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Bienne

"La priorité, délocaliser le CHB"

Erich Fehr revient sur l’année écoulée et évoque les perspectives pour Bienne en 2018.

Erich fehr, à l'heure de tirer le bilan de l'année écoulée. (Phot Peter Samuel Jaggi)

Propos recueillis par Marjorie Spart

Avant de glisser dans la nouvelle année, le maire Erich Fehr revient sur les dossiers qui ont marqué l’année 2017. Et évoque les défis futurs pour la ville de Bienne.

Erich Fehr, êtes-vous soulagé d’arriver à la fin de l’année?
C’est vrai qu’en fin d’année, je reçois de nombreuses sollicitations. Beaucoup pensent qu’il faut vite régler certaines questions avant le 31 décembre, alors que cela pourrait attendre.

Quel bilan tirez-vous de l’année qui s’achève?
Dans l’ensemble, nous avons obtenu de belles réussites. Je pense ici à l’ouverture de l’Ile-de-la-Suze et aux prix que ce parc a reçus, à l’ouverture de la branche Est de l’autoroute, à l’amélioration de l’offre des transports publics ou encore à l’acceptation par le Grand Conseil d’un crédit de plus de 200millions de francs pour le Campus de la Haute école spécialisée bernoise.

Quel dossier vous a procuré le plus de satisfaction?
Sans hésiter la décision favorable pour le Campus. Son implantation à Bienne va renforcer notre place économique et le pôle de développement. Par contre, si je me place du côté de l’émotion, c’est l’Ile-de-la-Suze qui m’apporte une très grande satisfaction. Il s’agit d’un très bon compromis entre les zones bâties, l’espace de verdure, les besoins économiques et l’utilisation mixte des lieux. Ce projet pourrait être source d’inspiration, notamment pour Agglolac.

Agglolac est, justement, un des points négatifs de 2017, avec une opposition croissante face à ce projet de réaménagement urbain.

C’est vrai que les opposants se sont fait entendre cette année, ce qui est normal pour un projet d’une telle envergure. Nous étudions d’autres pistes. Par contre, je trouve stérile dans le débat, d’opposer les différentes affectations les unes aux autres, en disant que celle-ci ou celle-là est meilleure. Il faut voir le projet dans son ensemble avec de multiples affectations possibles.

Etes-vous confiant dans l’aboutissement d’Agglolac sous sa forme actuelle?
Je suis persuadé que nous trouverons une majorité favorable au projet après avoir apporté une réponse à la question de la propriété du terrain. La plus-value au niveau des espaces publics ne pourra être réalisé qu’avec Agglolac dans sa forme actuelle mais avec certaines adaptations. Ce projet fait sens selon les principes modernes d’aménagement du territoire et de densification urbaine. De plus, l’endroit est bien desservi.

Quelle a été votre plus grande déception en 2017?
Il n’y a pas d’échec ou de déception dont je me souvienne particulièrement. En politique, certaines choses ne vont pas comme prévu, ça fait partie du jeu. Mais j’oublie vite. Et lorsqu’on commence à prendre les défaites politiques personnellement, c’est le moment de changer de métier.

Les points noirs n’ont pourtant pas manqué: la décision de délocaliser les marchés ou encore l’affichage uniquement en allemand sur la branche Est.
Dans toutes les polémiques, il convient de prendre en compte les différents intérêts. Je pense que dans le cadre du marché, un couac de communication est à l’origine de la situation. Mais une solution est en passe d’être trouvée, selon la Direction de l’Action sociale et sécurité.
Concernant l’affichage sur l’autoroute, je trouve que le canton et la Confédération font très clairement preuve de mauvaise volonté. A Bienne, les affichages doivent être bilingues. Du côté de la Ville, on ne peut que revendiquer une amélioration de la situation. Par exemple, en plaidant pour un double affichage: un panneau en allemand à 1000m de la sortie et son pendant en français à 950m. Lorsque la question de la désignation de la gare CFF des Champs-de-Boujean s’était posée, j’avais insisté auprès de l’ex-Régie fédérale pour que le nom soit bien affiché dans les deux langues. Et j’avais eu gain de cause.

Pourquoi cela n’a-t-il pas marché dans le cas de l’autoroute?
Peut-être devons-nous apprendre à lutter davantage pour notre bilinguisme...

Les Biennois ont manifesté passablement de grogne envers les autorités. N’est-ce pas le moment de se remettre en question?
La grogne est un signe de plus grand engagement de la part de la population. C’est plutôt positif, non? Les gens s’engagent davantage lorsqu’ils ont envie de changer les choses, dans les domaines qui leur tiennent à cœur.
Quand on fait de la politique, on ne peut pas se borner à faire des choix qui ne susciteront pas la controverse. L’avantage de notre démocratie directe est que le peuple peut contrer les décisions par référendum.

