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Moutier

Difficile avant 2025

Le Canton du Jura a présenté, ce matin, les contours des travaux qu’il a commencé d’entreprendre pour accueillir la Prévôté. Mais certainement pas en 2024.

Désormais ex-maire de Saint-Imier, Patrick Tanner embrasse dorénavant la fonction de responsable pour le Jura de l’accueil de la ville de Moutier. Ici aux côtés de la présidente du Gouvernement, Nathalie Barthoulot. Stéphane Gerber

Par Dan Steiner

Après une heure de conférence de presse et une salve de questions des médias aussi régionaux que nationaux, il est bien difficile de rapporter quelque annonce tapageuse après la présentation des grandes lignes par les autorités jurassiennes, ce matin, du processus de transfert de la ville de Moutier. Reste qu’il est tout à fait possible d’en tirer plusieurs enseignements significatifs. Qui ne plairont pas forcément aux mouvements de lutte encore actifs ni aux partis du jeune canton, qui poussent pour une arrivée de la Prévôté en 2024 déjà ainsi qu’au maintien des fameux articles 138 et 139 de la Constitution jurassienne (lire aussi ci-contre).

Interrogée lors de l’annonce de la nomination du désormais ex-maire de Saint-Imier, Patrick Tanner, au poste de responsable pour le Jura de l’accueil de Moutier, Nathalie Barthoulot estimait déjà que le 1er janvier 2024 paraissait «tôt», mais qu’elle, la présidente du Gouvernement jurassien, et ses associés feraient leur «possible». On précise désormais que le «calendrier établi laisse peu de probabilités que Moutier soit accueilli en 2024, déjà. Au plus tôt le 1er janvier 2025 car la réalité temporelle du traitement du concordat ne permet pas objectivement d’envisager une arrivée en 2024», explique-t-elle. Condition sine qua non au déménagement, le concordat devra être ratifié par les deux Cantons – Exécutifs, Législatifs et populations – ainsi que par les Chambres fédérales.

Ce concordat, justement, constitue l’objet principal de l’un des quatre axes détaillés par Patrick Tanner et Nathalie Barthoulot à l’Ecole jurassienne du bois de Delémont. Un lieu pas choisi au hasard, puisqu’il symbolise une réorganisation réussie, celles des institutions bruntrutaine et prévôtoise. «Un modèle de coopération cantonale», sourit Nathalie Barthoulot. Près de 150 apprenties et apprentis du Jura et de Berne la fréquentent.

La négociation sur le partage des biens attendra

Ce premier axe, donc, a pour objectif l’élaboration d’accords équitables permettant l’adhésion de la population jurassienne. Outre la ratification du concordat fixant les modalités du transfert de Moutier, il concerne les ententes réglant la dévolution administrative et judiciaire, ainsi que le fameux partage des biens. Là non plus, pas d’avancée majeure, étant donné que «nous ne sommes même pas encore allés visiter les bâtiments», avoue la présidente du Gouvernement jurassien au sujet des biens immobiliers que l’Ours possède à Moutier.

Pour ce qui est des trois autres axes, notons que la venue de la ville a été désignée par le canton du nord comme une opportunité de réorganiser son administration, histoire d’huiler les rouages. Digitalisation, gains en efficience et en qualité étant les termes sous-entendus ici. A ce titre, les autorités jurassiennes confirment une fois encore leur engagement, à savoir le déplacement de 180 emplois équivalents plein temps à Moutier, notamment le Service des contributions, celui de l’informatique, le Contrôle des finances et l’Office des sports.

Attachement et impatience

Finalement, le cadre légal jurassien devra être adapté. «Le changement d’appartenance cantonale d’une ville de l’importance de Moutier constitue un événement inédit en Suisse», fait remarquer Patrick Tanner. «Afin d’éviter tout vide juridique, de nombreuses modifications constitutionnelles et législatives seront ainsi nécessaires.» Notamment pour permettre à la cité de former, provisoirement, une circonscription électorale pour les élections cantonales, ce qui doit lui permettre d’y faire élire entre six et sept personnes, selon l’évolution de sa population.

Quant aux différentes relations que la ville de Moutier entretiendra avec ses voisines une fois jurassienne, celles-là devront être maintenues voire développées, esquisse-t-on à Delémont. «Nombreux seront les ponts à entretenir et à construire, alors que de nouveaux accords intercantonaux viendront compléter ceux déjà éprouvés», poursuit l’Imérien. A ce titre, Nathalie Barthoulot a tenu à préciser que le déménagement de l’antenne Artisanat du ceff, de Moutier à Bienne, n’était pour l’instant qu’une proposition.

A noter pour terminer que, étant donné l’importance du processus dans le programme de législature, la création d’un logo et d’un slogan, «Moutier dans le Jura», a également été présentée, ce matin. Le point d’exclamation rouge composant le mot «Mout!er» vise à «exprimer une forme d’attachement, d’élan ainsi qu’une sorte d’impatience», conclut Patrick Tanner. Pas de quoi gagner deux ans, malheureusement.

L’avancée du projet côté jurassien est à suivre ici.

Les art. 138 et 139 devraient disparaître

Si toutes les parties prenantes – et même celles qui ne le sont pas – conviennent que ces quelques lignes figurant dans la Constitution jurassienne ne comptent que dans les cœurs (surtout l’art. 138, qui traite des territoires concernés par le scrutin du 23 juin 1974), certaines personnes ou partis politiques jurassiens ont de la peine à avaler que leur Gouvernement a accepté les requêtes bernoises en vue de leur suppression.

Mais sa présidente, Nathalie Barthoulot, a une nouvelle fois été claire: leur maintien ne ferait que mettre en péril le processus de transfert. «Nous avons compris les réactions. Il y a en effet eu, au départ, de la stupeur, de la déception, de la colère, même, mais nous avons ensuite mené un travail d’information au sujet de notre stratégie, et je crois que la situation est en train de s’apaiser», estime-t-elle. «Une Constitution n’est pas un livre d’histoire et les partis ont compris que la lutte par rapport à ces articles n’était plus à l’ordre du jour si l’on voulait accueillir Moutier rapidement.»

De nouvelles entités

* Commission spéciale mixte Composée de sept membres du Parlement jurassien et sept duConseil de ville de Moutier, elle examinera les accords intercantonaux et les modifications constitutionnelles et légales avant leur traitement en plénum.

* Comité paritaire Constitué de membres de la Délégation aux affaires jurassiennes (DAJ) des Exécutifs jurassien et prévôtois, il échangera et intégrera des membres pro-bernois au processus du transfert.

* Comité de pilotage En font notamment partie la présidente de la DAJ, des chefs de service et Patrick Tanner. Qui discutent et proposent des orientations stratégiques et «soulèvent des points de vigilance le plus tôt possible».

 

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