Situation critique autour du lac de Bienne

Julien Graf

La limite est virtuelle. Mais ses conséquences sont, elles, bien réelles. Hier à 15h30, le niveau du lac de Bienne a passé la barre des hautes eaux fixée à 430,35mètres et a localement débordé.

«Depuis dimanche soir, le niveau d’eau du lac a encore augmenté d’environ 40 centimètres», a fait savoir le préfet de Bienne, Philippe Chételat hier soir. «La situation reste critique d’autant qu’aucune amélioration n’est attendue ces prochains jours. Malgré la fin des précipitations, le niveau devrait continuer de monter jusqu’à au moins mercredi mais impossible de savoir dans quelles proportions. Dans tous les cas, il restera très élevé durant toute la semaine.»

Si pour l’heure aucun blessé, ni aucun gros dégât ne sont à déplorer, la préfecture a interdit toute navigation sur le lac dès ce matin à 8h et jusqu’à nouvel avis. La mesure est valable sur le lac, l’ancienne Thielle, le canal de la Thielle ainsi que sur le canal de Nidau-Büren jusqu’au barrage de Port. «Par mesure de précaution mais aussi de protection de la nature, nous voulons éviter que les vagues provoquées par les bateaux ne provoquent des dégâts le long des berges», a souligné Philippe Chételat.

Toujours plus d’eau

Comment en est-on arrivé à pareille situation? Dans la nuit de dimanche à hier, de nouvelles précipitations se sont abattues notamment dans le bassin de la rivière Emme. Pour empêcher que le niveau de l’Aar en aval du lac de Bienne ne monte constamment, l’ouverture des écluses à Port a dû être réduite.

Le niveau du lac de Neuchâtel étant aussi monté, les masses d’eau du lac de Bienne n’ont pas pu s’y déverser en quantités suffisantes. «Il y a toujours plus d’eau qui afflue qu’il s’en échappe», a précisé au Bieler Tagblatt Bernhard Schudel, chef de la régulation des eaux à l’Office cantonal des eaux et des déchets.

Pompiers sur le qui-vive

ABienne, 35 à 40 membres des sapeurs-pompiers ont été mobilisés hier, épaulés par des membres de la Protection civile. Des sacs de sable ont été préventivement apposés devant le restaurant Joran pour éviter tout risque d’inondation. Des précautions supplémentaires ont aussi été prises à la piscine de Nidau: les barrages orange de protection contre les crues ont été rehaussés. En cas de débordement du lac, l’eau pourrait endommager les installations techniques du bassin.

Au Beau-Rivage, les passerelles en bois permettant de cheminer en direction du restaurant Capriccio étaient submergées tout comme les Prés-de-la-Rive, le Pré Neptune et les rives de l’ancienne Thielle.

Tunnel inondé à Boujean

Les hommes du feu sont aussi intervenus hier matin aux Champs-de-Boujean pour évacuer des milliers de mètres cubes d’eau s’étant infiltrés dans le tunnel duLängholz, actuellement en construction dans le cadre du chantier de l’A5. Au total depuis dimanche, les sapeurs-pompiers et la Protection civile ont procédé à 24 interventions autour du lac, la plupart pour des caves inondées.

Les sapeurs-pompiers ont également été appelés hier à une dizaine de reprises pour pomper des caves inondées au centre-ville biennois. «Par chance, le débit de la Suze a faibli lundi. Elle n’est donc pas sortie de son lit», a relevé Didier Wicht, commandant du corps régional des sapeurs-pompiers de l’agglomération biennoise. Ces derniers surveillaient également de près différents «points chauds» comme le passage sous-voie en gare de Douanne.

A La Neuveville, le lac a localement débordé, notamment devant l’hôtel du Rousseau. Les berges de Douanne et Lüscherz ont entre autres connu le même sort, l’eau s’engouffrant jusque dans des propriétés.

Situation critique à Cerlier

La situation était également tendue de l’autre côté du lac, notamment au camping de Cerlier. Face à la montée des eaux, les intérieurs d’une quarantaine de caravanes menaçaient hier après-midi d’être inondés. Pareils scénarios s’étaient déjà produits en 2005 et 2007 à cet endroit très exposé au risque de crues.

«Nous avons averti nos clients situés en zone dangereuse qu’ils devraient éventuellement être évacués. Il ne nous reste qu’à prier pour éviter le pire», a soupiré Georges Meroni, gérant du camping et responsable du port de la localité.

Dans le Jura bernois, la route de la Roche St-Jean restera fermée jusqu’à nouvel avis. L’Office des ponts et chaussées du canton a estimé hier que le niveau des eaux de la Birse était encore trop élevé pour lever cette mesure. «Il n’a pratiquement pas baissé depuis dimanche», a précisé Wesley Mercerat, chef de l’inspection des routes du Jura bernois. «Un nouveau point de la situation est prévu ce matin.» La route a été fermée vendredi à la suite des fortes pluies qui ont fait déborder la Birse.