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Conseil du Jura Bernois

Conscient de son rôle

Le 25 novembre, le Jura bernois procédera à l’élection du CJB. Un organe méconnu, mais incontournable?

Marcelle Forster considère que le CJB occupe une place importante, notamment pour les institutions interjurassiennes à Moutier. Photo: archives/ Stéphane Gerber

Par Pierre-Alain Brenzikofer

Elle mettra un terme à sa carrière politique en tant que présidente du CJB, Marcelle Forster.La socialiste prévôtoise peut donc s’exprimer sans retenue aucune sur une institution qui lui tient à cœur. Et qui, selon elle, a trouvé sa vitesse de croisière. «Lors de nos séances, confie-t-elle, nous parvenons toujours à déterminer ce qui est positif pour l’institution et ce qui ne l’est pas. Bref, nous finissons presque toujours par nous mettre d’accord. Fait à mentionner, l’affrontement gauche-droite concerne presque toujours les dossiers cantonaux.

Mais ce clivage n’apparaît pas quand il est question de la région.» Reste que l’organe demeure mal connu, voire mal perçu.La Prévôtoise n’en disconvient pas. Elle affirme surtout que pour les institutions culturelles et les groupes sportifs, le CJB est tout bonnement incontournable: «Ils connaissent désormais notre existence.J’en veux pour preuve la hausse des subventions que nous leur accordons.»

Toujours plus consulté
Et à Berne? «Bon, il peut encore arriver qu’une administration oublie que le statut particulier nous octroie le droit d’être consultés en amont. Mais c’est très rare. Une systématique s’est installée, même s’il y a toujours des efforts à faire.»

Pour ce qui est l’écoute au sommet de la hiérarchie,Marcelle Forster note que le Bureau du CJB a de très bonnes relations avec le Conseil exécutif: «La confiance s’est installée. Nous participons par exemple aux auditions des candidats susceptibles de remplacer le vice-chancelier Michel Walthert. Oui, le CJB comme le CAF sont consultés et intégrés. Il en va pareillement pour l’administration, même s’il arrive qu’un fonctionnaire nous oublie.»

Statu quo+ presque réalisé
La présidente sait toutefois qu’il y aura beaucoup de changement au sein du gouvernement après les élections. A ce propos, elle note qu’il était particulièrement facile de travailler avec un Bernhard Pulver et que les relations étaient aisées avec la Direction de la police pour distribuer les subventions sportives.

Le fameux Statu quo+, dans tout ça? Eh bien, foi de Marcelle Forster, il est en grande partie réalisé: «Le dernier volet, qui consiste en la modification en cours de l’ordonnance sur le statut particulier du Jura bernois et sur la minorité francophone du district bilingue de Bienne, concerne les compétences des deux cénacles pour désigner des représentants dans certains organes cantonaux ou régionaux, ou les nominations à certains postes de l’administration cantonale.»

On en saura plus ce printemps.

Quelle communication?
Et quid de séances publiques? Pour la socialiste, ce serait délicat en raison de la participation politique: «Une partie de nos travaux pourrait être publique, l’autre pas. Dans ce contexte, nous devrions déjà plancher sur la manière de mieux communiquer. Accessoirement, avec une ouverture au public, les séances ne seraient plus les mêmes...»

Corollaire, impossible de se profiler au sein du CJB, sauf si on est président de commission ou si on fait partie du Bureau. Et encore: il ne s’agit-là que de représentation, pas de présence médiatique.

Feu Jean-Jacques Schumacher, on s’en souvient, avait proposé un régime présidentiel de quatre ans, au lieu du tournus annuel entre les grands partis. Pour Marcelle Forster, la fonction est assez chronophage. En ce qui la concerne, elle a presque des séances tous les soirs, sans compter les obligations du week-end: «Et un tournus permet aux quatre grandes formations de prendre leurs responsabilités, de profiler l’image de leur parti.»

Y compris les autonomistes du PSA, dont les candidats se bousculent au portillon pour les élections de fin mars, constate la présidente: «On est donc loin de la coquille vide. Le CJB occupe une place importante, notamment pour les institutions interjurassiennes à Moutier. Il pourrait bien avoir son mot à dire dans le futur concordat réglant le sort de la ville. Les autonomistes ne s’y trompent évidemment pas.»

Prise de conscience
Parmi les réussites de l’institution, elle tient à citer le fameux fOrum culture, le projet Action éducative en milieu ouvert (AEMO), réalisé avec le CAF. Et surtout le fait, moins mesurable, que le Jura bernois a pris confiance en lui: «Il collabore avec le CAF et se méfie moins des Biennois. Un CAF qui ne conteste pas que le siège francophone au gouvernement soit l’apanage du Jura bernois.»

«Au CJB, l’ambiance est bonne. ce qui est aisé quand on a des objectifs communs: défendre et promouvoir la région. Oui, nous avons un rôle à jouer et nous en avons pris conscience!»

