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Horlogerie

«Mettre en lumière les métiers de l’ombre»

La 13e édition du plus important Salon professionnel annuel consacré à l’horlogerie-bijouterie, à la microtechnologie et aux medtech a ouvert ses portes hier à Genève. Il accueille 825 exposants.

Le conseiller d’Etat Pierre Maudet (de dr. à g.) coupe le ruban lors de l’inauguration du Salon, sous le regard d’Olivier Saenger et du directeur général de Palexpo Claude Membrez. (Philippe Oudot)

Philippe Oudot

Quelque 20000 visiteurs professionnels vont converger jusqu’à vendredi à Palexpo, à Genève, où se tient depuis hier la 13e édition du Salon international EPHJ-EPMT-SMT. Un sigle un peu compliqué pour Environnement Professionnel Horlogerie-Bijouterie, Environnement Professionnel MicroTechnologies, et Swiss Medical Technologies. Cette année, le Salon accueille 825 exposants, nombre en hausse de 9% par rapport à l’édition 2013.

Lors de la conférence de presse précédant l’inauguration officielle du Salon, qui s’est déroulée en présence du conseiller d’Etat genevois Pierre Maudet, en charge de la Sécurité et de l’Economie, Stephen Post, responsable de communication, a indiqué que le Salon recevait beaucoup de demandes, «mais nous ne cherchons pas à nous étendre davantage. Nous ne voulons pas de trop grands stands et privilégions la diversité de l’offre, le but étant d’attirer le plus de visiteurs professionnels possible afin que nous clients puissent faire des affaires.» Avec succès, puisque 90% des exposants reviennent chaque année.

Sur les 825 exposants de cette édition, un quart vient de l’étranger, en provenance d’une douzaine de pays, essentiellement européens. Quant aux visiteurs étrangers, ils constituent aussi une part importante, et l’an dernier, ils étaient issus de 43 pays.

Medtech en vedette

Pour cette 13e édition, les organisateurs ont choisi de placer les technologies médicales au cœur de l’actualité du salon à travers 200 entreprises qui ont une activité dans ce domaine. Pour la première fois, en effet, le «Medtech Village», organisé par les sociétés Bioalps et Inartis, accueille de nombreuses sociétés, principalement des start-up du secteur, afin d’accélérer les synergies déjà existantes avec les domaines horloger et microtechnologique. Anoter que ce salon est la seule manifestation medtech organisée en Suisse cette année.

Responsable de Bioalps, Claude Joris a insisté sur l’importance de ce secteur en Suisse. Il compte 3700 entreprises, qui emploient plus de 50000 personnes. «La branche connaît un taux de croissance de 6% – trois fois plus que l’économie suisse en général –, et elle représente 5,5% des exportations.» Il a aussi mis en évidence les synergies entre medtech, horlogerie et microtechnologie, soulignant que la première constitue un développement naturel des deux autres.
Si le rendez-vous a beaucoup évolué durant ces 13 ans d’existence, la manifestation a gardé la même philosophie, a relevé Olivier Saenger, cofondateur du Salon avec André Collard: «Aménager les stands pour mettre en valeur les produits et les savoir-faire des exposants en leur offrant le meilleur cadre possible pour soigner les contacts et la convivialité propice aux affaires en les traitant tous sur pied d’égalité.»

Passer la main

Après avoir consolidé la manifestation pour en assurer la pérennité, les deux cofondateurs s’apprêtent à passer la main en se retirant de la direction opérationnelle. En jetant un regard rétrospectif sur toutes ces années, André Collard s’est dit fier du chemin parcouru: «Avec modestie et simplicité, nous nous sommes consacrés avec enthousiasme à mettre sur pied ce Salon, qui est devenu un événement d’envergure internationale, et nous sommes restés fidèles à notre philosophie de départ, à savoir mettre en lumière les métiers de l’ombre.» Et son compère d’ajouter que tous deux resteront en coulisses au sein du Conseil stratégique.

Lors de l’inauguration, Pierre Maudet a quant à lui souligné que Genève était très fière d’accueillir ce salon, «unique manifestation professionnelle de cette envergure en Suisse. Cet événement reflète non seulement la bonne santé de l’industrie horlogère, mais il met aussi en valeur la richesse et la variété du tissu industriel suisse en agissant comme véritable plate-forme d’échanges et de rencontres. Il renforce ainsi les indispensables synergies entre les secteurs de l’horlogerie-joaillerie, les microtechnologies et les technologies médicales.»

Convivialité et discrétion

Olivier Saenger, certains exposants disent renoncer à venir parce que ce salon est devenu trop grand. Qu’en dites-vous?

