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Bienne

Art et science en bouquet

Dans l'exposition «in-flore-scientia», le Nouveau Musée de Bienne mêle les œuvres botaniques de Josef Hanel à celles de l’artiste contemporaine Gabriela Maria Müller.

Le pissenlit officinal dans tous ses états, capturé par le photographe Josef Hanel. DR

Julie Gaudio

Niché dans un écrin de verdure à proximité d’arbres centenaires longeant la Suze, le bâtiment Schwab du Nouveau Musée de Bienne (NMB) semble le décor parfait pour accueillir «in-flore-scientia», mêlant diverses œuvres d’art aux motifs et matériaux naturels. Présentée dès samedi, et jusqu’au 8 août, l’exposition rassemble les travaux du photographe Josef Hanel, et ceux de l’artiste contemporaine Gabriela Maria Müller.

Le premier a réalisé, dans le courant du 20e siècle, des centaines de clichés de motifs botaniques, développés sur des diapositives en verre. Celles-ci ont été découvertes en 2015 dans une cave de l’Université de Zurich par Christiane Jacquat, conservatrice honoraire du Musée botanique de ladite institution universitaire. «Lorsque j’ai déniché ces diapositives, je ne savais pas qui en était l’auteur. Je n’avais que les initiales ‹I.H.› inscrites sur les œuvres», raconte Christiane Jacquat.

Travail d’orfèvre

Après de nombreuses recherches, notamment auprès d’historiens, la conservatrice honoraire parvient à remonter la trace de Josef Hanel, né dans la région des Sudètes en 1865, appartenant alors à l’Autriche. «J’ai également appris que Josef Hanel capturait ses sujets en noir et blanc, avant de les colorier lui-même à la main», précise Christiane Jacquat. Un travail minutieux, réalisé sur des rectangles de 8x10 cm.

«Le nom de l’exposition ‹in-flore-scientia› constitue un jeu de mots avec le mot ‹inflorescence›, qui représente la disposition des fleurs sur la tige d’une plante. Hanel avait d’ailleurs cette particularité de ne pas photographier les plantes à plat sur une feuille, mais en relief», précise en outre la conservatrice honoraire.

Consciente de la beauté artistique de ce travail scientifique, Christiane Jacquat décide, en 2019, d’approcher le Museo Vincenzo Vela à Ligornetto, au Tessin, pour proposer une exposition en collaboration avec le Musée botanique de l’Université de Zurich, avant que celle-ci ne soit présentée à Bienne. «En plus de faire résonner les œuvres d’Hanel avec les sculptures de Lorenzo Vela (frère de Vincenzo), nous avons eu l’idée d’y ajouter les œuvres d’une artiste contemporaine», détaille la conservatrice honoraire.

L’Appenzelloise Gabriela Maria Müller, résidant au Tessin, a ainsi été choisie, en partie car elle réalise ses travaux en utilisant des pollens, des graines, de la terre et de la cire, et qu’elle s’interroge sur le caractère éphémère et la métamorphose du monde végétal. Tout en délicatesse et poésie, les œuvres de Gabriela Maria Müller dévoilent ainsi des motifs végétaux sur de fins tissus. «Pour l’installation ‹Cœurs sacrés›, j’ai cousu en spirale sur un voile les milliers de graines séchées de l’orme», explique l’artiste devant le résultat de son travail affiché dans la salle «Art et nature».

Peintres Robert en miroir

Au même endroit, l’illustration du pissenlit de Josef Hanel, révélant ses différentes étapes de floraison, trône en majesté. «L’art du photographe réside dans sa manière de représenter de façon artistique des critères botaniques», souligne Christiane Jacquat. Cette façon si particulière et propre à Josef Hanel saute encore plus aux yeux dans la rotonde du bâtiment Schwab, qui se pare d’un bouquet de fleurs des champs dévoilées dans leurs plus beaux atours.

Pour l’exposition biennoise, la directrice du NMB, Bernadette Walter, a tenu à glisser aussi quelques toiles des peintres Robert, qui se sont appliqués à représenter la nature minutieusement. Dans la salle consacrée à la forêt est ainsi exposée une œuvre de Philippe Robert représentant une série de troncs d’arbres, de mousses et de lichens. «En découvrant ce tableau, j’ai ressenti les mêmes sensations que lorsque je me suis rendue dans la forêt où Josef Hanel a capturé de nombreux clichés de plantes», confie Christiane Jacquat, en souriant à l’évocation de ce souvenir. Une preuve supplémentaire que la nature, l’art et la science s’imbriquent étroitement, et en tout temps.

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