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Athlétisme

Caroline Agnou à la hauteur

La jeune Biennoise s’est classée 22e de l’heptathlon aux championnats du monde de Pékin

Caroline Agnou manifeste sa joie après avoir pulvérisé son record au poids avec un lancer à 14m49. Keystone

Pékin, Alexandre Lachat

A 19 ans et trois mois, Caroline Agnou était la plus jeune des 36athlètes engagées dans l’heptathlon, ce week-end au Nid d’oiseau. Eh bien, pour sa première chez les «grandes», la petiote s’est rudement bien débrouillée. L’athlète d’Evilard a pris en effet la 22e place finale, avec un total de 5866 points.

C’est largement moins, certes, que ses 6123 points cumulés mi-juillet à Eskilstuna, lorsqu’elle avait conquis le titre de championne d’Europe junior. Mais son week-end suédois avait été surréaliste et il était quasi certain qu’ici à Pékin la jeune Seelandaise ne parviendrait pas à enchaîner les exploits comme elle l’avait fait en Scandinavie.

Un fameux lancer

N’empêche. Dans la chaleur moite de la capitale chinoise, Caroline Agnou s’est admirablement bien battue, établissant samedi deux nouveaux records personnels: 14m49 au poids et 25’’14 sur 200m. Auparavant, elle avait couru le 100m haies en 13’’93 et franchi 1m68 en hauteur. «Deux résultats corrects, sans plus», estimait-elle au terme de la première journée. «Je rate mon départ sur le 100 mètres haies, et tout le reste de ma course s’en ressent. A la hauteur, je manque de peu 1m71 à mon troisième essai.»

Elle a alors lancé son poids de 4kg à 14m49 à son deuxième essai, pulvérisant de 43 cm son record personnel (14m06). «Je tenais absolument à passer les 14 mètres.» Un jet digne d’une «grande»: dans cette discipline – qui ne rapporte malheureusement que peu de points, comparée aux autres –, la Biennoise a signé le sixième meilleur jet des 36 engagées.

Dans la foulée, elle a encore amélioré son record sur200m de 10 centièmes. «Un bon chrono», admet-elle, «mais mon entraîneur (réd: Adrian Rothenbühler) pensait que je pourrais descendre sous les 25 secondes.»

La seconde journée de Caroline Agnou, hier, s’est avérée moins prolifique: 5m97 en longueur, 43m15 au javelot et un bon 2’23’’33 pour finir, sur 800m. Total final: 5866 points. Le deuxième meilleur score de sa carrière, derrière les 6123 points d’Eskilstuna et devant les 5722 de Götzis, fin mai.

Direction Nouvelle-Zélande et… Rio?

«Je suis contente du score final», savourait la Biennoise,  son tour d’honneur avec les autres heptathloniennes achevé, maman Jessica Ennis-Hill en tête. «Je suis juste un peu déçue de la longueur, où je n’ai jamais eu la planche. Sur 800m, j’aurais bien voulu battre mon record également (réd: 2’22’’47 l’an dernier à Eugene).» Reste cette expérience, magnifique, inoubliable. «J’ai vu comment cela fonctionnait, ça me donne faim pour la suite.»

Caroline Agnou restera à Pékin jusqu’à dimanche pour suivre les compétitions et encourager le reste de l’équipe helvétique. Lundi prochain, elle s’envolera pour la Nouvelle-Zélande pour y perfectionner son anglais et – déjà – préparer la saison 2016, millésime olympique. Le billet pour Rio se négociera à 6200 points. Possible? Elle sourit. «Les JO, on verra plus tard. Je ne veux pas y penser ce soir déjà.» De toute évidence, son objectif 2016 est clair.

Kariem Hussein n’a pas à rougir de son élimination, son protêt a été rejeté

Une déception, c’est évident. Mais aussi une belle, une toute belle course. Eliminé pour trois fois rien, hier soir en demi-finales du 400m haies, Kariem Hussein n’a pas à rougir de sa campagne pékinoise. Le champion d’Europe, troisième de sa demi-finale en 48’’59, n’a loupé le train pour la finale de demain que de cinq centièmes au profit du Kényan Nicholas Bett, deuxième en 48’’54. Il fallait48’’46 ou moins pour être repêché au temps. Hussein ne l’a donc pas été. Dommage.

«Les championnats du monde ne sont pas comparables aux championnats d’Europe», souriait, déçu mais serein, un Kariem Hussein épuisé dans les couloirs du Nid d’oiseau. «Je finis neuvième. Un top10 mondial, ce n’est vraiment pas une mauvaise performance. Mais la déception est là, sûr.»

Hier soir, le Thurgovien est parti plus rapidement que la veille, en séries. Il a produit un formidable effort à l’entrée du second virage, est sorti en tête, a semblé pouvoir tenir le choc jusqu’au bout. Le dernier obstacle, abordé de sa mauvaise jambe, lui a été fatal. Le barbu Michael Tinsley est passé devant (48’’47), le Kényan Bett l’a suivi. Seuls les deux premiers passaient à la place.

