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Entre fermes et technologie, le courant ne passe pas toujours

L’instauration de l’enseignement à distance a donné du fil à retordre aux apprentis agriculteurs à la FRI, surtout ceux qui se retrouvent en bout de ligne.

Dans les fermes reculées, l’instabilité du réseau pose problème pour la formation à distance. Photo: Pixabay

Par Marisol Hofmann

 

L’enseignement à distance imposé le printemps dernier, lors de la première vague de Covid-19, a engendré de nombreux défis pour la formation des agriculteurs. «Nous sommes partis de pratiquement rien et avons dû mettre en place, en peu de temps, une structure et une organisation cohérentes pour dispenser l’enseignement à distance», raconte le responsable de la formation à la Fondation rurale interjurassienne (FRI), Pierre-André Odiet, qui s’est occupé de la coordination du passage à l’enseignement en ligne avec la plateforme Teams.
Pour que les élèves soient en mesure de suivre l’enseignement en ligne, il est nécessaire qu’ils soient munis d’un ordinateur récent équipé d’un micro et d’une caméra ainsi que d’une bonne connexion internet. Or ce dernier point peut parfois poser problème dans les fermes reculées qui n’ont pas d’accès à Internet ou alors à un très faible débit.
Dylan Jufer en a fait l’expérience. Durant le confinement, il était apprenti de 1e année sur l’exploitation de Martin Kohli, sur les hauteurs de Perrefitte, à quelque 3 km du village. «Lors du premier cours en visioconférence, j’ai réussi à accéder à la plateforme puis tout a planté au bout de deux heures. Je ne pouvais plus me reconnecter», raconte-t-il. «Nous nous trouvons en bout de ligne», confirme Martin Kohli qui rencontre lui-même des difficultés lorsqu’il doit par exemple remplir son recensement GELAN via la plateforme Agate.
Les enfants de l’agriculteur suivaient, à ce moment, également leur scolarité obligatoire depuis la maison, ce qui ne faisait que ralentir davantage le débit internet. «Nous avons dû instaurer un tournus», explique Dylan Jufer.


Réseau instable
Il n’était pas non plus possible pour le jeune homme de travailler depuis la maison. «J’habite à la Bergerie d’Eschert, où le réseau est encore plus faible que chez mon maître d’apprentissage. J’ai essayé de faire un partage de connexion avec mon téléphone mais je rencontrais le même problème», ajoute-t-il.
Autre défi: tous les apprentis ne sont pas à l’aise avec les outils informatiques. «Les enseignants ont dû eux-mêmes s’approprier ces nouvelles applications avant d’aider individuellement et à distance les élèves à régler leurs problèmes», relate Pierre-André Odiet.
Dylan Jufer a lui-même rencontré des difficultés. «Comme je ne m’y connais pas trop en informatique, j’ai dû me rendre dans un magasin spécialisé afin qu’on m’aide à configurer mon ordinateur pour que je puisse utiliser Teams. Au début, je me sentais un peu largué. Puis les enseignants m’ont donné des explications par téléphone concernant l’utilisation du programme.»   
Si tout a dû être mis en place dans l’urgence lors de la première vague, apprentis et enseignants étaient mieux préparés durant la deuxième. «En novembre dernier, nous avons à nouveau dû fermer nos classes durant deux semaines, mais cette fois-ci nous avons anticipé», se félicite le responsable de la formation. «Nous avons emmené les jeunes en salle informatique afin de les préparer à l’utilisation de la plateforme.»


Repenser la formation
Cela fait plusieurs années que la FRI planche sur l’intégration de l’usage des nouvelles technologies dans la formation des agriculteurs. «L’informatique n’est pas forcément leur tasse de thé. Cela dit, la digitalisation dans l’agriculture est une réalité et des compétences doivent être acquises dans ce domaine», insiste Pierre-André Odiet.
En plus des principes de bases, la maîtrise de certains outils informatiques propres au métier, comme les programmes de comptabilité, la plateforme Agate pour le recensement GELAN ou encore le plan d’affouragement PAFF pour Excel, est à l’en croire essentielle. «Le Covid-19 aura au moins eu l’avantage d’accélérer le processus», sourit Pierre-André Odiet.

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