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Jura bernois

«Une région prospère, innovante et cohérente»

La CEP a dévoilé hier sa Stratégie économique 2030. Elle s’appuie sur un large soutien de tous les acteurs économiques et institutionnels de la région, ce qui lui confère une grande légitimité.

La CEP était présente en force hier pour dévoiler sa Stratégie économique 2030. Stéphane Gerber

Par Philippe Oudot

C’est une véritable profession de foi que la Chambre d’économie publique du Jura bernois (CEP) a présentée hier à Bévilard en dévoilant sa Stratégie économique: à l’horizon 2030, le Jura bernois sera une région de technologies prospère, innovante, dotée d’une identité propre, cohérente, reconnue et rayonnant en Suisse et dans le monde au travers de ses compétences. (voir «La Vision 2030» ci-dessous).

Preuve de l’importance de cet événement, le conseil de direction de la CEPétait quasi au complet hier pour présenter ce document. «Cela démontre que notre vision stratégique n’est pas celle de son président ou de son directeur, mais qu’elle est portée par toute notre équipe», a d’emblée relevé le président Richard Vaucher. Cette stratégie concerne la région dans son ensemble, et pas seulement son économie, et «c’est la vision vivante de ce que le Jura bernois peut être à l’avenir», a-t-il poursuivi.

En gestation depuis quelques années, cette stratégie globale doit désormais se concrétiser, a-t-il insisté: «Il est temps d’aller de l’avant et de jouer collectif! Osons nous réinventer!», a-t-il lancé. Au cours des trois prochaines années, ce cadre global sera suivi d’une stratégie fonctionnelle découlant de cette vision, qui sera mise en œuvre au travers de huit axes stratégiques choisis (voir «Les huit axes:des pistes développées dans la stratégie fonctionnelle»).

Achacun de se l’approprier
Directeur de la CEP, Patrick Linder a souligné que cette stratégie économique était une première dans l’histoire régionale. Elle a pour but d’effectuer une analyse générale, d’établir une vision, de définir des objectifs, de prioriser les projets, de fédérer les forces et d’élaborer des mesures pour faire du Jura bernois «une région de technologies prospère, innovante, cohérente et reconnue à l’extérieur». Elle doit aussi lui permettre d’émettre des revendications et des propositions à l’égard des pouvoirs publics en ce qui concerne l’élaboration et la mise en œuvre des conditions-cadres.

Si cette stratégie est bel et bien une vision coordonnée et idéale du développement économique régional, Patrick Linder a toutefois observé que «son succès dépendra de la place que les pouvoirs publics vont lui accorder et de l’appropriation qu’en feront toutes les forces de la région». Les entreprises, bien sûr, mais aussi les communes, les associations, ainsi que la population dans son ensemble.

Processus participatif
Patrick Linder a aussi observé que ce document était le fruit d’un large processus participatif et intégrateur. Si l’idée était dans l’air depuis quelque temps à la CEP, c’est l’été dernier, après le vote de Moutier, que les choses se sont mises en place. Lors d’une rencontre avec les principales associations régionales (CJB, Conférence des maires, Association régionale Jura-Bienne, Centre Jura, Jura bernois Tourisme, Chambre d’agriculture), tous ont convenu de la nécessité d’élaborer une stratégie pour permettre à la région de se développer, et ont chargé la CEPde piloter le projet.

Dans un premier temps, les travaux ont démarré au sein des sept commissions de la CEP (Stratégie, Industrie, Services, Infrastructures, Formation, Coaching et Club-entreprises), en collaboration avec Jura bernois Tourisme (JBT), avant d’intégrer progressivement les apports de différents acteurs économiques régionaux.

«Validée auprès d’acteurs clés de la région et d’experts, cette vision du développement économique régional à long terme est donc le fruit d’un large consensus, ce qui lui confère une très grande légitimité», a poursuivi le directeur de la CEP. S’inscrivant dans le prolongement de la Stratégie économique 2025 du canton de Berne, elle en constitue un approfondissement et une amplification et a reçu l’appui des autorités cantonales.

Haut lieu technologique
Le Jura bernois se définit donc en tant que région technologique prospère, innovante et cohérente. Au bénéfice de compétences industrielles de pointe, il exporte ses produits partout dans le monde, et cela depuis plus de 200 ans, a rappelé Patrick Linder. «C’est d’ailleurs une des régions parmi les plus industrialisées du pays, avec un secteur secondaire qui représente plus d’un emploi sur deux!»

