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Etre à l’aide sociale et se loger?

Pour les bénéficiaires de l’aide sociale, louer un appartement s’apparente au parcours du combattant. Coup de gueule de Dominique Vogelbacher, membre du comité de l’association Construire Demain.

En charge de quatre enfants mineurs, Anita et Dominique Vogelbacher refusent de baisser les bras. Photo:Salomé Di Nuccio

par Salomé Di Nuccio

«Par rapport àtout ce qui se passe maintenant, dont cette histoire d’appartement saccagé à Moutier, on commence à en avoir un peu marre de cette image du bénéficiaire de l’aide sociale qui serait un cas social, capable de rien et juste bon à se faire entretenir. Nous ne sommes ni des cas extrêmes, ni des pestiférés. Nous avons chacun des compétences à notre manière, et il faut arrêter de nous caser dans une catégorie à part!» Ce coup de gueule est celui de Dominique Vogelbacher, membre du comité de l’association Construire demain (ACD), récemment constituée pour défendre les intérêts des bénéficiaires de l’aide sociale.
Dans l’attente d’une décision de l’AI, lui-même se trouve confronté à ces a priori en tant que chef de famille. A la recherche d’un nouvel appartement depuis décembre dernier, lui et son épouse Anita essuient les refus cinglants des gérances et propriétaires. Fondée pour pallier tout manquement affectant les personnes émargeant à l’aide sociale, l’ACD tire en ce moment la sonnette d’alarme en matière de location.

Impossible de se loger
Les exigences vont crescendo dans ce domaine, et encore davantage depuis qu’un logement de Moutier a été transformé en décharge par un bénéficiaire. Il a suffi d’une vidéo postée sur Facebook, objet de près de 2000 commentaires et partagée plus de 5500 fois! «Depuis, plusieurs autres publications du genre reviennent en avant», s’exaspère Dominique Vogelbacher. L’actualité surfe et les préjugés s’y accrochent. «Vous êtes aux sociaux? Mais on n’a pas d’appartement pour des gens comme vous...»
Locataires d’un bailleur «souhaitant reprendre possession de son bien», les Vogelbacher sont tenus de trouver un nouveau toit dans les meilleurs délais. «D’ici à cet été, il faudrait vraiment qu’on puisse avoir trouvé quelque chose.»
En charge de quatre enfants mineurs, le couple est confronté en sus au marché de l’immobilier. «Au vu de l’âge de nos enfants, on doit compter au minimum avec un cinq-pièces.» De telles surfaces n’abondent guère dans le Haut-Vallon, et pour correspondre au budget qu’accorde le SASC (Service d’action sociale du district de Courtelary), leur coût total ne doit pas excéder les 1600 francs, charges comprises. A l’intention d’un propriétaire d’immeuble, à Sonvilier, Anita Vogelbacher vient pourtant de rédiger un courrier explicite.

Appart refusé
Tout en exposant son statut de chômeuse et la situation familiale, elle signale l’engagement social qui l’anime elle et son époux. «Je fais moi-même partie des commissions d’écoles primaire et secondaire de Sonvilier et Saint-Imier.» Concernant le versement des loyers, un document annexé atteste qu’il sera d’ores et déjà garanti par leur assistante sociale. «Il serait directement versé par le SASC sans passer par nous». Un argument de choc, a priori, mais qui n’a pas même pesé dans la balance. «On nous a clairement dit que notre position n’était pas rassurante.»
Au bout de trois mois de recherches assidues, la famille Vogelbacher poursuit toutefois ses visites sans perdre espoir. Avec l’avantage du moins de pouvoir déménager d’emblée.

 

Traiter les dossiers «cas par cas»
Structure interjurassienne, l’association Construire demain (ACD) s’est formée autour d’un comité de huit personnes. Elle rassemble actuellement une cinquantaine de membres, bénéficiaires ou non de l’aide sociale. Concernant la défense des prestataires, l’ACD milite pour que chaque dossier soit traité «cas par cas» et non plus «de manière généralisée». A ce sujet, le comité insiste sur les profils très différents des personnes concernées. Entre working poor (travailleurs pauvres), demandeurs d’AI, chômeurs en fin de droits ou petits indépendants précarisés, la palette est large, et les assistés qui le veulent bien ne représenteraient qu’un pourcentage faiblot. «La plupart ne sont pas comme ça, assure Anita Vogelbacher. Ce sont des gens qui n’ont pas choisi d’être à l’aide sociale.»  SDN

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