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Reconvilier

La Tankbahn de mieux en meuh...

L’assainissement de l’ancienne place de tir de l’armée est désormais effectif. La fin d’un chantier colossal.

Une vue aérienne des lieux, après leur réhabilitation. Photo: LDD

Pierre-Alain Brenzikofer

Elle a beau ne plus accueillir les M113 – les antiques chars de grenadiers –, ne plus crouler sous les cadavres de douilles au format divers depuis 2003, la bonne vieille Tankbahn vient tout juste d’être assainie.La Tankbahn? Oui, cette place de tir de l’armée, érigée dans les années 40, proche de l’actuelle A16 et justement fermée parce que la construction de cette voie empêchait toute restructuration et modernisation de l’endroit.

Pour les oublieux et les pacifistes, on rappellera que la Tankbahn était composée d’un circuit de rails, sur lequel circulaient des wagonnets surmontés de cibles. Ledit circuit était bordé d’une trentaine de buttes de terre pour protéger les alentours.

Une vaste convention
Abandon oblige, on s’en doute aisément, il a forcément fallu procéder à l’assainissement du site, mais aussi le remettre en l’état. Pour ce faire, une convention entre la Confédération, l’armée, le canton de Berne et la commune bourgeoise de Reconvilier, propriétaire de lieux qu’elle louait à la soldatesque, avait été mise en place.

Aujourd’hui, on peut crier mission accomplie. Et ajouter, comme lors de la critique d’un exercice militaire, que l’engagement de tous les protagonistes était bon.

«Il a quand même fallu lutter, nous a confié Lydia Sangsue, l’alerte secrétaire de bourgeoisie. Au début, l’armée ne voulait qu’aplanir les buttes centrales. Nous avons exigé que tel soit aussi le cas avec les latérales.»

Bref, les bourgeois souhaitaient retrouver le pâturage des origines: «Eh bien, tel est désormais le cas, poursuit notre interlocutrice. Figurez-vous que nous ne nous souvenions même plus que ce lieu était si beau. Oui, nous sommes très satisfaits.»

Précision d’importance, il faudra toutefois patienter trois ans avant d’autoriser le bétail à s'ébattre sur ce qui est à nouveau un pâturage semi-boisé: «Il s’agit en effet de stabiliser le terrain et la végétation. Dans l’intervalle, on pourra seulement faucher.»

On replantera aussi des arbres et des buissons, tant il est vrai que l’armée avait beaucoup défriché durant ses années d’occupation. Et cette opération profitera à... Celtor. La décharge de Ronde Sagne va en effet s’agrandir et sera obligée de compenser les arbres qu’elle abattra. On rappellera à ce propos que son territoire est situé à parts égales sur les territoires des bourgeoisies de Tavannes et Reconvilier.

«J’ai travaillé durant 24 ans à Celtor, révèle Lydia Sangsue. J’ai donc proposé que les compensations forestières dues par la décharge puissent être réalisées sur le site de l’ancienne Tankbahn. Il n’y avait d’ailleurs pas beaucoup d’autres choix...»

Et si on passait aux travaux, qui ont concerné plusieurs entreprises de la région, sous la direction du bureau spécialisé CSD Ingénieurs SA, de Granges-Paccot? Eh bien, ils ont débuté en août 2016 pour s’achever fin septembre. Toutefois, le chantier n’était pas à l’abri de surprises. La contamination par les balles s’est en effet avérée plus étendue qu’estimé, à l’horizontale comme en profondeur. On a aussi découvert des roquettes et des déchets de munitions inconnus. Comme quoi, il a fallu procéder à diverses excavations complémentaires, et autre élimination de davantage de volumes de matériaux.

Exigences bourgeoises
On a encore dû excaver des matériaux contenant les roquettes, faire contrôler ces dernières par le Centre de compétences de déminage et d’élimination de munitions non explosées (DEMUNEX) et enfin les faire éliminer chez Ruag. Les gars de DEMUNEX ont d’ailleurs dû rallier les lieux du crime pour procéder à divers contrôles. Ces travaux-là ont duré de mai à août 2017.

Il faut dire que gentilshommes ou pas, les bourgeois avaient quelques exigences. A leur demande, on a maintenu le bras ouest de la piste de chantier, mais aussi les places de parc à l’entrée, les quatre bovistops et même le ponceau (passerelle) sur le passage à gué.
Corollaire, tous les critères et conditions du réglage et modelage des surfaces, décrits dans le concept de remise en état approuvé par armasuisse, ont été mis en œuvre. La topographie s’intègre dans le paysage régional et elle permet un pâturage sans restriction de l’affectation – pâture par bovin, foin, etc.

«Bien évidemment, l’armée a payé la totalité de la facture», précise encore Lydia Sangsue, qui avoue néanmoins ignorer le montant.Quand on lui parle de millions de francs, l’intéressée ne dit certes pas le contraire. Forcément, la bourgeoisie, qui louait son terrain aux militaires, a subi une sérieuse perte financière qu’elle ne pourra certes pas compenser avec quelques bêtes mises en pâture. «Toutefois, nous toucherons encore un tiers de la somme payée à l’époque pour la place de tir jusqu’en 2018», révèle enfin notre interlocutrice. Un montant accordé à titre de perte d’exploitation, en quelque sorte.

Comme quoi, au pied du Montoz, la guerre est définitivement finie...

 

Des chiffres éloquents:
– 11820 tonnes de matériaux éliminés chez Celtor. Ce qui correspond à environ 780 camions!
– 4180 tonnes de matériaux fortement pollués éliminés chez Kibag. Ce qui correspond à environ 280 camions.
– 2250 tonnes de matériaux chargés de roquettes, soit environ 150 camions.
– 180 tonnes de matériaux éliminés à la décharge Breuleux (décharge type B).
– Surfaces assainies: 25000 mètres carrés.
–Surfaces totales remises en état: 55850 mètres carrés.

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