Le directeur de la CEP a également noté que ce cadre conceptuel constituait les fondations qui permettront de concrétiser les objectifs définis dans les huit axes et seront mis en œuvre progressivement dans le cadre de la stratégie fonctionnelle. «Celle-ci constituera la déclinaison de cette grande vision dans des mesures ciblées, domaine par domaine, problématique par problématique.» Pour les prochaines années, la CEP s’engage à rester l’auteur, le garant et le principal contributeur de cette stratégie fonctionnelle.

Une première
Comme l’a relevé Patrick Linder, le document dévoilé hier constitue un projet unique au niveau régional. Il existe certes des analyses qui déclinent ce qui existe en matière de gouvernance publique, «mais à ma connaissance, c’est la première fois qu’on agrège ainsi les besoins dans une logique de partenariat entre le privé et le public.»

Cette stratégie sera diffusée tous azimuts pour qu’elle ait toutes les chances de devenir réalité: membres de la CEP autorités communales, CJB, Députation, députés, élus sous la Coupole fédérale, administration cantonale, etc. Qui plus est, la CEPa créé un site dédié (www.stratecojurabernois2030.ch), qui sera évidemment mis à jour régulièrement.

 

«Inclure toutes les forces vives!»

Richard Vaucher, la stratégie économique 2030 du Jura bernois veut donner une identité forte et cohérente à cette région, avec comme axe principal son tissu économique homogène et très performant. Mais comment y parvenir, sachant qu’elle a toujours été divisée, en particulier par la Question jurassienne?
Il est temps de tourner la page et de partir sur de nouvelles bases cohérentes. Nous partons du principe que cette question est résolue et que désormais, par son choix démocratique, le Jura bernois est une région homogène et cohérente au sein du canton de Berne. Nous devons travailler et nous réorganiser autour de dénominateurs que nous partageons, en définissant quels sont nos points communs, nos centres d’intérêt, les valeurs que nous voulons défendre, nos objectifs, afin de saisir les opportunités qui s’offrent à nous. Notre démarche consiste donc à nous regrouper autour de ces éléments de convergence, plutôt que traîner derrière nous les facteurs de division qui nous ont longtemps pénalisés. Mais ce sera un long processus, car nous n’avons pas eu vraiment l’habitude de nous concentrer autour d’objectifs communs. Aujourd’hui, nous estimons que le moment est opportun et que nous pouvons repartir sur de bonnes bases.

Conformément à votre stratégie, le Jura bernois veut renforcer sa collaboration avec son grand voisin biennois. La région est-elle assez forte pour traiter d’égal à égal, sans risquer de se faire avaler toute crue?
La première étape, c’est justement de renforcer le Jura bernois autour de ses bases solides. C’est une condition indispensable pour aller de l’avant. C’est d’autant plus important que le Jura bernois parle d’une seule voix que nous sommes une région, alors que nos interlocuteurs sont une ville, pour Bienne, et plus largement, des cantons pour nos voisins neuchâtelois et jurassiens. Si cette région est désorganisée, morcelée, qu’elle se présente comme un patchwork distendu, nous n’arriverons jamais à faire quelque chose de bien. Notre première démarche, c’est donc de rassembler tout le monde autour de ces buts communs, de nous organiser comme une agglomération, afin de pouvoir parler d’égal à égal avec nos voisins. Qu’il s’agisse de Bienne et de son agglomération, ou des cantons voisins. Le Jura bernois a besoin d’une identité cohérente et forte pour défendre ses intérêts.

Au-delà de ses ambitions économiques, la stratégie a l’ambition de fédérer non seulement tous les acteurs institutionnels, mais aussi la population. Comment faire pour qu’elle en soit aussi partie prenante?
La première étape démarre aujourd’hui, avec la présentation de notre stratégie économique! Nous allons diffuser ces informations au maximum grâce aux médias, mais aussi avec la collaboration de toutes les institutions concernées, qui doivent se l’approprier et la diffuser aussi largement que possible dans leurs propres cercles. Il s’agit d’inclure toutes les forces vives et de les rassembler autour des axes que nous avons définis! Prenez par exemple le tourisme. C’est un élément qui implique fortement la population, tout comme le domaine de la formation, qui concerne tout un chacun. C’est au travers de ces actions dirigées vers des buts communs qu’on veut faire participer la population pour qu’elle aussi se sente partie prenante de ce projet.

