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Bienne

«Exeat», pour optimiser la mort

Dévoilée ce week-end, la nouvelle pièce de théâtre des étudiants évoque les coûts de la santé.

Les gymnasiens en pleine répétition (Photo DNI)

Didier Nieto

Sur la scène, un jeune homme fait des pompes et des abdos. Pressé par son assureur, il crie: «J’agis pour prévenir mon capital santé.» Ou encore: «Bouger permet de rester en forme, ce qui est la meilleure des préventions.» Puis soudain, il s’effondre. L’assureur affiche une mine triomphante: «Enfin! Ça nous aurait coûté cher de l’hospitaliser.» La nouvelle création théâtrale du Gymnase français est «virulente», prévient Pierre Alain Jeannet, l’un des deux metteurs en scène. «Exeat (modeste proposition pour optimiser la mort)» – qui sera jouée pour la première fois samedi soir– aborde la délicate thématique des coûts de la santé.

Le sujet a été inspiré par le titre d’un article de journal paru il y a environ une année: «Trop peu de gens meurent à la maison». «J’ai d’abord cru qu’il était question du taux de mortalité trop élevé dans les hôpitaux. Mais en réalité, l’article parlait des frais médicaux engendrés par les personnes qui finissaient leurs jours à l’hôpital ou dans un home.»

Pour permettre aux assureurs et autres décideurs «de diminuer les coûts de la médecine, d’éliminer les mauvais risques et d’améliorer ce taux ridiculement bas et scandaleusement onéreux de mort au logis», Pierre Alain Jeannet et sa collègue Milène Grossenbacher ont imaginé différentes solutions, directement inscrites  «dans la veine satirique de Jonathan Swift». Dans son pamphlet «Modeste proposition pour empêcher les enfants des pauvres en Irlande d’être à la charge de leurs parents», publié en 1729, l’écrivain irlandais suggérait de... manger les bébés pour lutter contre la misère et la surpopulation.

Humoir noir, mais fond sérieux
Animée de la même «intention grinçante» et imprégnée du même humour noire, «Exeat» s’articule autour de trois situations distinctes qui font office de fils conducteurs à la pièce. La première est le dialogue entre un homme et son assureur. Ce dernier cherche à obtenir les plus d’informations possibles sur son client: fréquence des activités sportives, nombre de cigarettes fumées, type d’alimentation... La deuxième situation met en scène un autre assureur qui cherche à convaincre deux personnes âgées de mourir chez elles plutôt que dans un EMS. Enfin, le dernier tableau est un colloque dans un hôpital, auquel assistent les médecins, la direction, les techniciens ainsi que les responsables du marketing. «La pièce fonctionne au deuxième degré. Mais le fond est sérieux. Il n’y a pas une semaine qui passe sans que les médias ne parlent de l’augmentation des coûts de la santé, de l’émergence d’une médecine à deux vitesses, des progrès technologiques qui réduisent notre humanité à son strict minimum économiquement viable», poursuit Pierre Alain Jeannet.

Une cinquantaine d’élèves participent à l’aventure depuis le début de l’année. Les 14 acteurs qui montent sur scène ont volontairement pris part à un cours de comédie. Les autres – comme les musiciens, les décorateurs ou les responsables de l’éclairage – sont impliqués dans le cadre de leur programme scolaire.

«Exeat, (modeste proposition pour optimiser la mort)». A voir le samedi 11, le vendredi 17 et le samedi 18novembre à 20h à l’aula du Gymnase français (rue du Débarcadère 8).

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