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Electricité

Une première étape franchie

Le dernier élément du transformateur de Mühleberg est arrivé à bon port. Avec la hausse de la tension à 380 kilovolts sur la ligne Bassecourt-Mühleberg, il permettra d’assurer la sécurité d’approvisionnement.

Pesant quelque 170 tonnes, le dernier élément du transformateur a été acheminé par un convoi spécial de 75 m de long jusqu’à Mühleberg. Placé sur une remorque de 26 essieux, il était tiré par un camion et poussé par deux véhicules. LDD

Par Philippe Oudot

Jusqu’à sa mise à l’arrêt définitive, le 20 décembre 2019, la centrale nucléaire de Mühleberg (CNM) produisait environ 3000GW/h    d’électricité, soit 5% de la production suisse. De quoi couvrir la consommation de 700000foyers.

Si cette perte de production n’a pas posé de problèmes durant l’hiver dernier, qui était plutôt doux, cela pourrait s’avérer plus problématique en cas de forte hausse de la consommation. Dans la région de Berne, c’est BKWqui est responsable pour approvisionner les consommateurs finaux et qui doit donc compenser la perte de production de la CNM. De son côté, Swissgrid, la société qui exploite le réseau à très haute tension, met à disposition l’infrastructure pour permettre l’importation d’énergie.

Augmenter les capacités
Pour garantir cette stabilité et l’approvisionnement électrique de l’agglomération bernoise à moyen et long terme, Swissgrid a pris en compte la perte des centrales nucléaires dans son «Réseau stratégique 2025», indique Stephanie Bos, responsable de la communication de Swissgrid. Jusqu’à présent, l’absence d’alimentation de la CNM a pu être compensée par une hausse de la production des centrales du pays et par l’importation de courant.

Mais pour assurer la stabilité du réseau à moyen et à long terme, Swissgrid a besoin, d’une part, d’augmenter de 220 à 380 kilovolts (kV) la tension de la ligne Bassecourt-Mühleberg. Et d’autre part, d’y construire un nouveau transformateur, installé à côté de la centrale hydroélectrique de Mühleberg. Le premier coup de pioche de cet ouvrage a été donné en janvier 2018. Il doit permettre de convertir l’énergie électrique du réseau à très haute tension afin qu’elle soit utilisable par les consommateurs.

Monstre d’acier
Le dernier des quatre éléments du transformateur est arrivé sur place la semaine dernière. C’est un convoi exceptionnel de près de 75mètres de long, composé d’une remorque de 26essieux tirée par un camion et poussé par deux véhicules, qui a assuré le transport de ce dernier élément, du port de Bâle jusqu’à Mühleberg. Un monstre d’acier de quelque 170tonnes mesurant approximativement 11mètres de long, près de 3,6mètres de large et 4,5 de haut.

Si le transformateur sera prêt à fonctionner à fin novembre, il ne sera pleinement opérationnel que lorsque la tension sur la ligne Bassecourt-Mühleberg aura été portée à de 220 à 380kV. Pour cela, souligne Stephanie Bos, il s’agit de «moderniser la ligne sur les pylônes existants, ce qui ne changera pas le paysage. Des travaux sont prévus sur 54 pylônes sur un total de 142.»

Il faudra ainsi renforcer les fondations, installer des doubles chaînes de haubanage et augmenter la tension des câbles. Techniquement, ces mesures pour augmenter la tension peuvent être mises en œuvre en peu de temps, car cette ligne de 45km, construite en 1978, a été conçue pour une exploitation avec une tension de 380kV, même si, jusqu’à présent, elle ne l’a été qu’à 220kV. Cette hausse de la tension n’augmentera que faiblement les émissions de bruit.

Mais ce projet a pris près de deux ans de retard par rapport au planning en raison de diverses oppositions, dont celle de la commune de Valbirse, déposée devant le Tribunal administratif fédéral (TAF). La ligne passant à proximité immédiate d’un quartier d’habitation, les autorités avaient notamment demandé de déplacer deux pylônes, en raison des risques de cancer que pourraient provoquer les champs magnétiques induits par le courant.

La semaine dernière, le TAF a rendu son verdict et rejeté toutes les oppositions. Il a en effet considéré que l’augmentation de la capacité de la ligne ne violait pas la législation en matière de protection de l’environnement et de construction des lignes électriques.

Si le TAFreconnaît que le relèvement du voltage induit une augmentation de l’intensité du champ électrique, il estime que «les mesures prises par Swissgrid permettent de respecter les valeurs limites prescrites par la législation». Il note par ailleurs qu’il faut distinguer le champ électrique du champ magnétique généré par les lignes, dont le rayonnement ionisant peut effectivement avoir des effets néfastes sur la santé. Mais en l’occurrence, relève le tribunal, le champ magnétique respecte les prescriptions.

Lecture juridique
Conseiller communal en charge du Dicastère aménagement du territoire, urbanisme, environnement, énergie et transports, André Rothenbühler se dit déçu du verdict du TAF, qui a fait une lecture très juridique du dossier, en ignorant les arguments avancés par les autorités de Valbirse en termes de santé publique. «Ce sera un des points à l’ordre du jour de la prochaine séance du Conseil communal. Nous avons bien sûr la possibilité de faire recours au Tribunal fédéral (TF), mais à titre personnel, je pense que cette démarche n’en vaut pas la peine, car le TFse prononcera lui aussi sur la question du respect des bases légales. Mais je n’ai pas de regret d’avoir saisi le TAF: nous devions bien cela à nos concitoyens.»

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