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Politique du 3e âge

«Les aînés veulent transmettre leur vécu»

Brigitte Brun est la déléguée aux personnes âgées de la Ville depuis le mois de février. Sa priorité est de lutter contre l’isolement social des seniors. Rencontre

Pour Brigitte Brun, les aînés biennois se sentent plutôt bien dans leurs basket. Archives/Anne-Camille Vaucher

Propos recueillis par Didier Nieto

A Bienne, environ 18% de la population est âgée de plus de 65 ans. Depuis le début de l’année, Brigitte Brun occupe le poste de déléguée au 3e âge, nouvellement créé au sein de la Direction de la formation, de la culture et du sport. Une de ses missions est de réduire l’isolement des seniors en les incitant à participer davantage à la vie sociale.

Pour y parvenir, elle a lancé ce printemps l’opération  «Vieillir à Bienne, agir en réseau», qui soutient des projets participatifs de différentes associations (notre édition du 3juin). «Nous avons besoin des aînés et eux ont besoin de nous», assure-t-elle. Rencontre avec la «Madame 3e Age» de Bienne.

Brigitte Brun, à 37 ans, vous êtes encore loin du 3e âge. Comment vous représentez-vous cette étape de la vie?

Autrefois, la retraite ne durait que quelques années. C’est une période qui s’allonge de plus en plus et qui a donné naissance à une nouvelle génération. Notre société en général lui porte un intérêt croissant, mais il y a encore beaucoup de travail à faire, en matière de mobilité ou de logement par exemple. On a tendance à croire que tout va bien tant que ces personnes ne meurent pas de faim et reçoivent des soins. Mais on se soucie peu de l’importance du lien social.

Votre but est justement d’entrer en contact avec les aînés qui souffrent d’isolement. Comment vous y prenez-vous?

Mon rôle est de coordonner les efforts des différents acteurs impliqués. Au travers de «Vieillir à Bienne, agir en réseau», la Ville soutient des projets, comme les tables rondes pour personnes âgées de l’association effe ou les visites à domicile de Benevol Bienne. Nous allons aussi transformer les Infoquartiers pour en faire des lieux de rencontre intergénérationnels.

Avec ces points de contact de proximité, nous espérons toucher les aînés qui échappent à nos canaux de communication. C’est un travail de longue haleine qui demande aussi la volonté des seniors de participer et de sortir de leurisolement.

A quoi est dû cet isolement?

Selon une étude de l’Union des villes suisses, il s’agit souvent de femmes divorcées dans une situation financière délicate. En général, leur réseau social était déjà limité lorsqu’elles étaient actives. En exagérant un peu le trait, leur vie sociale se résumait à leur travail. Pour elles comme pour beaucoup de monde, la retraite s’avère être un moment  déstabilisant. Il serait donc aussi important de faire de la prévention auprès des personnes dès 50ans pour les y préparer – particulièrement auprès des étrangers, pour qui la langue et l’éloignement de la famille peuvent être un obstacle supplémentaire.

Vous êtes en contact avec les aînés biennois depuis le début de l’année. Quelle impression vous donnent-ils?

Je crois que la plupart se sentent bien dans leurs baskets et ont envie de jouer un rôle dans la société. Généralement, ils sont motivés à transmettre leur savoir et leur vécu. Ils ont aussi envie d’aider les plus jeunes générations parce qu’ils estiment que tout est devenu plus compliqué aujourd’hui. D’autres considèrent qu’ils ont «déjà donné» et qu’il ne faut pas les embêter. Il y a de tout. Une retraitée m’a confié qu’elle ne savait pas quoi faire de ses après-midis à part regarder la télé. Je l’ai orientée vers une association où elle effectue désormais du bénévolat.

Vous avez lancé un sondage auprès des retraités pour déterminer leurs attentes et leurs besoins. Qu’en est-il ressorti?

La mise en place est toujours en cours. Nous songeons aussi à réaliser des entretiens individuels. Les résultats ne seront pas connus avant fin 2016. Mais d’après les discussions que j’ai menées avec les aînés et nos partenaires – Pro Senectute, effe, Caritas, Benevol Bienne, Croix-Rouge... –, l’offre pour les personnes âgées est bonne, mais elle n’est pas suffisamment connue.

Quels changements avez-vous apporté à la politique du 3e âge de la Ville depuis votre arrivée?

La volonté de mettre en place des projets pour les personnes âgées était là. Je me suis servie d’une bonne base existante pour commencer mon travail. J’ai développé le côté participatif, en mettant l’accent non pas sur les projets pour les personnes âgées, mais ceux avec elles. «Vieillir à Bienne, agir en réseau» se concentre sur les idées innovantes en la matière, comme Win3, de Pro Senectute, qui a débuté cet automne dans les écoles francophones. Des seniors épaulent des enseignants dans leurs classes quelques heures par semaine. Nous recherchons d’ailleurs toujours des retraités bénévoles.

Pro Senectute est un partenaire important. La Ville arrêtera pourtant de subventionner l’institution l’année prochaine. Cette décision n’est-elle pas contradictoire avec les intentions affichées en faveur du 3e âge?

Je ne crois pas. Le subventionnement n’était plus adapté à notre manière de travailler. La Ville soutiendra toujours Pro Senectute, mais en finançant certains projets au travers de «Vieillir à Bienne, agir en réseau», comme Win3. L’institution reste subventionnée par le canton.

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