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Littérature: Pascal Bruckner

«Le bonheur seul n’est pas suffisant»

L’écrivain et essayiste Pascal Bruckner a rencontré 150 élèves du Centre professionnel des Montagnes. Pour lui, l’homme a la possibilité de renverser les choses

La course au bonheur, maladie de notre société occidentale? C’est la thèse défendue par Pascal Bruckner, pour qui la liberté est bine plus précieuse que le bonheur. Lucas Vuitel

Lea Gloor

Hier matin, plus de 150 élèves du Cifom se sont réunis au Locle pour échanger avec Pascal Bruckner, écrivain et essayiste français, dans le cadre des 20 ans de l’école. Le thème? «Le temps de l’existence et la quête du bonheur.» Un sujet que maîtrise l’auteur de «L’Euphorie perpétuelle» (2002), un ouvrage qui décortique comment le culte du bonheur a peu à peu envahi la société occidentale et pousse à tout évaluer sous l’angle du plaisir et du désagrément, minant et frustrant l’individu. Rencontre.

Vous avez écrit «L’Euphorie perpétuelle» en 2002. En 13 ans qu’est-ce qui a changé?
Pas grand-chose! Sauf qu’avec la crise de 2008, les gens ont compris que cette course au bonheur ne suffisait pas à les protéger. La folie du bonheur n’a fait que s’accentuer.C’est l’état d’esprit du monde occidental, au prix de notre résilience au malheur.

Quelles solutions peut-on envisager?
Il faudrait dévaloriser le bonheur en le remplaçant par la joie, où l’on accepte les moments merveilleux de la vie comme les abominables, ainsi que les plaisirs, les passions ou la liberté. La liberté est bien plus précieuse que le bonheur.

Vous évoquez aussi la notion de résilience...
Oui, notre capacité à encaisser des coups sans tomber. Tous les hommes veulent échapper au malheur. Ce qui manifeste notre vitalité, c’est notre capacité à surmonter les obstacles. Le bonheur n’est pas suffisant. Il faut subir déceptions et chagrin et malgré tout tenir. Le bonheur vient et s’en va sans que nous puissions en maîtriser les allées et venues, c’est un épisode de grâce.

Nombre de philosophes de la modernité se montrent très pessimistes quant à l’état de la société occidentale. C’est votre cas?
Je suis plutôt optimiste. Le pessimisme français me fatigue. En dépit de tous les dangers qui menacent, l’homme a la possibilité de renverser les choses.

Avec des contraintes en nombre...
C’est ça, la liberté: changer de chaînes, ruser, s’en moquer aussi, pour s’arracher au déterminisme.

Parlant de passions, quelles sont les vôtres?
Il faut distinguer passions et hobbies. Mais, ma passion fondamentale, c’est l’écriture. Et il y a des choses que j’adore et qui me réveillent comme la montagne. Puis, j’adore le piano et les montres, le seul bijou masculin. Leur fabrication est fascinante: la manière de faire tenir tant de contraintes dans un si petit espace.

Étiez-vous déjà venu dans la région?
C’est ma troisième visite ici. Je ramène toujours quelque chose de mes séjours, j’ai l’impression de ramener un petit bout de l’âme du pays. Cette fois, ce sont des crayons et un kit de nettoyage à chaussures (rire).

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