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Tavannes

En avant-première au cinéma Royal

Bel hommage du septième art aux «Nettoyeurs de Guerre» de la Fondation Digger

Frédéric Guerne devant l’affiche du documentaire d’Orane Burri, «Nettoyeurs de Guerre». À voir en avant-première au Royal de Tavannes. Blaise Droz

Blaise Droz

À Tavannes et dans la région, tout le monde connaît de près ou de loin la Fondation Digger. Mais plus rares sont ceux qui ont une idée claire de la manière dont ce groupe de volontaires met tout son enthousiasme à fournir, malgré l’adversité, un moyen efficace et rapide de déminage humanitaire là où c’est le plus nécessaire.

Un film documentaire de la réalisatrice Orane Burri, «Nettoyeurs de Guerre»,  sera présenté dimanche 29 novembre à 14h et lundi 30 novembre à 20h au cinéma Royal. Une chance rare offerte en avant-première aux habitants de la région de se faire une idée plus précise, avant même que ce documentaire construit avec une grande sensibilité soit programmé par la Télévision romande RTS, qui en a soutenu la production par JMH de Neuchâtel.

Pas une inconnue

Dans le domaine du film documentaire, la Neuchâteloise Orane Burri n’est pas une inconnue. Déjà auteure de «Tabou», un film sur le suicide des jeunes, d’«Arme fatale», qui traite de l’arme militaire à la maison, et de «Penaber», un essai poétique sur le rêve d’un Kurde en exil, elle ne craint pas d’aborder des sujets sensibles, rarement exposés à la lumière des projecteurs.

Le dernier choix d’Orane Burri ne doit rien au hasard. Cela fait dix ans déjà qu’elle avait manifesté pour la première fois son intérêt pour le travail de Digger. Réalisatrice engagée, elle retrace le parcours de la Fondation depuis sa création par Frédéric Guerne en 1998 jusqu’à nos jours.

Il en a coulé de l’eau sous les ponts de la Birse depuis les premiers essais du Digger D1 au tournant du millénaire, jusqu’à l’utilisation concrète des 11 machines déjà livrées dans des pays qui ont un urgent besoin de débarrasser de vastes territoires des mines antipersonnel ou antichar qui les polluent.

Durant trois ans

Digger a connu des hauts parfois et des bas souvent. Le film d’Orane Burri a su saisir durant trois ans, de fin 2011 à 2014, les réalités du terrain ainsi que les découragements, les espoirs, les déboires et les réussites de cette fondation sans autre but que de venir en aide à des populations démunies et en souffrance.

Organisme sans but lucratif, la Fondation Digger survit en versant à ses travailleurs de bien maigres salaires alors que des entreprises concurrentes affichent clairement leur volonté de faire de l’argent.

Durant la période du tournage, Digger a engagé un vendeur. Un gars expérimenté qui lors de son premier entretien avec le directeur disait son enthousiasme et sa volonté de faire bouger les choses. Quelque mois plus tard, on le revoit lors de son apéro d’adieu. Dépité, il s’est heurté à des murailles infranchissables.

«Cet échec d’un gars qui a donné le meilleur de lui-même m’a fait comprendre que nous ne devons plus nous focaliser sur la vente de machines mais de projets globaux», explique Frédéric Guerne face à la caméra d’Orane Burri. Il a du coup compris que les concurrents de Digger connaissent aussi difficultés, faillites et relations tendues avec leur actionnariat.

«Au final, même si nous avons souvent été raillés pour ça, nous savons que notre statut de fondation a été le garant de notre survie», indique-t-il. Dans le film, on découvre le jour où un trio de Digger se rend plein d’espoir à l’ambassade d’un grand pays d’Afrique pour proposer ses services. La séquence suivante montre le trio dépité d’avoir été éconduit. L’argent pourtant disponible passera dans d’autres projets et surtout d’autres poches...

Mozambique libéré!

Quant aux satisfactions, s’il fallait n’en citer qu’une, elle date de trois mois à peine, alors que le film était déjà en boîte. Le Mozambique a été déclaré franc de mines suite au travail acharné des ONG. Et c’est précisément une machine Digger qui a fourni un travail énorme dans ce pays.

«Je pense que notre engin a assaini entre 10 à 30% du territoire pollué. C’est pour nous une satisfaction sans pareil, mais nous aurons toujours autant de difficultés à démontrer que le déminage mécanisé que nous proposons permet de travailler dix fois plus vite pour un prix inférieur de 50%. Il y a malheureusement beaucoup d’intérêts en jeu...»

Sourire en coin, Frédéric Guerne n’en dira pas plus, mais ceux qui verront le film d’Orane Burri apprendront à faire la part des choses.

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