Il a grandi parce qu’il répond à un besoin des exposants, mais tous reconnaissent que nous avons su conserver l’atmosphère chaleureuse et conviviale qui le caractérise. Ils disent apprécier cette ambiance quasi familiale. Nous ne cherchons pas à grandir à tout prix, mais ce sont les exposants qui se pressent au portillon! Cela dit, il est clair que nous atteignons gentiment la taille maximale en termes de nombre d’exposants si nous voulons rester sur le même espace. En tout cas, nous sommes sélectifs dans le choix de nos exposants, afin qu’ils puissent y faire les meilleures affaires. Un business qui se fait avec les quelque 20000 visiteurs attendus, bien sûr, mais aussi entre exposants! C’est vrai qu’un salon aussi important que le nôtre ne se visite pas en un demi-jour, et il faut savoir consacrer au moins un ou deux jours si on veut profiter des opportunités qu’il offre.

Quels sont aujourd’hui les principaux défis auxquels vous êtes confrontés?

Notre plus grand défi est de conserver à notre manifestation son caractère particulier. Les exposants apprécient cet état d’esprit, le vaste espace disponible, avec des stands de bonne taille, de larges allées. C’est autrement plus appréciable que ces salons où les gens sont entassés et peinent à se croiser, tant c’est étroit! Cela donne certes l’impression qu’il y a du monde, mais c’est très désagréable. Chez nous, en revanche, exposants et visiteurs apprécient cet espace, qui permet une bonne convivialité tout en offrant la discrétion nécessaire pour les affaires.

L’EPHJ a démarré à Lausanne, et c’est la 3e année que vous êtes à Genève. Quels avantages?

Ce déplacement a été très positif et très profitable, tant pour nous que pour nos exposants et nos visiteurs, qui apprécient d’avoir tous les stands regroupés sur le même niveau.

Le secteur medtech s’est beaucoup développé. N’est-ce pas au détriment de vos premiers exposants horlogers?

Pas du tout, et même bien au contraire! Il faut d’abord savoir que ce secteur est très important et qu’il dégage un chiffre d’affaires supérieur à celui de l’horlogerie. Cette année, quelque 200 exposants sont actifs dans les medtech. Ils sont 80 à avoir choisi d’exposer dans le secteur spécifique aux medtech. Mais il y en a 120 autres qui ont aussi des activités dans ce secteur et qui continuent d’exposer dans les secteurs spécifiques EPHJ ou EPMT, parce que les medtech ne représentent qu’une part de leurs activités – ce qui montre bien l’importance des synergies entre ces branches. Ce développement ne s’est donc pas fait au détriment d’un des deux autres secteurs.

L’impact du Swiss label

Valeur certaine

De nombreuses tables rondes se déroulent dans le cadre de l’EPHJ. Hier, Jean-Daniel Pasche, président de la Fédération de l’industrie horlogère suisse (FH), s’est exprimé sur l’impact du Swiss label pour l’horlogerie. Al’étranger, celui-ci a une valeur certaine, a-t-il relevé, aussi bien immatérielle que marchande. Globalement, le Conseil fédéral l’évalue entre 4 et 5 milliards de francs. La valeur du Swiss made est d’ailleurs reconnue partout dans le monde, et elle est synonyme de précision, de bienfacture, de sérieux et de légitimité. Au Japon, par exemple, a-t-il indiqué, les consommateurs seraient prêts à payer une montre Swiss made deux fois plus chère qu’une même pièce dépourvue du précieux label.

Swissness adopté

Mais ce label doit être protégé pour rester crédible. Voilà pourquoi la FH lutte pour le renforcement du Swiss made. La législation actuelle étant lacunaire, trop de produits portent le label Swiss malgré la faible valeur produite en Suisse. Dans ce contexte, il a rappelé que les Chambres fédérales ont adopté le projet Swissness qui vise à protéger la «marque Suisse». Le décret d’application est en cours d’élaboration. Pour les produits industriels, la valeur produite au pays doit atteindre au moins 60% du prix de revient pour avoir droit au label. Les horlogers souhaiteraient porter cette valeur à 80%pour les montres mécaniques, mais cela semble difficile en raison de problèmes de compatibilité avec les accords internationaux, a-t-il expliqué.
 
Un plus

S’agissant de la question de la contrefaçon, «tout ce qui a du succès est copié», a poursuivi Jean-Daniel Pasche. C’est bien sûr la valeur de la marque, et pas le Swiss made en tant que tel qui pousse les contrefacteurs à agir, mais il est clair que le label renforce encore cette valeur. Soulignant que tout abus diminue la crédibilité du label et entraîne une perte de valeur, il a indiqué que la FHs’engage pour combattre ces abus en utilisant tous les outils juridiques et administratifs à sa disposition.

