Vous êtes ici

Abo

patrimoine industriel

La mémoire de Tavannes Machines sauvée

Les archives de la mythique entreprise TMCo sont désormais entre les mains de deux institutions spécialisées, le MTAH à Moutier et le CEJARE à Saint-Imier.

Le responsable du CEJARE Philippe Hebeisen et le conservateur du MTAH Stéphane Froidevaux ont désormais entre leurs mains de nombreux documents d’archives de TMCo, entreprise dans laquelle le Tavannois Rémy Prêtre a travaillé durant 50 ans. (M. Bassin)

Michael Bassin

Des plans, des modes d’emploi, des photos, de la correspondance et même le fameux tour multibroches Gyromatic! Un impressionnant volume d’archives et de documents industriels provenant de la défunte Tavannes Machines Co SA est désormais entre les mains de deux institutions parfaitement à même de le conserver et de le mettre en valeur: le Musée du tour automatique et d’histoire de Moutier (MTAH) et le Centre jurassien d’archives et de recherches économiques à Saint-Imier (CEJARE).

Ainsi, l’histoire et le savoir-faire de la célèbre usine qui a fermé ses portes en 1986 ne disparaîtront pas dans l’oubli. De quoi ajouter une pierre à l’histoire du patrimoine industriel régional déjà existant. «Nous devons conserver la mémoire de ce que nous avons été capables de construire au cours de plusieurs générations afin que la vocation mécanique et l’esprit de la recherche soient transmis aux générations futures, dans le but de perpétuer une industrie à qui la région doit un si bénéfique développement», résume parfaitement Francis Koller, président du conseil de fondation du MTAH.

Chez Wisard Frères

Si ces trésors de Tavannes Machines ont été préservés de la destruction jusqu’à aujourd’hui, c’est grâce à l’entreprise Wisard Frères SA à Grandval qui, lorsque TMCo a fait faillite, a acquis le stock de pièces en cours, le service après-vente des machines ainsi que le solde des presses et des tours Gyromatic se trouvant au montage. «L’épouse d’un des frères Wisard a contacté le Musée du tour pour connaître son intérêt à conserver tout ça. Nous nous sommes rendus sur place. En voyant la richesse, la variété et le volume de la documentation, nous avons contacté le CEJARE pour mettre sur pied une collaboration fructueuse», souligne Stéphane Froidevaux, conservateur au MTAH.

Des surprises, de belles surprises, attendaient les responsables des deux institutions qui ont retrouvé des documents disséminées en divers endroits de Grandval, dont dans des granges. Tandis que le CEJARE prendra en charge tous les documents commerciaux, le musée conservera tout ce qui est plus visuel dans le but de pouvoir le montrer au public. Le tout sera coordonné en bonne intelligence afin de permettre, un jour, à un étudiant ou un passionné d’effectuer des recherches sur la base de cette matière première.

Car le travail des deux institutions consiste avant tout à récolter les archives, les trier et les ranger de manière appropriée pour une conservation optimale sur le long terme. Puis de les mettre à disposition des chercheurs, voire de les exposer en ce qui concerne le musée. Mais il n’est pas prévu, pour le moment du moins, que les institutions compilent et écrivent l’histoire de Tavannes Machines. «Aucune réelle étude n’a été faite sur l’usine jusqu’à maintenant», glisse à ce propos Stéphane Froidevaux.

Le fameux Gyromatic

Les débuts de Tavannes Machines sont intimement liés à l’usine de montres Tavannes Watch. Dès 1901, lors de la construction de l’usine principale qui abrite les activités de Tavannes Watch Co SA, un important département mécanique y est intégré. Comme l’explique Philippe Hebeisen, actuel responsable du CEJARE, une trentaine de mécaniciens construisent les machines, les outils et les dispositifs techniques nécessaires à la fabrication en série des composants horlogers de la TWCo.

Les machines-outils développées pour assurer à l’interne la fabrication d’éléments de montres sont ensuite réalisées en série et vendues hors entreprise par l’unité Tavannes Machines Co. Des machines, des pompes et des presses sortiront des ateliers. Mais Tavannes Machines est souvent associée au tour révolutionnaire lancé en 1931: le fameux Gyromatic, un tour six broches dont l’alimentation des barres se faisait à la verticale et non pas à l’horizontale. De nombreuses Gyromatic ont d’ailleurs été produites en période de guerre. Un des ces machines en état de fonctionner sera à l’avenir exposée au MTAH.

En 1938, la TMCo, qui était la division machines-outils de la sa société-mère TWCo SA, est transformée en société anonyme indépendante Tavannes Machines Co SA. Elle compte près de 300 employés.

L’histoire de la TMCo SA prend fin en septembre 1986 lorsque, à court de liquidités et en situation financière précaire, elle dépose son bilan. Si elle avait apparemment développé une nouveauté révolutionnaire, les banques rechignaient à consentir les crédits-relais nécessaires à l’achat de fournitures et de matières premières nécessaires au lancement de la fabrication des séries initiales.

La chute de TMCo prend tout le monde par surprise et la faillite met 74 employés au chômage. Une fois fermée, l’usine est revendue par lots à divers acteurs. Dont à Wisard Frères à Grandval.

Articles correspondant: Région »