L’affaire Abu Ramadan a aussi terni l’image de Bienne, non?
Cette affaire nous a apporté deux semaines médiatiquement très chargées! Il convenait de garder son sang-froid.  J’estime avoir rempli ma tâche de maire correctement: j’ai reconnu qu’il y avait des problèmes et j’ai amené des propositions réalistes. D’ailleurs, Christian Levrat plaide aussi pour une reconnaissance de l’islam en Suisse et l’introduction d’un article constitutionnel sur la religion.
Je rappelle que si les agissements inadmissibles de cette mosquée ont fait parler de Bienne, ils ne sont pas représentatifs de la situation en ville. Dans la plupart des mosquées, tout se passe bien et de bonnes initiatives citoyennes sont mises sur pied grâce, notamment, à des musulmans engagés.

Dans le cadre de l’élaboration d’une stratégie pour 2030, la Ville a fait appel à la population pour sonder ses attentes. Pourtant, moins de 100 personnes ont répondu à l’appel. Un échec?
Il est vrai que ce taux de participation n’est pas suffisant. De plus, les personnes qui étaient présentes sont plutôt engagées dans les milieux de gauche... Ce n’est pas représentatif de la population. Si la méthode participative n’est pas remise en question, il convient de s’interroger sur la manière d’arriver à mobiliser davantage de monde.

Concernant cette stratégie 2030, n’est-ce pas utopique d’esquisser les contours d’une ville qui plairait à tous?
Evidemment, il y a autant d’intérêts divergents qu’il y a d’habitants. Mais si on constate que certaines lignes se dégagent dans  une grande partie de la population, alors cela nous indiquera une orientation de la politique à mener. Cela donnera du sens aux décisions à prendre aujourd’hui, mais qui se réaliseront dans 10 ans.

Vous faites appel au sentiment d’identification des citoyens avec leur ville, à l’heure où ils sont plutôt pendulaires. N’est-ce pas vain?
Le sentiment d’identification des Biennois avec leur ville est plus développé que ce que vous croyez! Regardez la campagne des Amis biennois. Nous avons trouvé beaucoup d’ambassadeurs. Les projets menés par des gens d’ici pour les gens d’ici marchent aussi très bien. Prenez l’exemple de l’Eisplanade qui cartonne.

Depuis quelques années, vous vous battez pour améliorer l’image de la ville. Pour quels résultats?
Nous y arrivons grâce aux succès que nous connaissons dans  l’industrie, la culture et le sport. Je constate qu’on parle de Bienne à l’extérieur pour toutes ces raisons et non plus seulement quand quelque chose ne va pas. En 2018, je sais déjà que Bienne attirera les regards grâce à Thomas Hirschhorn qui réalisera la prochaine édition de l’Exposition suisse de sculpture.

Parlons d’avenir: quels défis attendent la Ville en 2018?
Le chantier le plus important à mener est la délocalisation du Centre hospitalier. J’ai bien l’intention de faire avancer le projet. Le fait que le canton se penche maintenant sur la possibilité de déplacer l’hôpital est une réelle chance pour notre ville. La desserte actuelle est catastrophique. Il convient de déplacer l’hôpital près d’une jonction autoroutière de notre agglomération  pour en faciliter l’accès.

Quel rôle la Ville peut-elle jouer dans ce dossier cantonal?
Nous pouvons mettre des terrains à disposition et aider au bon déroulement de l’étude de faisabilité.

Quelles sont vos craintes pour 2018?
Avec des Donald Trump et des Kim Jong-un aux commandes, nous ne sommes pas à l’abri d’incidents au niveau mondial et qui auraient des répercussions sur notre industrie.
Au niveau très local, la politique fiscale du canton et de la Confédération – avec son Projet fiscal 17 – va nous causer quelques cheveux blancs...

Quels sont vos espoirs pour la ville?
J’espère trouver une entente avec le CHB pour sa délocalisation. Mais aussi instaurer une culture du dialogue autour de la branche Ouest, notamment avec les opposants. J’espère aussi saisir les opportunités qui s’offrent à nous en matière de planification de la mobilité douce.
Je me réjouis aussi d’annoncer que les Transports publics biennois vont remplacer les bus diesel par des bus électriques, si le projet pilote prévu en 2018 aboutit. En 2022, ils devraient être 12. Puis, si le rapport efficacité-coût et la fiabilité sont éprouvés, ils seront complétés par 22 bus supplémentaires à l’horizon 2030.

Parmi les dossiers des différentes directions, quelles sont les priorités?
La lutte pour baisser le taux d’aide sociale se poursuit. Du côté des écoles, il convient de s’occuper de la mise à disposition des locaux scolaires et la pérennisation de la filière bilingue. Aux Travaux publics, les mesures d’accompagnement seront la priorité: c’est une promesse que nous avons faite de réduire le trafic dans les quartiers suite à l’ouverture de la branche Est.

Quel sentiment vous habite à l’heure de basculer dans la nouvelle année?
Je suis confiant et serein, même si je sais que nous aurons beaucoup à faire! Le jour où ce ne sera plus le cas, alors mon travail sera ennuyeux.

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