Petit tour chez quelques exposants régionaux

L. Klein SA

La PME biennoise est spécialisée dans la fourniture et la commercialisation de barres rondes de haute précision – de 0,4 mm à 50 ou 80mm de diamètre, destinées avant tout au décolletage horloger et médical. «Nous avons environ 4000 articles en stock, que les clients peuvent acheter au détail», précise Thomas Doppler, chef des ventes. Cette entreprise de 16 collaborateurs propose une large palette de métaux et d’alliages – aciers divers, titane et autres alliages cuivreux. L.Klein SAtravaille beaucoup dans l’Arc jurassien, mais aussi à l’exportation, qui représente 40%de son chiffre d’affaires. La PME participe à l’EPHJ pour la 4e fois. «Ce salon nous permet de rencontrer beaucoup de clients, existants ou potentiels, actifs dans l’horlogerie et le médical.»

Dihawag horlogerie 

Cette entreprise familiale biennoise est le distributeur exclusif d’outils de coupe de haute précision pour l’horlogerie et le médical, ainsi que d’équipements et de périphériques de machines, indique Anne Christelle Müller, responsable du marketing. «Nous travaillons en étroite collaboration avec nos clients pour identifier leurs besoins. Ensuite, en collaboration avec nos fournisseurs, nous développons les outils nécessaires qu’ils vont produire.» La PME, qui occupe 31 personnes, travaille exclusivement pour le marché suisse. «Pour une entreprise comme la nôtre, l’EPHJest tout simplement incontournable!»

Lamineries Matthey SA

Sise à La Neuveville, l’entreprise est spécialisée dans le laminage à froid de métaux (réduction d’épaisseur, jusqu’à moins d’un demi-millimètre). Elle travaille quelque 80 types d’alliages différents – aciers divers, cuivre béryllium, alliages cuivreux, alliages d’aluminium, de nickel ou encore alliages pour le médical. Directeur du développement, Brice Trommer précise que «les domaines d’application sont l’horlogerie (un tiers), la connectique et l’électronique (un tiers), le reste allant dans le médical et l’automobile». L’entreprise emploie 65 personnes, dont 45 à la production, et réalise 60 à 70%de son chiffre d’affaires à l’exportation, en particulier en Asie. «Nous sommes à l’EPHJdepuis ses débuts», précise-t-il.

Générale Ressorts SA

Née de la fusion de plusieurs petits fabricants de ressorts après la crise des années 70, la PME biennoise est aujourd’hui une entité du groupe Acrotec. Elle produit 2,5 mios de ressorts par an, essentiellement pour l’horlogerie, en particulier des ressorts de barillet (80% de la production). Depuis quelque temps, indique Sébastien Perrelet, directeur de la production, «l’entreprise développe et produit des barillets complets ‹clé en main› selon les besoins spécifiques des clients». C’est elle aussi une habituée de l’EPHJ, rendez-vous qui permet de rencontrer ses clients actuels et futurs, ainsi que ses fournisseurs.

Witschi Electronic SA

La société établie à Büren an der Aare développe et fabrique des appareils de mesure pour l’horlogerie, avec cinq champs d’activités spécifiques, indique Martin Schürch, chef du marketing et des ventes: mesures de la montre mécanique et à quartz, de l’étanchéité, du magnétisme et du couple. L’entreprise réalise 60%de son chiffre d’affaires en Suisse. «Nous participons à Baselworld et à l’EPHJ. ABâle, nous nous adressons plutôt aux gens du service international, horlogers et détaillants, alors qu’à l’EPHJ, nous voyons principalement les gens de la production et des laboratoires», indique notre interlocuteur, qui souligne l’importance du rendez-vous genevois pour son entreprise.

DC Swiss SA

L’entreprise de Malleray est la spécialiste du taraudage et du filetage. Elle produit des outils spécifiques de haute précision, notamment pour l’horlogerie, le médical et l’aéronautique. Ingénieur des ventes, Louis Kohler précise que ces dernières années, DCSwiss a beaucoup investi pour répondre aux besoins de l’horlogerie en matière de microfiletage. «Il s’agit d’outils de haute qualité, car dans l’horlogerie, le taraudage est la dernière étape et on ne peut se permettre de casser un taraud, sans quoi toute la valeur ajoutée déjà produite sur la pièce est perdue!» Et de souligner que la force de DCSwiss, c’est sa compétitivité et la disponibilité immédiate de ses produits.

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