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Loi sur l'aide sociale

La priorité, c’est l’intégration

Le comité «Parce que le travail en vaut la peine» a lancé hier sa campagne de soutien au projet du Grand Conseil en vue de la votation du 19 mai.

Les représentants du comité bourgeois (de g. à dr.): Jakob Schwarz, Martin Schlup, Anita Luginbühl, Hans-Peter Kohler et, tout à droite, Stefan Nobs, secrétaire du PLR. Ph. Oudot

Par Philippe Oudot

«Personne, parmi nous, ne remet en cause le principe de l’aide sociale, mais elle doit rester une solution transitoire en cas de détresse, et pas devenir une rente qui permet à certains bénéficiaires d’être mieux lotis que des gens qui travaillent pour un petit salaire.» C’est le point de vue défendu hier à Berne par les quatre députés bourgeois Anita Luginbühl (PBD), Martin Schlup (UDC), Hans-Peter Kohler (PLR) et Jakob Schwarz (UDF) lors d’une conférence de presse.

Pour inciter les bénéficiaires de l’aide sociale à se réinsérer dans le monde du travail, le projet du Grand Conseil propose de réduire de 8% le montant des normes CSIAS dévolu pour le forfait d’entretien, qui sert à couvrir les besoins de base. Dans le même temps, il veut augmenter les incitations financières, comme les suppléments d’intégration ou les franchises sur le revenu, pour les bénéficiaires de l’aide sociale.

Baisse linéaire
Comme l’a souligné Hans-Peter Kohler, la baisse linéaire de 8% ne porte que sur les besoins de base, et ne concerne pas les frais médicaux, les frais de logement ou encore les prestations circonstancielles versées pour des besoins particuliers (frais de garde des enfants, lunettes, personnes avec handicap, etc.) Pour les jeunes adultes jusqu’à 25 ans, le projet entend aussi réduire ce montant jusqu’à 15%, afin d’éviter des incitations contre-productives qui poussent ces jeunes à vivre durablement de l’aide sociale.

La baisse pourrait même atteindre 30% s’ils ne montrent aucune volonté d’intégration. Une sanction qui peut aussi frapper les réfugiés et personnes admises à titre provisoire qui, après cinq à sept ans de présence en Suisse, ne maîtrisent pas en six mois les rudiments de la langue française ou allemande. «C’est une condition sine qua non de l’intégration», a souligné Hans-Peter Kohler. Seront exclus de ces éventuelles réductions les familles monoparentales avec des enfants en bas âge, les enfants et ados de moins de 18ans, les seniors de plus de 60ans, ainsi que les personnes souffrant d’une grave atteinte à leur santé.

Meilleures incitations
Si, d’un côté, le canton réduit le montant du forfait d’entretien, il se montre plus généreux en ce qui concerne le supplément d’intégration et les franchises sur le revenu. La première mesure permet de récompenser les bénéficiaires qui font des efforts manifestes en vue de leur intégration sociale et professionnelle, alors que la seconde est une incitation à prendre un emploi ou à augmenter son taux d’occupation. «Avec ces mesures, l’objectif est de montrer que le travail en vaut la peine», a insisté Hans-Peter Kohler.

En ce qui concerne les normes CSIAS, il ne s’agit que de recommandations et elles n’ont pas un caractère contraignant pour les cantons, a rappelé Martin Schlup. Soulignant que le coût de la vie variait d’un canton à l’autre, il a estimé que ceux-ci devaient avoir une marge de manœuvre pour fixer le montant dévolu au forfait pour l’entretien. D’ailleurs, a-t-il précisé, le canton de Berne n’est pas le seul à avoir remis en cause les normes CSIAS, «Genève, le Valais, Bâle-Campagne et le Jura l’ont également fait».

Deux poids, deux mesures
S’agissant des propositions du projet populaire, il a vertement critiqué celle en faveur des personnes ayant perdu leur emploi après 55 ans. Pour les montants de l’aide sociale, il propose d’utiliser le même mode de calcul que pour les prestations complémentaires (PC) de l’AVSet de l’AI, celles-ci étant plus généreuses. Une mesure qui créerait une discrimination vis-à-vis des plus jeunes et des indépendants, car il faudrait avoir cotisé pendant au moins 20 ans à l’assurance chômage pour y avoir droit. En outre, elle constituerait une rente empêchant l’intégration. «Cette mesure pourrait même s’avérer contre-productive et pousser certains employeurs à se séparer de leurs collaborateurs âgés, sachant qu’ils toucheraient un soutien plus substantiel», a-t-il averti.

Qui plus est, ce changement alourdirait fortement la facture pour le canton, car contrairement aux PC de l’AVS et de l’AI, cofinancées par la Confédération, elles seraient entièrement à sa charge, ainsi qu’à celle des communes.

Pour sa part, Jakob Schwarz a insisté sur l’encouragement au travail et la nécessité de rendre l’aide sociale moins attirante que l’intégration sociale par le travail:«Il n’est pas normal qu’à la fin du mois, un bénéficiaire soit mieux loti que quelqu’un qui travaille, paie son loyer, ses impôts, etc. Et cette aide doit être temporaire, pour éviter que la personne qui, sans faute de sa part, en a besoin ne sombre dans la misère.»

Jakob Schwarz a aussi mis en garde contre les répercussions financières en cas d’acceptation du projet populaire. Alors que le projet du Grand Conseil permet d’économiser entre 8 et 19mios, il entraînerait des dépenses supplémentaires de l’ordre de 17 à 28mios de francs. Et il ne s’agit là que d’une estimation, car avec l’évolution démographique, la facture pourrait être plus lourde, a-t-il averti. D’autant que selon les prévisions de la Direction de la santé et de la prévoyance sociale, les coûts de l’aide sociale vont continuer d’augmenter ces prochaines années.

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