Le tissu économique dense et complémentaire de la région est un de ses atouts, mais aussi son talon d’Achille en période de crise. Renforcer le Jura bernois permettra-t-il de lisser l’amplitude des cycles économiques, et ainsi de mieux y résister?
Dans notre stratégie, nous insistons surtout sur la technologie, qui induit l’évolutivité de notre tissu industriel. C’est cela que nous voulons favoriser et mettre en avant. Notre industrie a toujours subi des crises, mais elle a aussi toujours su évoluer. D’où l’importance de s’orienter vers les nouvelles technologies, qui permettent aux entreprises d’être plus performantes et de s’adapter. Il faut donc soutenir tout ce qui permet une plus grande réactivité et assurer un suivi plus important au travers de la formation et des services, ceux-ci étant conçus pour être précisément au service de cette industrie. Tous ces éléments doivent permettre d’avoir un tissu industriel plus fort et plus cohérent et qui, au final, aura vraisemblablement une plus grande résistance aux cycles économiques. Bref, il faut voir que notre économie est un ensemble qui vise un but, le bien commun de cette région.

 

La Vision 2030

Hier, Patrick Linder a présenté la Vision 2030 comme étant «le cœur, le noyau incompressible de notre pensée»:

«Le Jura bernois est une région de technologies prospère, innovante, cohérente et reconnue.
»Matrice historique de compétences industrielles, connectée au monde par ses activités économiques, elle est pourvue d’infrastructures, de services, d’instituts de formation et d’offres touristiques adaptés.
»Organisée comme une agglomération, dotée d’un cadre naturel valorisé, autosuffisante grâce à sa production d’énergies renouvelables, elle relève du territoire bernois, collabore étroitement avec l’agglomération bilingue biennoise, interagit dans l’Arc jurassien industriel, s’inscrit dans l’espace culturel romand et rayonne en Suisse et dans le monde au travers de ses compétences.»

Et pour atteindre cette vision 2030, la CEP entend défendre une série de valeurs que sont la responsabilité, l’engagement et l’esprit d’entreprise; l’évolutivité et l’innovation; le développement durable et une économie en harmonie avec le cadre de vie; la compétitivité; la culture francophone du Jura bernois, son orientation vers la jeunesse, et enfin la qualité de vie et l’ouverture.

 

Les huit axes: Des pistes développées dans la stratégie fonctionnelle

Industrie et technologie Le secteur secondaire est le noyau de la stratégie économique du Jura bernois. Il constitue la meilleure option de développement économique grâce à des leaders technologiques compétitifs à l’échelle internationale et à son tissu de PMEcomplémentaires. Objectifs:assurer l’adéquation de l’environnement industriel aux besoins des entreprises; soutenir les capacités d’innovation et des conditions-cadres répondant aux besoins du secteur secondaire.

 Identité, culture, ouverture, rayonement Le Jura bernois et son économie ont besoin d’un positionnement clair au niveau cantonal, dans l’Arc jurassien, en Romandie et en Suisse. Cette identité doit soutenir son développement et son attractivité. Objectifs: élaborer des outils de promotion orientés vers la Suisse; contribuer à un cadre de vie harmonieux, prospère; soutenir l’existence d’une culture riche et vivante.

 Tourisme Partie intégrante de l’économie régionale, il offre des perspectives de développement et contribue à sa notoriété. Objectifs:développer des produits liés au tourisme industriel et culturel; soutenir les offres d’hébergement.

 Services Ce secteur propose des prestations indispensables au développement de l’industrie régionale. Il offre une plus-value essentielle à une industrie forte et joue un rôle majeur pour le succès de l’économie régionale. Objectifs: analyser les besoins du secteur secondaire, mettre en relation les acteurs du tertiaire avec l’industrie.

 Infrastructures, construction et artisanat Elle englobe les transports, l’énergie et l’aménagement du territoire, essentiels au bon fonctionnement de l’économie. Objectifs:mieux soutenir l’industrie et les autres activités économiques; défendre les besoins en transports.

 Formation L’offre et les structures doivent répondre aux besoins de l’économie régionale. Objectifs: pérenniser un centre de formation francophone dans le Jura bernois et à Bienne; valoriser les filières de formation professionnelle; prendre en compte les besoins des francophones.

 Agriculture et biodiversité Elle occupe une place historique et symbolique importante. Objectifs: soutenir l’adaptation de l’agriculture régionale; promouvoir une production alimentaire régionale de qualité, éthique et écologique.

 Organisation régionale et relations extérieures Partie francophone du canton de Berne, le Jura bernois interagit avec l’agglomération biennoise et l’Arc jurassien. Objectifs: organiser la région comme une agglomération; renforcer les relations et synergies avec Bienne; soutenir une offre de santé innovante dans le Jura bernois.

 

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