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Moutier

Un combat en mouvement perpétuel

Le Groupe Bélier, dont l’adresse mentionne «CH-2710 Tavannes (Jura)», a renouvelé ses vœux d’agrandir le plus jeune canton suisse. Mais sa priorité reste le rapatriement de la Prévôté. Puis de Belprahon.

Malgré les apparences, la jeunesse jurassienne était bien présente, hier, pour écouter Marcel Winistoerfer. Photo: Stéphane Gerber

Par Dan Steiner

«Du lac de Bienne aux portes de la France; l’espoir mûrit dans l’ombre des cités», dit la Nouvelle Rauracienne. Plus loin: «Demain nos cris, nos chansons et nos danses; célébreront la fin de nos combats.» Leur fin, vraiment? Une fois, peut-être, mais pas pour tout de suite. Main dans la main dans la Sociét’halle de Moutier, les «fils de la Rauracie» ont en effet confirmé que cette lutte avait tout d’un mouvement perpétuel.

Avant que la 55e Fête de la jeunesse jurassienne (FJJ) ne se mette en branle, hier soir, le Groupe Bélier avait réuni la presse locale pour faire le tour des préoccupations autonomistes actuelles (lire ci-dessous). Et il ne s’en est une nouvelle fois pas caché: «Sur le long terme, nous visons à déplacer la frontière entre le Jura et Berne là où elle aurait toujours dû se trouver:près de et dans le lac de Bienne. La région est francophone, avide de liberté, et culturellement bien distincte du canton de Berne, qui est germanophone et traditionaliste.»

Mais ça, c’est pour plus tard, ont avoué Jonathan Gosteli, dont c’était la première FJJ en tant qu’animateur du Bélier, et Caroline Branca, conseillère de ville rauraque et l’une des nouvelles adhérentes dudit groupe. Car d’abord, c’est Moutier. Puis Belprahon.

Il croit en la justice bernoise
C’est d’ailleurs à Sandrine Flückiger, membre du comité «Belprahon dit oui», que la tribune de la partie politique de la fête s’est offerte en premier. Comme d’autres orateurs, elle a tenu à rappeler que l’Ours était le seul à ne s’être pas encore rendu à l’évidence:«Le sort de Belprahon et celui de Moutier sont étroitement liés et nous sommes là pour le lui rappeler.» En guise de preuve, la jeune femme a évoqué l’argument principal du camp projurassien dans ce village du Cornet, à savoir que celui-ci aurait dû se prononcer une fois le sort de la cité prévôtoise scellé. «Chacun comprend qu’un tel vote ne peut pas être validé.»Là aussi, le combat continue.

Egalement passé derrière le pupitre, sur lequel on pouvait lire «Ici, c’est Moutier, cœur du Jura, ville jurassienne», Marcel Winistoerfer est revenu sur ses propos tenus au même endroit, l’an dernier. Soit avant la décision de la préfète. Le maire local a confirmé que c’est bien la jeunesse qui détenait les clés de «notre affaire».  «Alors, aujourd’hui, presque deux ans après le vote et une victoire aussi merveilleuse qu’extraordinaire, il est terriblement injuste d’attendre encore une confirmation d’une autorité judiciaire.» Indépendant, le Tribunal administratif? «Nous verrons si, une fois, un Bernois réussira à nous surprendre. Personnellement, j’y crois et ce n’est pas que de la naïveté.»

Son mot d’ordre dans le magazine Moutier.ch, les scrutins de Peseux et Tolochenaz, l’affaire du Laufonnais, tout y est passé. «Jeunesse, nous ne nous laisserons jamais reprendre cette victoire!» a-t-il conclu.

Jeunesse audacieuse mais sage
En fin de partie politique, on a encore entendu Jonathan Gosteli revenir sur l’affaire des caisses noires, de la bonne ambiance qui, finalement, règne à Moutier, ou des effectifs de son groupe, «en large augmentation». Plus jeune député au Parlement jurassien, Quentin Haas (PCSI, 27 ans) s’est, lui, bien gardé d’évoquer la Question jurassienne. Pour évter de se mouiller, il a plutôt vanté le côté audacieux de la jeunesse. Sage décision.

Ensuite de quoi, la fête fut belle. Elle l’aurait certainement été encore plus si le HC Bienne (lire en page 11 de l'édition du 8 avril) avait eu l’idée d’envoyer l’Ours supposément mal léché en vacances. Bon, comme l’a répété le Bélier hier, chaque chose en son temps. Un revira, mardi soir?

Un large survol des sujets, mais peu de nouveautés
Avant de festoyer et de prêcher les convertis lors de la partie officielle, le Groupe Bélier s’est entretenu entre quatre yeux avec la presse. Situation du Jura sud, dans lequel «la cité prévôtoise est retenue captive»; décision aux «motifs vagues et insuffisants» de la préfète; élections municipales en guise de «rappel fier et définitif que la ville de Moutier est jurassienne, de cœur et bientôt de fait»; situation sereine en ville malgré «le flot constant et monotone des lamentations» bernoises; «tentative humoristique pour rafraîchir l’humeur en berne des Bernois» au travers du projet Réconciliation; fête du 16 Mars ou dernier Conseil de ville. Bref, tout y est passé, mais, finalement, peu de choses ont été avancées qu’on ne savait déjà.

On notera toutefois une petite exception, soit celle de la célébration des 40 ans du Jura, qui aura lieu du 21 au 23 juin, et qui coïncide avec les 45 ans du vote de 1974. Une bonne occasion pour le Groupe Bélier de fêter l’entrée en souveraineté, pensez-vous? Eh bien c’est (presque) tout le contraire, s’est renfrogné Jonathan Gosteli, son animateur. «Nous déplorons que les mouvements qui ont œuvré à la création du canton ne soient pas conviés.» Et de citer le Mouvement autonomiste jurassien (MAJ), l’Association féminine de défense du Jura et, bien sûr, le Bélier. Qui donc pour prendre leur place? La Confédération et... Berne. «Il nous semble qu’inviter le canton à manger des petits fours dans la halle-cantine de Saignelégier est en conflit complet avec l’esprit qui a présidé à la création du Jura», s’est notamment plaint l’animateur.

Présent dans l’assistance, le rédacteur en chef du Jura libre – dont vient de paraître le 3'000e numéro – et secrétaire du MAJ, Pierre-André Comte, a tenu à souligner que le MAJ, «n’avait pas encore reçu d’info selon laquelle nous n’étions pas invités». Autrement dit, on garde espoir. Le Bélier, lui, semble un peu moins confiant. Un revirement de situation, ce printemps?

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