan, on avait des divergences d’opinions, on perdait beaucoup trop d’énergie dans des palabres qui me semblaient inutiles», raconte-t-il. «Ainsi, avec quelques athlètes que je côtoie au CrossFit Bienne, nous avons décidé de fonder notre propre club d’haltérophilie.»

De Tramelan à Batoumi, en passant par Bienne et Moscou, c’est le chemin menant vers la gloire, celui que Yannick Tschan a choisi d’arpenter.

 

En quête de sponsors

Le matin, Yannick Tschan embrasse la profession de polymécanicien, à Tramelan, chez Precitrame Machines SA. Un job à 60%. L’après-midi, il descend au bord du lac et enfile ses habits d’entraîneur au CrossFit Bienne. Un job à 40%. «L’haltérophilie est un sport purement amateur», rappelle-t-il. «Je remercie d’ailleurs le CrossFit Bienne de m’avoir donné des heures, durant les cinq semaines qui ont précédé les championnats d’Europe, pour m’entraîner pendant mon travail.»

Dans le monde de la fonte et des haltères, la recherche de sponsors n’est pas un sport encore très en vogue. Pour couvrir les près de 15 000 fr. qui lui sont nécessaires pour financer une saison, Yannick Tschan se lance, timidement, à la recherche de partenaires. «Ce n’est malheureusement pas la bonne période pour trouver des soutiens», admet le Tramelot établi à Reconvilier. «Dans l’idéal, j’aimerais pouvoir un peu baisser mon temps de travail afin de me concentrer davantage sur l’haltérophilie.» Déplacement, logement, visa, les frais liés à sa participation aux Européens, la semaine dernière à Moscou, ont été pris en charge par la Fédération suisse.

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