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Culture

Accusations sans fondement

Pour leurs infrastructures, Berne, Bienne et Thoune toucheraient des subventions à double, au détriment du Jura bernois, dénonçait Maxime Zuber

Selon le gouvernement, les villes-centres comme Bienne, Berne ou Thoune ont des dépenses culturelles bien plus élevées que les communes-sièges de Moutier, La Neuveville et Saint-Imier. Archives

Philippe Oudot

En matière de contribution à la culture, le Jura bernois serait-il victime d’une «flagrante injustice» par rapport aux centres urbains de Berne, Bienne et Thoune? C’est en tout cas ce que dénonçait le député-maire de Moutier Maxime Zuber dans une interpellation urgente déposée en juin dernier. Une situation qui, selon l’élu, résulterait de l’application conjointe de la loi sur l’encouragement des activités culturelles (LEAC) et de la loi sur la péréquation financière et la compensation des charges (LPFC).

Le député relevait en effet que ces trois villes bénéficiaient d’un double subventionnement pour leurs infrastructures culturelles. D’abord en tant que communes-centres, selon la LPFC, et ensuite en tant que communes-sièges reconnues par la LEAC. «Ce double subventionnement est inacceptable puisqu’il privilégie ces villes qui supportent ainsi proportionnellement moins de charges que les autres communes du canton finançant des institutions culturelles sur leur territoire», fustigeait-il.

Le Jura bernois plumé

Selon les calculs de Maxime Zuber, la contribution à la culture de ces villes-centres serait d’environ 60 fr. par habitant, soit nettement moins que celle des communes-sièges du Jura bernois. A savoir 70 fr. pour Moutier, 80 à 85 fr. pour La Neuveville, et 90 fr. pour Saint-Imier.

Pour l’ensemble du Jura bernois, le solde négatif annuel se monterait à 330 000 fr. «Autrement dit, les efforts consentis par les communes du Jura bernois seraient redirigés vers d’autres lieux et en aucun cas, les communes-sièges du Jura bernois ne bénéficient d’un quelconque allégement significatif de leurs charges», tonnait l’élu prévôtois. Pas étonnant que certains élus communaux aient le sentiment que «les communes du Jura bernois se font plumer».

Aussi exigeait-il du gouvernement des explications. Il demandait ainsi s’il avait connaissance «des effets inéquitables de l’application conjuguée de ces deux lois». Il voulait donc savoir si le Conseil exécutif était prêt à corriger le tir et à modifier la LPFC en accordant le statut de centres à Moutier, La Neuveville et Saint-Imier.

Les points sur les i

Dans une longue réponse circonstanciée dont on vous épargne les détails, le gouvernement rappelle d’abord les buts des deux lois en question. La LPFC vise «à atténuer les inégalités résultant des différences de capacité financière et de charges entre les communes et tend à équilibrer la charge fiscale». Cela permet notamment de soulager les communes-centres qui ont des charges structurelles lourdes.

Il précise que c’est toujours la totalité des communes du canton qui est incluse dans la compensation des charges, pas seulement celles du Jura bernois. «Il n’est donc pas admissible, pour des raisons de méthode, de considérer de manière isolée certains transferts de charges et d’établir un lien direct avec d’autres instruments de péréquation financière et de compensation des charges ou avec d’autres domaines d’activités, par exemple l’encouragement des activités culturelles», assène le gouvernement.

Quant à la LEAC, elle a pour but de créer des conditions favorables pour la culture. Elle règle la répartition des coûts pour les communes d’une région en fonction de leur population résidante.

Chiffres erronés

Fort de ce rappel, le Conseil exécutif rassure Maxime Zuber:oui, il connaît très bien les conséquences financières de la LEAC et de la LPFC. Mais en l’occurrence, il conteste fermement les effets avancés par le député.

D’abord, «le calcul des dépenses culturelles par habitant pour Moutier, La Neuveville et Saint-Imier intègre aussi les parts résultant des transferts de charges liés à la révision de la LPFC et à la nouvelle loi sur la promotion des activités culturelles». En réalité, ces dépenses sont de 45 fr. pour Moutier, 57 pour La Neuveville, et 65 pour Saint-Imier, corrige-t-il.

S’agissant de la contribution à la culture de Berne, Bienne et Thoune, le montant de 60 fr. brandi par l’interpellateur est erroné. Les dépenses sont en effet bien plus élevées. A Bienne par exemple, les charges nettes par habitant s’élèvent en effet à 309 fr.

«Compte tenu de la ‹part culture› de l’indemnisation forfaitaire des charges de centre urbain (97fr.), les dépenses culturelles tombent à 212 fr. par habitant», note le Conseil exécutif. De surcroît, après déduction de la «part culture» des 97fr. d’indemnisation forfaitaire, «la ville de Bienne doit encore supporter seule des charges de centre urbain de 48 fr. par habitant». En clair, les villes-centres de Berne, Bienne et Thoune ont des dépenses culturelles bien plus élevées que celles des communes-sièges de Moutier, La Neuveville et Saint-Imier, assène-t-il.

Il précise par ailleurs que Berne, Bienne et Thoune ne sont pas rétribuées à double titre pour leurs infrastructures culturelles, car les allégements dont elles bénéficient en tant que communes-sièges selon la LEAC sont pris en compte dans le calcul des charges de centre urbain. Dans ce contexte, le Conseil exécutif ne voit aucune nécessité à apporter des corrections.

Quant à la mise en place d’une solution particulière pour les communes-sièges du Jura bernois, le gouvernement n’en veut pas davantage, la jugeant inappropriée pour des raisons de politique cantonale. Tout au plus se dit-il prêt à «examiner, dans le cadre de la prochaine évaluation de la LPFC, s’il y a lieu d’élargir le cercle des communes remplissant des fonctions de centre urbain».

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