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Les paysans témoignent de leur ras-le-bol

La Chambre d’agriculture du Jura bernois a tenu hier l’assemblée générale de son 40e anniversaire.

Le président Bernard Leuenberger a tenu des propos percutants bien reçus par l’auditoire. Photo: Bernard Schindler

BERNARD SCHINDLER

Plus de 150 membres et invités ont, hier, rempli la salle du Cheval-Blanc à l’appel du président Bernard Leuenberger pour tenir l’assemblée générale annuelle et fêter les 40 ans de la Chambre d’agriculture du Jura bernois (CAJB). Le directeur de l’Office de l’agriculture cantonal, Urs Zaugg, a salué l’auditoire au nom des autorités bernoises et Dominique Sunier, conseiller communal, a fait de même pour les autorités de la commune de Plateau de Diesse. Après l’accueil d’usage des invités, dont le conseiller national Manfred Bühler et les députés Francis Daetwyler, Patrick Steiger, Marc Tobler et Etienne Klopfenstein, ce dernier représentant aussi le Conseil du Jura bernois, le président de la CAJB est entré tambour battant dans le vif du sujet.

Grogne qui vire colère
Le monde paysan de la Suisse vit mal, pour deux raisons fondamentales évoquées de façon récurrente: l’impuissance des producteurs face à la grande distribution qui comprime toujours plus ses prix d’achat et les instabilités et contradictions de la politique agricole helvétique.

Et Bernard Leuenberger a ôté ses gants pour clamer le désarroi des producteurs face aux incohérences des autorités, fédérales en particulier. Il cite la rumeur insistante de réduire encore certaines prestations dès 2018. Il rappelle l’acceptation d’un crédit-cadre pour la période 2014-2017 de la politique agricole (PA) et les tentatives de l’Office fédéral de l’agriculture (OFAG) de réduire les dépenses lors de chaque discussion des budgets annuels. «Cherchez l’erreur!» assène-t-il. Il conclut ainsi: «Je demande à Monsieur le conseiller Schneider-Ammann de respecter les engagements de la Confédération et de ne pas ajouter sans cesse de nouvelles coupes. Nous, agriculteurs, devons respecter nos engagements et ne sommes pas des girouettes que l’OFAG peut manipuler comme il veut. Voilà ce que j’appellerais le respect mutuel.»

L’auditoire a applaudi sans équivoque. Représentant de l’Union suisse des paysans (USP), Francis Egger a évoqué les enjeux à court terme de l’initiative sur la sécurité alimentaire en cours, base indispensable d’une survie de l’agriculture nationale, où la solidarité paysanne doit agir sans exclure personne, versant biologique des producteurs compris. Il a apporté la clarté nécessaire à propos des interférences politiques très complexes de cette initiative, rappelant que l’UPS était prête à l’action.

Les affaires courantes
Les rapports d’activité, les comptes et le budget ont été approuvés sans oppositions. Wilfred Schnegg et Christian Tschanz ont été élus au comité. Ariane Tschanz entre au conseil de la Fondation rurale interjurassienne (FRI) dont le directeur Olivier Girardin a donné des nouvelles fraîches.
Au chapitre des honneurs, deux employés agricoles ont reçu le diplôme des 25 ans d’activités et trois nouveaux titulaires, deux brevets et une maîtrise, ont été cités.

Place à la fête
A l’issue du repas de midi, les 40 ans de la CAJB ont été dignement fêtés. Conseiller d’état en charge de l’économie, Christoph Ammann a apporté le salut du gouvernement. Il a rappelé les atouts agricoles du Jura bernois, tête-de-moine et gruyère comme produits phares de la production laitière dominante. Il a aussi insisté sur sa manière personnelle de traiter les affaires, par contacts directs avec un minimum de paperasserie. Le président de la CAJB l’a accueilli et remercié, relevant que la seule visite gouvernementale précédente datait de 1987, avec Peter Siegenthaler. A l’accordéon et guitare, un trio de membres de la CAJB a donné la touche musicale et Annemarie Hämmerli (voir ci-contre) a revisité l’histoire de quatre décennies agricoles, avec beaucoup d’humour.

Zoom sur les 40 ans de la CAJB

 Secrétaire de la CAJB depuis 1983, Annemarie Hämmerli a évoqué un point fort de chaque année. La richesse des thèmes abordés étonne. Voici en vrac: En 1977, la CAJB a distribué 17 000 fr. aux victimes des campagnols, les agriculteurs ont manifesté, à Genève contre les diktats du GATT ancêtre de l’OMC en 1990 et, surtout, à Berne en 1996 face aux matraques de la police en action musclée.

Les revenus agricoles n’ont cessé de plonger depuis 1991, les paiements directs ont débuté en 1993 et la FRI a été fondée en 2004. Conclusion en 2017: «La lutte de la défense professionnelle continue!».

En 40 ans, quatre présidents se sont succédé, feu Constant Bourquin de Diesse ayant tenu la barre les 20 premières années.
Sur scène, René Eicher, Jean-Michel Carnal et Bernard Leuenberger en tant que successeurs, avec Alexandre Geiser brillant agriculteur au concours des métiers SwissSkills ont été interviewés en direct par Karine Etter, rédactrice en chef d’Agri. Les intervenants ont exprimé une confiance prudente en l’avenir et ils ont tous appelé à la solidarité paysanne, nécessaire à la lutte en cours et pas toujours facile à obtenir.
 

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