Un projet salué et salutaire

Par Nicole Hager

En concevant son projet de rénovation, Julien Pedrocchi avait dans l’idée de réaliser une habitation efficiente en énergie, pas de glaner plusieurs trophées bioclimatiques. C’est en cours de planification que les excellentes performances de son bâtiment l’ont convaincu de viser une double labellisation. La transformation projetée est devenue un modèle d’exemplarité. Le Prévôtois, actif au sein d’un bureau d’architecture et d’ingénierie développant des solutions de bâtiments efficients en énergie, figure aujourd’hui parmi les rares propriétaires de Suisse romande à disposer d’une maison certifiée Minergie-A, Minergie-P et de leur complément ECO. Son projet a reçu ses certifications avant-hier.

Confort thermique
A première vue, la transformation réalisée à Moutier ne se distingue guère de ce qui peut se faire actuellement en matière de rénovation de qualité.

L’apparence et la volumétrie d’origine de l’ancienne ferme et de ses dépendances, longtemps laissées à l’abandon, ont été conservées. Les lieux ont été dûment isolés thermiquement, de nouvelles fenêtres et de grandes baies vitrées posées. Les équipements qui font la différence, d’un point de vue thermique, se trouvent sur le toit ou dans les locaux techniques. L’objectif d’indépendance énergétique a été rendu possible par l’installation d’un poêle compact, de 60 m2 de panneaux solaires photovoltaïques couplés à une batterie de stockage. Celle-ci emmagasine l’énergie produite par les panneaux et la restitue quand les circonstances l’exigent, plutôt de nuit, par ciel couvert ou lors de pics de consommation.

La production d’eau chaude et le chauffage sont, quant à eux, assurés par une pompe à chaleur air-eau. La maison de la famille Pedrocchi est également dotée d’un système de ventilation qui renouvelle constamment l’air intérieur. Inutile d’ouvrir les fenêtres pour aérer. En hiver, on évite ainsi de refroidir l’intérieur.

Maison sans solvants
Pour obtenir le label ECO, il a fallu tenir compte de bien d’autres critères. «A la différence des labels Minergie qui mesurent le degré de confort et d’efficacité énergétique, le label ECO se préoccupe de la santé des occupants, de l’écologie du bâtiment et de son cycle de vie», explique Nicole Perrenoud, spécialiste chargée de la certification des bâtiments Minergie, Minergie-P et Minergie-A ainsi que du support ECO.

Cette certification prend en considération divers éléments comme une bonne utilisation de la lumière du jour, une maîtrise des nuisances sonores, la minimisation des charges polluantes, la flexibilité de la construction ou encore la limitation de l’énergie grise, soit l’énergie utilisée tout au long du cycle de vie d’un matériau ou d’un produit, de sa production à son recyclage. Les matériaux de construction utilisés doivent, en outre, provenir de préférence de Suisse, pour limiter les transports. Au mieux, il s’agit de matériaux recyclés ou facilement recyclables et il s’en dégage un minimum d’effluves toxiques (solvants, formaldéhyde, ...).

Julien Pedrocchi en convient, il n’a pas été évident de respecter les exigences de certification. «Pour la cuisine, par exemple, aucun cuisiniste de la région ne pouvait nous garantir que le bois utilisé était certifié FSC ou exempt de formaldéhyde. Nous avons finalement décidé de faire réaliser une cuisine en tôle. Le choix des matériaux, en particulier des peintures, a aussi posé problème. Certains fournisseurs étaient incapables de nous en donner la composition.» D’où cette recommandation sous forme de boutade: «Si vous envisagez un bâtiment ECO ne le peignez pas!»

Le climat intérieur de l’habitation a été soigneusement étudié pour parvenir à une bonne utilisation de la lumière du jour, à la maîtrise des nuisances sonores ou encore à la minimisation des charges polluantes.

Surcoût limité
Une construction de ce type entraîne un surcoût. «Il se limite au 15000 francs investis pour la ventilation», soutient le professionnel du bâtiment et maître d’œuvre. Ce dépassement est récupéré en quelques années d’occupation puisqu’il n’y a plus à s’affranchir de charges énergétiques.

La famille de Julien Pedrocchi a emménagé il y a une année dans la ferme Derrière-les-Crêts, perdue au milieu des champs. Elle s’y sent bien. Le confort et la qualité de l’habitat que Minergie s’est employé à certifier, elle le vit au jour le jour.

Pourquoi labelliser un bâtiment?
Construire Minergie peut rapporter, assure Nicole Perrenoud, spécialiste chargée de la certification des bâtiments. «Une labellisation peut donner droit à des subventions cantonales, voire communales, selon les lieux, ainsi qu’à des taux hypothécaires préférentiels. Le bâtiment certifié gagne aussi en valeur, et peut être vendu ou loué plus cher.»

Un bâtiment certifié Minergie remplit des exigences supérieures à la moyenne en termes de qualité et d’efficacité énergétique. Il est plus efficace sur le plan énergétique et de meilleure qualité qu’un bâtiment construit ou rénové de manière traditionnelle.
Minergie-P désigne des constructions à basse consommation d’énergie, garantissant un confort très élevé grâce à une excellente enveloppe du bâtiment. Les besoins en énergie pour les aspects thermiques sont quasiment nuls, et le confort est optimal en hiver comme en été. Il ne fait jamais trop chaud ou, à l’inverse, trop froid.

Minergie-A combine tous les aspects cités précédemment avec une autonomie énergétique maximale. En se basant sur une bonne enveloppe du bâtiment et des installations techniques optimisées, et grâce à une installation photovoltaïque combinée à une batterie ou à un système de gestion, les bâtiments Minergie-A produisent plus d’énergie qu’ils n’en consomment.

La performance énergétique n’est plus le seul objectif visé par le label suisse Minergie, créé il y a 20 ans. D’autres critères sont depuis pris en compte, ce qui a donné lieu au développement du complément ECO. Celui-ci garantit l’utilisation de matériaux particulièrement respectueux de la santé et de l’environnement, ainsi que le recours à des méthodes de construction durable.