Des comptes meilleurs que prévu, malgré le Covid

Par Philippe Oudot

Pour faire face aux conséquences de la crise du coronavirus, le gouvernement n’a pas lésiné sur les moyens:pas moins de 320mios ont ainsi été débloqués l’an dernier. Autant dire que la pandémie a pesé lourd sur le compte de résultats. En présentant hier les comptes 2020, la directrice des Finances Beatrice Simon l’a dit très clairement: l’impact de la pandémie laissera également des traces profondes dans les finances cantonales ces prochaines années.

C’est Immanuel Gfeller, secrétaire général suppléant dans la Direction des finances, qui a présenté les comptes en détail. Ainsi, les charges se sont élevées à 11,904 milliards de francs, soit 200mios de plus que le montant inscrit au budget 2020. Les revenus, eux, ont atteint 11,945milliards (+22mios), si bien que le compte de résultats affiche un excédent de revenus de 40mios. Un produit certes positif, mais en retrait de 178mios par rapport aux 218mios qui figuraient au budget.

Dans le domaine des investissements, les dépenses ont atteint 511mios, pour 120mios de recettes, soit un investissement net de 391mios. Un montant en légère progression par rapport à 2019, où il n’était que de 374mios, mais loin des 446mios budgetés. Une différence qu’Immanuel Gfeller a expliquée en particulier en raison des retards dans le projet de construction du Campus Bienne (31mios) S’y ajoute la baisse des subventions d’investissements allouées à des institutions dans le domaine du handicap à cause de retards de construction (15mios).

En revanche, la vente de 35% du capital-actions de l’Hôpital du Jura bernois SAa rapporté des recettes de 10mios, qui ne figuraient pas au budget. Le spécialiste des finances a par ailleurs précisé que «le compte des investissements comprend le montant de 17mios consenti par le canton à deux institutions de santé au titre de prêt, afin de leur permettre de surmonter des difficultés de trésorerie liées à la pandémie.

Un trou de 20 millions
Compte tenu des charges au compte de résultats et des dépenses au compte des investissements pour maîtriser les effets de la pandémie, soit 320mios de francs, l’année 2020 clôture sur un déficit de financement de 20mios de francs, alors que le budget 2020 tablait sur excédent positif de quelque 161mios.

En ce qui concerne la dette, le spécialiste de finances a indiqué que l’endettement brut I (engagements courants, dettes à court, moyen et long termes et engagements pour des comptes spéciaux) avait diminué de 71mios. En revanche, l’endettement brut II, soit la somme de l’endettement I et les provisions à court et long terme, a augmenté de 90mios. Résultat:la dette totale a augmenté de 19mios et s’élève désormais, à 8,801 milliards.

Comme l’a relevé Immanuel Gfeller, la quote-part de l’endettement II, c’est-à-dire l’endettement brut en pourcentage du revenu cantonal, a augmenté et atteint 16,3% «Il dépasse ainsi de 4,3points le seuil de 12%à partir duquel s’applique le frein à l’endettement au compte des investissements.» Toutefois, a indiqué Beatrice Simon, au vu de la situation liée au Covid et des prévisions de déficit pour 2021  et les années suivantes, le gouvernement va proposer au Grand Conseil de renoncer à compenser les 20mios d’insuffisance de financement du compte des investissements.

En ce qui concerne les 303mios de charges «Covid», ce montant ne prend pas en compte les pertes de revenus dues à la pandémie et qui sont, pour l’heure, impossibles à chiffrer. Il s’agit, entre autres, du produit des amendes, de l’impôt anticipé, des émoluments liés à la suspension des sommations et poursuites, ou encore des recettes provenant des droits de douane sur les carburants perçus par la Confédération, sans oublier la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations.

Et si les recettes fiscales sont, cette année déjà, inférieures à celles budgetées, les pertes de revenus dues à la pandémie ne se répercuteront intégralement que l’an prochain dans le compte de résultats 2021. Dans ce contexte, et jusqu’au rétablissement de l’économie, «le gouvernement entend privilégier une gestion financière à plus court terme, tout en veillant à ne pas obérer les budgets à venir», a conclu Beatrice Simon.

Principaux écarts

Plusieurs facteurs expliquent la détérioration de 178mios dans le compte de résultats par rapport au budget. Du côté des améliorations, Immanuel Gfeller a cité la hausse des distributions de bénéfices de la Banque nationale suisse (BNS). Au lieu des 81mios budgetés, le canton en a perçu 243, soit trois fois plus. Les charges de biens et de services ont diminué de 87mios, et celles de personnel, de 25mios. Quant aux amortissements, ils ont reculé de 47mios, tout comme les subventions cantonales (10mios). Acela se sont encore ajoutées des rentrées financières de 34mios plus élevées que prévu. Résultat: l’écart positif est de 449mios.

Du côté des dépenses, il y a d’abord les 303mios de charges liées à la pandémie. Ensuite, compte tenu, notamment, de la part aux revenus fédéraux (-96,7mios), les rentrées fiscales ont diminué de 154mios. Quant aux revenus de régales et concessions, il ont baissé de 27mios. En y ajoutant le facteur de correction cantonal (136mios ) et les prélèvements sur les fonds et financement spéciaux (7mios), l’écart négatif est de 627mios, d’où cette détérioration nette de 178mios.

S’agissant des dépenses et provisions de 320mios (303 au compte de résultats, 17 au compte des investissements), ils se répartissent ainsi: 154mios pour la compensation des pertes de revenus des hôpitaux;52mios au titre des aides économiques et contributions pour les cas de rigueur;44mios pour les dépenses de l’Organe de conduite cantonal (par exemple pour l’achat de matériel de protection et l’exploitation de la centrale d’appel), ainsi que 19mios pour couvrir les déficits dans le domaine des transports publics.

Comptes 2020 du canton de Berne

– 11,904 Charges au compte de résultats (en milliards), soit 200mios de moins que budgeté (11,705milliards).
– 11,945 Revenus (en milliards) au compte de résultats, soit 22mios de plus que les 11,923 milliards inscrits au budget.
– 40 Excédent de revenus (en mios), soit 178 de moins que les 218mios budgetés.
– 391 Investissements nets (en mios), soit -56mios que les 446 inscrits au budget.
– 95% Degré d’autofinancement de l’investissement net.
– 20 Solde de financement négatif, (181mios de moins que les +161mios inscrits au budget).
– 303 Charges (en mios) découlant des mesures Covid.
– 243 Part supplémentaire (en mios) venant des bénéfices de la BNS.
– 8801 Endettement total (en milliards, soit +19mios).