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Industrie

Reprise teintée d’incertitudes

La Chambre d’économie publique du Jura bernois indique dans son nouveau baromètre que la tendance est à la hausse. Mais des contraintes sont tapies dans l’ombre.

Les prévisions des entreprises sont positives malgré leurs disparités. CEP

Par Dan Steiner

Comme l’Euro de foot n’est pas encore terminé, on s’autorise un parallèle footbalistico-industriel. Imaginez cette remontada du secteur secondaire. Celui-là, après une mauvaise première mi-temps, en 2020, a refait son retard jusqu’à niveler le score. Surfant sur une vague qu’on peut enfin considérer comme positive, l’industrie régionale s’imagine tout à fait prendre l’avantage en fin de période 2021. Les signaux sont au vert, en tout cas selon les entreprises elles-mêmes, dont le baromètre est fourni à intervalle régulier par la Chambre d’économie publique du Jura bernois (CEP).

Attention toutefois, car, dans le rôle de la VAR, empêchant tout excès de confiance même après un superbe contre mené à bien, on retrouve des adversaires coriaces comme la rupture de la négociation relative à l’accord-cadre avec l’UE ainsi que le renchérissement des matières premières. A tout moment, donc, l’embellie peut-être déclarée hors-jeu...

Coup de sifflet final pour cette parenthèse. «Entrées de commandes, résultats opérationnels, investissements et développement des entreprises affichent des tendances positives», résume moins sportivement Patrick Linder. Pour le directeur de la CEP, qui a présenté ce matin les orientations que devrait prendre l’industrie jurassienne bernoise au troisième trimestre, «les fondements de la reprise restent fragiles». Pour que cette dernière se confirme, il faut que la consommation globale se normalise et que la confiance soit soutenue, surtout du côté des grands donneurs d’ordre. «Après la phase de bas régime débutée à l’été 2020, cette période favorable reste directement inféodée aux tendances de l’économie mondiale, elles-mêmes largement conditionnées par la pandémie.»

Investir, c’est continuer d’innover

Quand on gratte sous la surface, on observe que les prévisions des entreprises sont positives malgré leurs disparités, que ce soit au niveau de leur(s) spécialisation(s) ou de leur domaine d’activité. D’ailleurs, la résilience des boîtes régionales, couplée aux RHT, a permis «d’éviter des lésions trop profondes dans le tissu industriel», souffle le directeur de la CEP. De plus, les entrées de commandes sont plus importantes qu’envisagées. Au pire les volumes d’affaires se maintiennent, au mieux ils se déploient. Cela promet une augmentation de l’activité, notamment pour les petites entreprises, synthétise la CEP.

Côté performances financières, le trend est moins marqué, mais une éclaircie est aussi attendue. «La capacité à générer des marges est pourtant au cœur de l’attention, car elle déterminera la manière dont les entreprises recouvreront leurs forces à l’issue d’une période incertaine. Une marge nette suffisante pour assumer les engagements pris pendant la crise (prêts Covid) et rattraper les investissements est donc nécessaire sur une longue durée.»

En parlant d’investissements, ceux-là aussi repartent à la hausse. Une bonne nouvelle quand on sait que, dans l’industrie de précision, cette variable conditionne celle des capacités d’innovation. «Les volontés d’investissement montrées par les plus petites entités traduisent une volonté ferme de maintenir la compétitivité», précise Patrick Linder.

Incrédulité par rapport à l’échec des négociations avec Bruxelles

Comme de coutume, la CEP a également interrogé son panel sur une thématique précise. Cette fois, les firmes se sont exprimées sur la sortie de la crise. Première contrariété: les incertitudes sanitaires globales et leur levée. Or l’institution précise que ce n’est pas tant la lassitude en matière de mesures imposées que le retour de l’économie mondiale à un fonctionnement normalisé qui préoccupe les acteurs industriels. A ce titre, les voyages d’affaires ou de prospection sont, bien que possibles, toujours entravés.

Par ailleurs, la raréfaction des matières premières ne fait pas particulièrement peur aux entreprises. C’est davantage la hausse importante des prix, couplée à des difficultés d’approvisionnement ou l’allongement des délais, qui pourrait compromettre cette belle séquence. Et puis, bien sûr, il y a les inquiétudes vis-à-vis de l’Europe, principal marché de l’économie nationale. «Le non-renouvellement de l’accord sur les normes de machines-outils, arrivant à échéance en 2023, serait dévastateur pour tout l’écosystème de production régional. Il faut appeler le Conseil fédéral à assumer les conséquences de sa décision et à engager toutes les forces diplomatiques pour minimiser les conséquences sur les PME et l’emploi», boucle Patrick Linder.

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