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Plateau de Diesse

Autorités négligentes ou accusations infondées?

Un habitant de Prêles dénonce la hausse massive de la taxe sur les eaux usées et déplore les piètres performances de la station d’épuration. Pas si simple, répond la commune.

Quoi qu’il en soit, le plan directeur cantonal prévoit la fermeture de la station d’épuration de Prêles en 2025 au plus tard. (Bernard Schindler)

Philippe Oudot

Habitant de Prêles, Michel Willemin est fâché contre les autorités de Plateau de Diesse. «Alors qu’on aurait pu s’attendre à un gain d’efficacité de l’administration suite à la fusion de Diesse, Lamboing et Prêles, en 2014, je constate qu’il n’en est rien et qu’on gaspille les deniers publics», déplore-t-il.

Il en veut pour preuve la hausse massive de la taxe d’évacuation des eaux usées introduite cette année. Après une première augmentation de 50ct. par mètre cube, à 2fr.30, en 2016, la commune a récidivé avec une nouvelle hausse, de 48% cette fois, portant la taxe à 3fr.40.

De quoi susciter l’ire de Michel Willemin, qui a écrit aux autorités communales pour dénoncer cet état de fait. «Cela correspond à une augmentation de 89% en deux ans!», tonne notre interlocuteur, qui accuse les autorités de mal gérer les deniers communaux. «Quand on a un problème de finances, il y a deux solutions: soit on maîtrise mieux ses dépenses, soit on augmente ses recettes. Ici, on choisit toujours la 2e solution.» Ce qui le gêne en particulier, «c’est que cette taxe d’évacuation des eaux usées est la plus chère loin à la ronde. Je ne dirais rien si notre STEPétait le fleuron en matière d’épuration, mais c’est loin d’être le cas!»

Autofinancement
Tout en comprenant l’argumentation de Michel Willemin, qui se plaint de payer aussi cher pour une installation pas vraiment au top, Marie-Claude Schaller, conseillère communale en charge de la STEP, assure que la commune n’avait pas le choix. «Jusqu’à présent, nous n’avions pas majoré cette taxe grâce à des prélèvements sur un fonds de réserve. Mais celui-ci est épuisé. Et comme ce service, à l’instar des autres, doit être autofinancé, nous avons dû augmenter le barème. Par ailleurs, nous avons aussi dû répercuter la nouvelle taxe de 9fr. par habitant introduite par la Confédération sur les micropolluants.» Cette dernière doit contribuer à financer les investissements initiaux afin d’assurer la réduction des micropolluants dans les STEP.

Ces griefs ne sont pas les premiers que ce citoyen adresse aux autorités de sa commune. L’an dernier, il s’était déjà plaint à propos des piètres performances de la station d’épuration de Prêles, une des premières construites dans le Jura bernois, et la seule du Plateau encore en activité.

Une installation vétuste, dont le fonctionnement ne répondrait pas aux exigences des installations plus modernes. Habitué à passer à proximité en faisant son jogging, Michel Willemin s’était plaint de la mauvaise qualité des eaux de rejet – après avoir constaté la présence d’algues et de mousses de couleur douteuse à proximité de l’exutoire de la STEP –, et des odeurs très nauséabondes qu’elle dégage selon les conditions météo.

Or, poursuit-il, les eaux de rejet s’écoulent dans un petit ruisseau qui se jette dans le lac, où elles devraient finir par se diluer. En réalité, «le débit du ruisseau est insuffisant et l’eau n’arrive souvent pas jusqu’au lac, car en raison de la nature karstique du sol, elle s’infiltre dans le terrain, se retrouve dans les vignes de Schernelz, voire dans la nappe phréatique. On ne sait pas où, ni avec quels polluants et en quelle quantité», dénonce-t-il.

Guère satisfaisante
Inquiet, il avait alerté l’Office des eaux et des déchets au printemps 2016. Les analyses biologique et chimique effectuées sur la base de prélèvements effectués sur place avaient conclu que cette STEPne satisfaisait pas aux dernières exigences, ni en termes biologiques, ni en termes chimiques, sans toutefois dépasser les normes légales. Dans ce contexte, Michel Willemin juge scandaleux d’attendre jusqu’en 2025, délai fixé par le canton dans son plan directeur pour fermer la STEP, avant d’agir.

«Nous sommes en Suisse, pas dans un pays du tiers-monde. Je trouve inadmissible qu’on n’agisse pas plus tôt! D’autant que la STEP se situe dans une zone de protection des eaux souterraines. Il est par exemple interdit d’y forer le sol pour installer une pompe à chaleur, sous prétexte de quelques litres de liquide caloporteur, mais on tolère que des milliers de mètres cubes d’eau polluée s’infiltrent dans le sol.» Il se dit d’autant plus déçu que «l’un des membres du Conseil municipal est un dirigeant de Pro Natura».

Et d’ajouter que si les autorités restent particulièrement passives sur ce dossier, elles cherchent à se donner bonne conscience «en investissant dans un étang artificiel censé favoriser la reproduction de crapauds accoucheurs et servir en même temps de bassin tampon lors de fortes pluies. C’est vraiment n’importe quoi…»

Dans les normes
De son côté, Marie-Claude Schaller admet que les performances de la STEPne sont pas optimales, qu’il y a parfois de mauvaises odeurs, «mais selon les analyses régulièrement faites par le responsable de la STEP de Douanne, notre installation est certes dans la fourchette supérieure, mais elle ne dépasse pas les normes légales.»

Et contrairement à ce que Michel Willemin laisse entendre, elle assure que la commune ne reste pas inactive. «L’an dernier, nous avons mandaté un bureau d’ingénieurs pour étudier les solutions possibles.» Elle rappelle en outre qu’il y a une dizaine d’années, la commune de Prêles avait refusé de s’associer à Diesse et Lamboing lorsque les villages avaient choisi de relier leurs eaux usées à la STEPde Douanne.

Aujourd’hui, plusieurs variantes sont à l’étude, «mais un tel projet ne se fait pas du jour au lendemain». L’idée serait de rejoindre, à Schernelz, la conduite qui amène les eaux usées de Diesse et Lamboing à la STEPde Douanne. Mais celle-ci devrait être totalement rénovée – ou fermée –, et les eaux usées devant alors être traitées à la station de Bienne ou à celle du Landeron. En attendant d’en savoir plus, la commune de Plateau de Diesse a récemment procédé à quelques investissements pour améliorer le fonctionnement de l’installation de Prêles. «Nous avons notamment changé une pompe», indique-t-elle.

De son côté, le maire Raymond Troehler s’étonne de l’activisme de Michel Willemin contre les autorités communales, qualifiant de «quérulent» ce citoyen qui n’a même pas pris part à l’assemblée communale qui a avalisé la hausse de la taxe sur les eaux usées. S’agissant des performances de la STEP, il constate que si les analyses ne correspondent pas à ses attentes, elles respectent néanmoins les normes. Raymond Troehler observe par ailleurs que «ce citoyen qui prétend que nous ne faisons pas notre travail ne s’est pas montré plus actif durant la période où il siégeait au Conseil communal».

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