Une histoire de glace à transformer en métal

Christian Kobi

Une ville, un souvenir en tête, un goût en bouche, une odeur dans les narines. A l’évocation de Neuchâtel, Simona Aebersold n’hésite pas une seconde: «Je me souviens surtout y avoir mangé des glaces». Ce jour-là, l’athlète domiciliée à Brügg, à un peu plus de 30 kilomètres de là, n’était pas peu heureuse de retrouver une gelateria sur sa route lors de sa sortie à vélo. Mais la cité neuchâteloise, dans laquelle se tiennent les championnats d’Europe de sprint entre jeudi et dimanche, elle ne la connaît pas que pour ses coins gourmands. «J’y ai déjà effectué quelques entraînements de sprint, ce qui pourrait représenter un avantage dans les prochains jours.»

Une donnée qui alimente les espoirs. A Neuchâtel, pour ce qui constituera la première compétition internationale depuis l’automne 2019, Simona Aebersold sera l’atout phare  d’une ambitieuse délégation helvétique. Elle l’a prouvé, si besoin était, en remportant les trois épreuves de sélection interne qui se sont tenues au Tessin, il y a deux semaines, avant de s’adjuger le titre de championne de Suisse de sprint dimanche dans le canton de Bâle-Campagne.

L’attrait de la forêt
Deux bons tests, deux bonnes occasions de faire le plein de confiance. Et ça, la Seelandaise de 23 ans en avait bien besoin. Touchée par le Covid à la fin de son école de recrue pour sportifs d’élite, ce printemps à Macolin, elle a aussi dû composer avec une légère blessure musculaire au dos et au niveau de la hanche. «Je ne savais pas trop où me situer avant ces deux épreuves, lors desquelles je me suis sentie très bien techniquement et physiquement. Avant les Européens, l’objectif sera encore d’améliorer ma vitesse de pointe», lançait-elle dimanche, quelques instants après son sacre national.  

A Neuchâtel, Simona Aebersold s’attend à des épreuves très techniques et rapides, les deux caractéristiques principales du sprint. «Dans cette discipline, l’essentiel est de pouvoir lire la carte sans jamais perdre de vitesse», commente celle qui avoue sans ombrage préférer les terrains forestiers, sur des moyennes et longues distances, à ceux de la ville. «Il y a plus de variations dans la forêt, et le sens de l’orientation est davantage mis à contribution. En outre, les terrains peuvent être très différents selon les pays, avec des sols marécageux, des prairies, des paysages alpins ou des vallées. Les sprints, eux, sont partout un peu similaires.»  

Une manière pour elle d’évacuer la pression avant de démarrer les premiers Européens entièrement dédiés au sprint? Assurément. «Je serais contente avec un diplôme ou une médaille, quelle que soit la couleur», répète-t-elle. Lors de ses premiers et pour l’heure uniques Européens élites, en 2018 au Tessin, la fille du triple champion du monde Christian Aebersold avait remporté le bronze sur moyenne distance. Une année plus tard, lors des Mondiaux en Norvège, elle avait ajouté trois autres médailles à son palmarès, deux d’argent (relais et moyenne distance) et une de bronze (longue distance).  

Des vues sur Flims
De l’argent et du bronze. Habituée à tout rafler chez les juniors, Simona Aebersold attend encore de goûter à l’or chez les élites. Une simple question de temps. «Le sprint n’est peut-être pas la meilleure discipline pour y parvenir», admet-elle. «Je pense avoir de meilleures chances lors des Mondiaux de Flims, dans deux ans, qui se dérouleront uniquement en forêt sur moyenne et longue distances.»

C’est bien connu: dans la vie, les meilleures choses arrivent souvent au moment où on s’y attend le moins. Comme tomber sur une gelateria lors d’une sortie à vélo. Ou remporter, comme par enchantement, un sacre européen. Allez savoir!