Vous êtes ici

Abo

Moutier

Primés grâce au glyphosate

En se lançant dans un travail de recherche en chimie, chose rare au secondaire II, un enseignant et quatre élèves de l’Ecole de matu spécialisée ont obtenu un prix de l’EPFL.

Encadrés par leur enseignant en chimie, Thibaud Rossel, les quatre élèves de l’EMSp vérifient quels capteurs réagissent à l’herbicide. Photo: DS

Par Dan Steiner

Décidément, l’herbicide tant controversé, car considéré comme probabolement cancérigène par de nombreuses études et par le Centre international de recherche sur le cancer, est omniprésent. Bon, pour une fois, c’est un prix et une reconnaissance qu’aura permis d’obtenir le glyphosate. Une méthode élaborée pour le détecter, donc. Il ne faut pas pousser, c’est le cas de l’écrire.

Eux, ce sont Thibaud Rossel, enseignant en chimie à l’Ecole de maturité spécialisée de Moutier (EMSp), et quatre élèves de deuxième année, qui, dans le cadre de leur Travail de certificat, ont été recompensés par l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne. Leur recherche: la création de bio-senseurs colorimétriques pour la détection de substances problématiques. Le concours: le Learn Award, organisé pour les 50 ans de l’EPFL et sanctionnant pour la première fois «des projets novateurs au niveau gymnasial». Et la distinction: 10'000 francs et le troisième prix.

Le fameux «learning by doing»
«On est bien contents, d’autant qu’on ne s’y attendait pas trop», sourit le Neuvevillois Kyrian Engel, l’un des quatre heureux récipiendaires. «C’était impressionnant de se retrouver là, au milieu de doctorants et de professeurs. Ce prix montre que ce qu’on nous enseigne, c’est du sérieux!»

Si tous ont légitimement mérité leurs lauriers, rendus en terre vaudoise le 17 mai dernier, force est de constater que la méthode d’enseignement de Thibaud Rossel fait mouche, depuis son arrivée à l’EMSp, en 2013. Très vite, le prof de chimie originaire du Plateau de Diesse s’est mis en tête de faire de la recherche avec ses élèves. «Ce que les étudiants ne sont pas habitués à faire au niveau gymnasial», fait remarquer l’enseignant de 36 ans.

Grâce à des méthodes bon marché, accessibles pour le secondaire II et faciles à réaliser, il a déjà fait main basse sur d’autres prix, comme en 2016 pour un poster, alors que lui et ses élèves concourraient contre des universités, ou encore en 2018 avec le Prix Balmer décerné par la Société suisse de chimie pour son enseignement innovant.

Une usine à lauréats, l’EMSp? «Disons que cette méthodologie, collaborative et basée sur la pratique, est très performante. On obtient vite des résultats par le biais de la chimie combinatoire», détaille Thibaud Rossel.

Pour (essayer de) faire simple, les quatre étudiants ont testé et testent encore des capteurs, histoire de voir lesquels se colorent au contact du glyphosate, un projet qui a démarré début janvier. Pourquoi cette substance?«Car, en cours, on parle de molécules importantes dans la société. Et le glyphosate a fait consensus. J’ai amené l’idée et elle a vite été acceptée», raconte l’enseignant.

Un prix dûment réinvesti
Avec ces 10'000 francs ramenés grâce à Kyrian Engel, Maya Mischler, Valentin Picard (les deux de Saint-Imier) et Gabriel Di Lullo (Orpond), Thibaud Rossel compte doter l’école d’une station de pipetage automatisée, histoire de gagner du temps et de permettre à ses ouailles de travailler avec des technologies de pointe. D’autre part, le docteur en chimie bioinorganique souhaite diffuser plus largement le kit de recherche qu’il a élaboré. Il serait en effet contre-productif de ne pas laisser d’autres enseignants en profiter.

Voilà pour cette troisième place. Et les deux premières, vous dites-vous? Eh bien les grands vainqueurs sont un géographe du Collège Saint-Michel de Fribourg et ses élèves, pour leur analyse des pratiques de mobilité douce dans les collèges de la ville, et le deuxième est allé à l’Ecole cantonale de Soleure pour sa manière innovante, soit plus souple, d’enseigner.

Articles correspondant: Région »