 

«Le CJB doit être la voix politique du Jura bernois»:
Elle a présidé l’institution une année avant Marcelle Forster, Maurane Riesen.Membre du PSA, elle sait très bien que moult autonomistes qualifient le CJB de coquille vide tout en continuant d’y siéger. «Dès le moment qu’une institution existe, il est capital que le PSA y soit représenté, tranche-t-elle. Surtout qu’il est toujours important de pouvoir remettre en question certaines choses, tout comme le rôle et les compétences de ce cénacle.» L’intéressée ajoute même que dans les années à venir, une présence autonomiste s’avérera toujours plus nécessaire, eu égard aux nombreux enjeux, notamment interjurassiens, qui pointent le bout de leur nez.

Veiller à l’interjurassien
«En matière de culture et de sport, les autonomistes vont se battre pour défendre la dimension interjurassienne bénéfique au Jura bernois comme au Jura. Ce n’est pas le cas d’autres partis, qui ont plutôt tendance à remettre en question les liens entre les deux régions.»

Forcément, notre interlocutrice entend aussi se préoccuper de la destinée de Moutier: «Il faudra veiller à ce que tout se passe bien, que l’on ne soit pas animé par un sentiment de vengeance ou de frustration. On devra avant tout se préoccuper du bien-être de la population dans son ensemble. Et gagner un peu de neutralité dans ce débat grâce aux autonomistes. Bien évidemment, le CJB devra avoir un rôle politique à jouer dans le déplacement des institutions sises en ville.»

Des séances publiques?
A titre personnel, Maurane Riesen qualifie son année de présidence de très bonne expérience: «J’ai pu beaucoup apprendre. Malgré le vote de Moutier, le climat a été très agréable, très positif, malgré quelques tensions. Bien sûr, il y a eu quelques déceptions, aussi. Des décisions prises parce que j’étais autonomiste. A l’avenir, j’espère que nous pourrons contourner ces barrières.»

A ce titre, elle serait très favorable à ce qu’on ouvre au public les séances du CJB. Un signal, selon elle, qui permettrait de montrer que ce cénacle est un vrai parlement et qu’il fonctionne en toute transparence: «Nous sommes des politiciens élus. Nous avons des comptes à rendre, plaide celle qui brigue un nouveau mandat au sein du CJB. Nous prouverions ainsi que nous sommes capables d’évoluer vers davantage d’autonomie. Bien sûr, je sais qu’on m’oppose des raisons très pragmatiques, comme la confidentialité de certains dossiers. Mais je maintiens qu’on devrait pouvoir trouver des solutions. Peut-être est-ce un peu trop tôt...»

Se responsabiliser
Forcément, Maurane Riesen plaide pour davantage d’autonomie, comme l’AIJle suggérait: «Le CJB pourrait prendre davantage de responsabilité et s’assumer comme tel, ne pas demeurer bloqué sur ses procédures de consultation. Il doit devenir la voix politique du Jura bernois. C’est avant tout une question de volonté. Bien sûr, je sais qu’il y a des règles à respecter. Il n’empêche que nous pourrions parfois faire preuve de plus de volontarisme et de courage dans nos prises de position. Bon, je sais très bien que certains partis ne veulent pas d’un Etat dans l’Etat...»

Bonne princesse, l’ancienne présidente admet que dans bon nombre de décisions, le cénacle se montre unanime: «Après tout, nous avons pour mission de défendre la région. Et nous sommes tous d’accord là-dessus. Il n’empêche que nous pourrions nous montrer plus audacieux. Est-ce qu’à l’avenir, nous oserons nous écarter de la ligne tracée pour prendre nos responsabilités? Allez! je sais que c’est toujours ambigu...»

Pour ce qui est de l’ambiance, enfin, notre interlocutrice la qualifie de bonne et de respectueuse, «qualités importantes qui m’importent beaucoup. Il y a certes eu quelques dérapages, mais très peu. En général, on respecte l’avis de l’autre. Il est vrai qu’on le connaît à l’avance...»

 

C’est quoi, c’est qui, c’est comment, c’est pourquoi?:
Pour mémoire, le CJB est le principal instrument de la loi bernoise sur le statut particulier, dont les objectifs sont de permettre à la population du Jura bernois de préserver son identité, de renforcer sa particularité linguistique et culturelle au sein du canton et de participer activement à la politique cantonale.

Le CJB se compose de 24 membres – 11 pour l’ancien district de Courtelary, 10 pour Moutier et 3 pour La Neuveville, en fonction de la population –, élus tous les 4 ans en même temps que le Grand Conseil. Précision d’importance, on ne peut voter que pour des candidats de son ancien district. On rappellera cependant que le député PEV de Reconvilier Tom Gerber a déposé un postulat demandant qu’on crée à l‘avenir un cercle électoral unique pour le CJB. Le JdJ en a déjà fait état.

Le CJB, enfin, dispose de compétences de décision pour les subventions culturelles, le Fonds de loterie et le Fonds du sport, la coordination scolaire romande et interjurassienne et la nomination de représentants du Jura bernois dans divers organes. Il est aussi doté de compétences de négociation, qui lui permettent de traiter avec les cantons voisins, et de compétences de participation politique.

 

 

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