«Les Chinois sont toujours de très bons clients»

Philippe Oudot

Depuis quelques mois, nombre d’entreprises horlogères de l’Arc jurassien sont à la peine. En témoignent les annonces de restructurations et de suppressions d’emplois. En témoignent également les statistiques d’exportations que publie chaque mois la Fédération de l’industrie horlogère suisse (FH).

Les résultats d’octobre, en principe un des plus gros mois de l’année, accusent en effet une baisse de plus de 12%par rapport à octobre 2014. Un recul notamment très fort pour Hong Kong, premier marché d’exportation de l’horlogerie suisse (-38,5% pour octobre, et -22,7% depuis le début de l’année).

Dans ce contexte économique plutôt difficile, Longines fait un peu figure d’exception. «Je continue à très bien dormir», nous a confié hier son président Walter von Kaenel, lors d’une rencontre avec la presse régionale. Certes, la marque au sablier ailé n’affiche plus les taux de croissance quasi exponentiels de ces dernières années, «mais je n’ai rien réduit, que ce soit en termes de commandes, d’investissements ou d’actions marketing» (voir encadré).

La crise? Connaît pas!

Pas question donc de parler de crise. D’autant moins que l’entreprise continue de renforcer son équipe marketing et d’embaucher du personnel. Dans les ateliers, on fait même des heures supplémentaires, le samedi matin, en prévision des ventes de fin d’année!

Un succès que le boss attribue à «notre stratégie, notre politique de stock très saine, notre positionnement de prix resté constant. C’est ce qui nous permet d’occuper et de garder une position dominante dans notre secteur.»

Depuis deux ans, Longines a franchi le cap du milliard de francs en termes de chiffre d’affaires, rappelle Walter von Kaenel, ce qui place la marque au 4e rang des maisons horlogères suisses.

À Hong Kong, Longines accuse certes aussi un recul, mais sans commune mesure avec les chiffres de la FH. «La branche continue de payer la campagne de protestation des parapluies jaunes», observe-t-il.

Les groupes de touristes chinois sont bien moins nombreux et achètent moins, ou moins cher. Et de souligner que les magasins multimarques souffrent bien plus que les boutiques Longines, qu’elles appartiennent à la marque ou qu’il s’agisse de boutiques franchisées. A propos de ces boutiques, Walter von Kaenel précise que la maison imérienne en possède 16 en propre, et qu’elle n’en compte pas moins de 120 franchisées dédiées à la marque.

La Thaïlande en force

Suite à l’épidémie de coronavirus MERS qui a frappé la Corée du Sud ce printemps, la chute des ventes y a été «satanique», mais depuis cet été, la situation s’est stabilisée, «on y sent des vibrations positives». Comme le souligne le boss, les touristes chinois se sont déplacés au Japon et en Thaïlande, où les ventes sont «exceptionnelles».

De quoi compenser en partie le manque de chiffre d’affaires enregistré à Hong Kong. Quant à la Grande Chine, Longines a réussi à y maintenir son chiffre d’affaires et sa position dominante grâce à son positionnement de prix. «Ce sont surtout les marques haut de gamme qui ont souffert des mesures anticorruption prise par le gouvernement», assure-t-il.

Au Moyen-Orient, la maison imérienne a réalisé des ventes qualifiées d’«exceptionnelles», en particulier à Dubaï et dans les émirats du Golfe grâce à la reprise par le Swatch Group de la société de distribution Rivoli, qui compte plus de 200 boutiques. En Europe, «nous avons également fait de très bons résultats, que ce soit en France, en Italie, en Allemagne, mais également en Suisse.» Malgré la baisse du nombre de touristes? «Oui, car les Chinois sont toujours de très bons clients.»

Gros efforts aux Etats-Unis

Quant aux Etats-Unis, Walter von Kaenel indique que Longines va y faire de gros efforts en revoyant complètement sa distribution. La marque vient d’ailleurs d’inaugurer une boutique à Honolulu, et elle va en ouvrir tout prochainement de nouvelles dans le nouveau World Trade Center de New York, ainsi qu’à Miami.

Autant d’éléments qui permettent à Walter von Kaenel de se montrer résolument optimiste. Quant à l’introduction de la nouvelle loi Swissness, qui fixe à 60%le taux minimum de valeur suisse pour qu’une montre puisse porter le label Swiss made, le patron de Longines se montre parfaitement serein et rappelle que les gros investissements du Swatch Group ces dernières années ont permis d’augmenter fortement les capacités de production.

Accents sur le sport

Le monde du cheval 

En matière de marketing et de communication, Longines mise sur l’élégance et le sport et y investit de gros moyens. Dans le domaine sportif, la marque se concentre dans cinq disciplines: l’équitation, le ski, la gymnastique, le tir à l’arc, ainsi que le tennis – plus précisément le tournoi de Roland-Garros dont Longines est le partenaire officiel. Le monde du cheval fait d’ailleurs presque partie de l’ADNde la marque, puisque le premier chronographe gravé d’un cheval et d’un jockey date de 1878! Au cours de l’année, Longines assure le chronométrage et le traitement des données de quelque 350courses hippiques et sauts d’obstacles. Au nombre de ses ambassadeurs figure notamment la cavalière d’Evilard Jane Richard.

Ski 

La maison imérienne est le chronométreur officiel de toutes les courses au programme de la Coupe du monde de ski alpin, aussi bien pour les compétitions féminines que masculines. Walter von Kaenel est d’ailleurs très fier d’avoir pu récupérer le chronométrage de la légendaire Streif, dans la station autrichienne de Kitzbühel. «Pour nous, le ski est de loin la discipline qui permet le mieux de mettre en valeur notre marque, car nous sommes identifiés au portillon de départ, lors des temps intermédiaires, à l’arrivée et à la publication des résultats!» Longines peut compter sur deux prestigieux ambassadeurs:le Norvégien Aksel Lund Svindal et l’Américaine Mikaela Shiffrin.

Gymnastique 

Depuis 1985, Longines est le chronométreur officiel de toutes les compétitions organisées par la Fédération internationale de gymnastique. Au nombre de ses ambassadeurs figurent la championne russe Yana Kudryavseva, la Suissesse Giulia Steingruber, ainsi que l’équipe masculine de Chine. pho