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Bienne

L’avenir de l’art

Designeuse résidant à Bienne, Melissa-Anne Kwee s’est lancée dans les NFT durant le semi-confinement du printemps 2020. Elle a créé une série d’illustrations numériques des bâtiments biennois.

Melissa-Anne Kwee s’est plongée dans le monde mystérieux des NFT. Barbara Héritier

Julie Gaudio

 

NFT. Ces initiales vous disent peut-être vaguement quelque chose. Pour Melissa-Anne Kwee, elles constituent «son terrain de jeu». Depuis qu’elle a sauté dedans à pieds joints durant le semi-confinement du printemps 2020, la quadragénaire biennoise ne jure que par ces trois lettres, qui «représentent l’avenir». 

 

Mais revenons aux bases. Les NFT, littéralement «non fungible tokens», constituent des œuvres d’art immatérielles dont il est possible de devenir propriétaire. «Chaque pièce dispose d’un certificat numérique d’authenticité, qui garantit que vous en êtes l’unique détenteur», complète Melissa-Anne Kwee. Tout peut être NFT– un morceau de musique, un tableau, un avatar, un tweet, etc.– et s’acheter en cryptomonnaie.

 

Après Zurich et Zoug

 

Cela paraît abstrait? Pas pour la Biennoise. «Les NFT permettent à beaucoup d’artistes d’exposer leur travail sans passer par une galerie qui sélectionne ce qu’elle souhaite», souligne Melissa-Anne Kwee. «Des organisations humanitaires s’en emparent pour financer par exemple des causes environnementales.»

 

Designeuse de profession, à la tête de l’agence 25thfloor, Melissa-Anne Kwee s’est spécialisée ces dernières années dans le digital branding, le e-commerce et les nouvelles technologies. Hollandaise, avec des origines canado-japonaises, elle s’est installée à Bienne il y a dix ans. «Mon compagnon, zougois, travaille à Berne, mais nous avons choisi Bienne en raison de son bilinguisme, puisque je suis francophone. J’avoue qu’après avoir vécu à Zoug et à Zurich, villes très dynamiques, j’ai eu quelques réserves en arrivant ici», confie-t-elle. 

 

De beaux bâtiments

 

Aujourd’hui, Melissa-Anne Kwee se dit complètement séduite par la cité seelandaise et travaille activement à lui rendre ses lettres de noblesse. «Mes clients zurichois me posent souvent la question: ‹c’est où, Bienne?›, alors que cette ville est tellement belle!» sourit-elle. 

 

Profitant des moments de calme du semi-confinement, Melissa-Anne Kwee s’est plongée dans les entrailles de son ordinateur, où elle a retrouvé des images issues d’anciens projets. «Je me suis lancée dans une série d’illustrations design de quelques édifices emblématiques de Bienne désertés durant la pandémie: la Coupole, le Palais des Congrès, La Rotonde, etc.» Bâle, Zurich et Berne ont bénéficié d’un traitement similaire.

 

Réalisée au départ juste pour elle, cette série a tapé dans l’œil de Sandra Sahin Flückiger, la présidente d’Arty Event. Celle-ci a proposé à Melissa-Anne Kwee de participer à Arty Show, et d’exposer ses œuvres dans la vitrine de l’horloger Junod, en vieille ville. «J’ai imprimé mes illustrations sur des panneaux de 80 cm. C’était la première fois que j’exposais», glisse-t-elle. «On m’a ensuite suggéré de tirer mes images sur des cartes postales, que j’ai vendues chez Alabama et Edu’s Coffee& Clothes.»

 

A l’automne, elle a poussé son projet encore plus loin en éditant des calendriers. La vingtaine d’œuvres produites s’est rapidement vendue. Preuve, pour Melisssa-Anne Kwee, «que les bâtiments biennois sont davantage aimés qu’on ne le pense». 

 

Confrontée à des problèmes de production en raison de la crise sanitaire, Melissa-Anne Kwee a alors eu l’idée de se tourner vers les NFT. «Sans abandonner les supports physiques, comme les cartes postales, je trouvais bien d’avoir des œuvres digitalisées. Il est tout à fait possible de combiner les deux», estime-t-elle.

 

Un autre monde

 

Se lancer dans les NFT demande de la patience et du temps. «Les débuts sont très chronophages car il faut créer un portefeuille de cryptomonnaie, le remplir, acheter des clés de sécurité. Cela fait même un peu peur!» admet Melissa-Anne Kwee. D’autant qu’il y a beaucoup de spéculations dans ce domaine. «Les NFT ont quelque chose de ludique. Il y a toujours du suspense avant une vente qui excite les acheteurs. Du jour au lendemain, vos œuvres peuvent gagner ou perdre de la valeur», décrit la Biennoise. 

 

Selon elle, il existe deux types d’acheteurs:ceux qui acquièrent par coup de cœur, et ceux pour qui il peut y avoir de potentiels gains par la suite. Melissa-Anne Kwee fait partie de la première catégorie. «Je vends et achète des NFT pas tant pour l’appât du gain, mais vraiment par plaisir», assure-t-elle. Et quelle ne fut pas sa surprise de constater qu’une Zurichoise avait acquis son illustration NFT du Palais des Congrès de Bienne pour une trentaine de francs. «L’acheteuse peut la garder dans son portefeuille, ou la revendre. Si elle choisit la deuxième option, je toucherai 2,5% sur la vente qu’elle réalisera.»

 

Pour vraiment gagner de l’argent avec les NFT, «il faut se faire connaître au sein d’une communauté», analyse Melissa-Anne Kwee. Acheter, revendre, spéculer, etc. «En bref, il faut passer tout son temps devant son ordinateur, comme un trader. Personnellement, je consacre environ une heure par semaine à gérer mes NFT.»

 

Sceptique sur ce nouveau monde? «Les NFTsont comparables à la naissance d’internet dans les années 1990: ils représentent l’avenir, même si cela paraît très abstrait pour le moment», image la Biennoise. «La pandémie a accentué l’importance du monde virtuel. Tout se fait désormais en ligne», conclut-elle. 

Mots clés: nft, Art, numérique

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