Tobias Graden, traduction Marcel Gasser
Directeur du Centre de formation professionnelle (CFP) de Bienne, Beat Aeschbacher a de quoi pavoiser: après un âpre combat, il a appris, en fin de semaine passée, du Département de l’instruction publique du canton de Berne (DIP) que l’Ecole professionnelle des métiers de l’industrie de Berne perdrait sa filière des polymécaniciens et des constructeurs. Ce qui signifie pour le CFP biennois l’ouverture de deux classes pour apprentis polymécaniciens.
Désaffection biennoise
Cette victoire n’est pas tombée du ciel. Elle est au contraire le fruit d’un long travail en coulisses qui a commencé l’été passé déjà. L’idée de Beat Aeschbacher était de sortir l’apprentissage de polymécanicien de l’espace Berne-Mittelland pour l’établir à Bienne.
L’homme ne manquait pas d’arguments: plusieurs filières d’apprentissage ont en effet disparu de Bienne ces dernières années. Les formations de maçon, peintre ou encore d’informaticien ont toutes quitté la cité seelandaise. «Si nous n’avions rien entrepris, les polymécaniciens auraient quitté Bienne dans l’indifférence la plus totale», explique Beat Aeschbacher.
La faute n’en incombe pourtant pas au «méchant canton de Berne» dépouillant la «pauvre ville de Bienne» de ses filières. La raison est plus pragmatique: il n’y avait tout simplement plus assez d’apprentis dans la région biennoise pour qu’on ouvre des classes à l’Ecole professionnelle. «L’effectif raisonnable d’une classe est de 18 élèves au minimum, mais à la fin nous n’en avions souvent plus que huit», confirme-t-il.
La DIP a même fait preuve de largesse et a longtemps fermé les yeux sur cette situation. Mais à la longue, ce n’était plus tenable. «J’ai très bien compris ces décisions, je suis moi-même contribuable», poursuit Beat Aeschbacher.
Secteur automobile
Les raisons de ce recul sont multiples: mutation de la structure économique dans la région, évolution liée aux branches elles-mêmes, avancées technologiques impliquant une modification des filières.
Les polymécaniciens méritaient pourtant une bataille. «C’est une profession centrale pour toute l’industrie de la région», déclare Gilbert Hürsch, directeur de la Chambre économique Bienne/Seeland (CEBS). La CEBS, le CFP, l’Association seeland.biel/bienne et les entrepreneurs locaux ont donc constitué un groupe de travail et exercé ensuite un lobbying efficace.
En novembre 2015, le canton donnait son accord de principe à l’idée d’un rapatriement de cette filière à Bienne, mais exigeait en retour le déplacement à Berne de ce qui restait des métiers de l’automobile. «Pas question, ont répondu les Biennois. Les métiers de l’automobile sont trop importants pour toute la région.» Ils ont fini par obtenir gain de cause auprès du conseiller d’Etat Bernhard Pulver, directeur de la DIP. La filière des métiers de l’automobile restera bel et bien implantée à Bienne.
Attirer les jeunes
Et concernant les polymécaniciens, on s’attend à la création de deux classes. «Nous pouvons ainsi nous appuyer sur deux bases solides et prometteuses, dont l’utilité pour Bienne en tant que place industrielle se vérifiera sur le long terme», estiment Beat Aeschbacher et Gilbert Hürsch. En effet, les jeunes polymécaniciens qui viendront à l’avenir se former à Bienne, n’habitent pas dans la région.
C’est même leur premier contact avec le Seeland. Ils susciteront forcément l’intérêt de l’industrie régionale, ce qui accroît les chances qu’ils travaillent et s’établissent un jour par ici.
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