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Bienne

La filière bilingue sous la loupe

Un professeur de l’Université de Genève a été mandaté pour étudier les pratiques des filières bilingues à Bienne et à Berne. Sans dévoiler de résultat, il évoque ses réflexions.

Photo Mattia Coda

Maeva Pleines

La filière bilingue: un modèle d’exportation biennois? Telle était intitulée la table ronde, qui s’est tenue mercredi soir, au Nouveau musée de Bienne. Elle réunissait Cédric Némitz, directeur biennois de la Formation, de la culture et du sport, la directrice bernoise de l’éducation Franziska Teuscher ainsi que le directeur de la HESB Architecture. Mais avant les discussions, Daniel Elmiger, professeur à l’Université de Genève, était invité à parler de l’étude qu’il est en train de réaliser et qui concerne justement les filières bilingues.
Pour rappel, la FiBi a été inaugurée il y a 10 ans dans la cité seelandaise. La ville de Berne suit l’exemple biennois depuis maintenant une année.

Les conclusions de l’étude de Daniel Elmiger ne seront dévoilées en détail que le 1er mai prochain, à Berne. Avant cette présentation finale, le spécialiste a accepté d’évoquer quelques considérations sur ces filières bilingues.

Daniel Elmiger, comment en êtes-vous venu à vous pencher sur la filière bilingue?
L’étude a été mandatée par le Forum du bilinguisme et l’association BERNbilingue. L’idée est d’offrir un état des lieux de ce qui se pratique dans les différents niveaux scolaires, chose qui n’a encore jamais été répertorié précisément. Je peux déjà vous dire que les approches du bilinguisme sont loin d’être uniformes. Notre analyse pourra donc servir de base de discussion pour éventuellement définir un modèle plus unifié.

On constate que, dans toute la Suisse, la curiosité grandit pour l’enseignement bilingue. Pourquoi avoir choisi Bienne comme terrain d’étude ?
Il y a effectivement un souhait général pour améliorer l’apprentissage des langues. On constate une grande souffrance chez de nombreuses personnes ayant étudié l’allemand ou le français pendant des années sans savoir – ou oser – l’utiliser. Dans ce contexte, Bienne représente un terreau fertile car le bilinguisme y est plutôt bien vécu. En plus, il y a une volonté politique d’aller de l’avant.

L’évolution vers le bilinguisme doit-elle être portée par la politique, selon vous?
Pas uniquement, mais en partie, car pour mettre en place des systèmes efficaces, il faut y mettre les moyens. On peut encore faire mieux, notamment pour perfectionner la formation des enseignants ou pour coordonner des échanges entre des écoles de différentes régions linguistiques. Ces efforts doivent être fournis par la politique fédérale, cantonale et communale. Le système suisse fonctionne ainsi, même si cela a tendance à compliquer et ralentir les choses.

Est-ce qu’on peut imaginer un pays complètement bilingue, dans un horizon plus ou moins lointain?
Je ne pense pas que la Suisse deviendra totalement bilingue. Mais il faut commencer pour augmenter l’offre scolaire au niveau local. Les filières sont déjà très répandues dans le secondaire II. Ça reste plus compliqué à mettre en place à l’école obligatoire, car il y a davantage de standards à respecter.
Il faudra ensuite compter des dizaines années pour que les choses changent véritablement. En parallèle, je pense que la représentation du bilinguisme devrait évoluer.

C’est-à-dire?
On a tendance à avoir des attentes perfectionnistes, alors que savoir communiquer dans une autre langue sans forcément tout maîtriser parfaitement, c’est déjà une forme de bilinguisme. Heureusement, on constate que la vision du bilinguisme a déjà bien avancé. A l’époque, on avait par exemple peur que la pratique de deux langues appauvrisse la connaissance de  l’une ou l’autre. Des études ont démontré que, globalement, ces inquiétudes ne sont pas fondées.

Aujourd’hui, les craintes sont  différentes. Certains s’inquiètent notamment que les classes bilingues créent une forme d’élitisme si elles sont uniquement réservées aux bons élèves. Que pensez-vous de cela?
Notre étude ne répondra toutefois pas à ces questions de manière prescriptive. Son but est de servir de fondement pour savoir où nous nous dirigeons.

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