La Fédération suisse a bien tenté de déposer un protêt contre Bett, coupable, selon elle, d’avoir empiété sur le couloir intérieur. Rejeté. «Oui, c’était une bonne course, vraiment. Mais il n’y a pas eu d’exploit», constatait Flavio Zberg, son entraîneur. «Kariem a une nouvelle fois démontré qu’il faudrait compter avec lui ces prochaines années.»

L’intéressé, du haut de ses 26 ans et de sa grande jeunesse, en est parfaitement conscient. «Je vais garder le positif de ces championnats du monde, qui étaient les premiers pour moi: l’expérience que j’ai acquise ici.» L’affaire s’est avérée extrêmement serrée hier soir: seuls 36 centièmes séparent Hussein du Russe Kudryavtsev, auteur du meilleur chrono (48’’23) de ces demi-finales. Une bonne raison d’espérer un exploit, l’an prochain, à Rio.

Belle matinée pour Kambundji, Sprunger et Fontanive

Trois sur trois! La matinée s’est avérée extrêmement favorable pour les athlètes suisses, hier à Pékin. Aussi bien Mujinga Kambundji (photo Keystone), sur 100m, que Lea Sprunger et Petra Fontanive, sur 400m haies, ont passé le cap des séries et se sont qualifiées pour les demi-finales d’aujourd’hui.

Certes, depuis que l’IAAF a instauré le système des trois demi-finales (en 2005 à Helsinki pour le 400m haies, en 2011 à Daegu pour le 100m), l’accession à l’avant-dernier tableau est moins difficile, 24 athlètes étant désormais conviées à la fête, contre 16 auparavant. N’empêche. La performance a bel et bien été au rendez-vous.

Quatrième Européenne Auteur une nouvelle fois d’un départ canon, mais auquel le reste de sa course n’avait rien à envier, Mujinga Kambundji a égalé son record de Suisse en 11’’17, ceci avec l’aide d’un vent assez généreux il est vrai, mais dans les normes (+ 1,5 m/s). Surtout, la Bernoise, deuxième de sa série derrière Kelly-Ann Baptiste (11’’13), a réussi l’exploit de laisser derrière elle la Jamaïcaine Sherone Simpson (11’’22), dont le record est fixé à 10’’82.

La preuve, encore une fois, que la protégée de Valerij Bauer, à Mannheim, est entrée dans une nouvelle dimension l’an dernier, grâce notamment à quelques kilos de muscles supplémentaires. «Je pensais que je pourrais courir vite, très vite ce matin», rayonnait la Bernoise après sa course. «Il le fallait d’ailleurs, vu la concurrence. Mais non, franchement, je ne pensais pas pouvoir égaler mon record.» Mujinga Kambundji disputera les demi-finales aujourd’hui à 13h40 (heure suisse).

Auteure du 17e chrono des séries (quatrième Européenne), elle n’a qu’une chance infime d’entrer en finale, vu l’extrême densité de la discipline. Elle peut en revanche espérer battre son record de Suisse.

Lea apprend vite Mission remplie également pour Lea Sprunger et Petra Fontanive, qui s’élanceront dans les demi-finales du 400m haies une demi-heure avant Mujinga Kambundji, à 13h10. Quatrième de sa série, la Vaudoise a profité de la chute de l’Italienne Pedroso sur l’ultime obstacle pour se qualifier à la place, mais avec un excellent chrono à la clé (55’’71); la Zurichoise, engagée dans la course la plus lente, s’est qualifiée à la place, au terme d’un tour de piste savamment géré (3e en 56’’40).

«Mon premier objectif est atteint avec cette qualification pour les demi-finales», lançait Lea Sprunger, très satisfaite, dans les travées du Nid d’oiseau. «A présent, je veux me placer dans le top16.» La capitaine de l’équipe de Suisse du 4x100m peut voir venir: ses 55’’71 d’hier, supérieurs de seulement 11 centièmes à son record personnel, la placent au 13e rang des séries. «Je ne pensais pas courir aussi vite, un chrono de 56’’0 m’aurait déjà comblée», avouait-elle.

Comme pour Mujinga Kambundji, une qualification pour la finale tiendrait de la sensation. «Quand je vois que mes adversaires gambadent déjà et que moi je n’ai pas encore récupéré, ça me rappelle que je suis toute nouvelle dans la discipline, et que j’ai encore beaucoup à apprendre», sourit-elle.

Un apprentissage qui passera obligatoirement par un rythme de foulées mieux maîtrisé: 15 pas entre les huit premiers obstacles hier, 16 entre les deux derniers. «Ma jambe d’attaque est la droite, je suis encore un peu faible de la gauche», concède-t-elle. Le travail technique de l’hiver prochain et ses 183 cm de stature pourraient lui permettre d’aborder les trois premiers obstacles en 14 foulées dès 2016. Un potentiel mondial, donc.

Le Pékin-express

Mo Farah puissance six Et de six pour Mo Farah! Samedi, le Britannique a une nouvelle fois dégoûté toute la meute kényane – dont il est le cauchemar – en s’adjugeant un sixième titre majeur sur les longues distances. Ebranlé ce printemps par les soupçons de dopage pesant sur son coach Alberto Salazar, Mo Farah (photo Keystone) n’a jamais tremblé et a remporté très facilement le 10 000m en 27’01’’13, grâce à sa formidable pointe de vitesse terminale.

Le Somalien d’origine aligne désormais six titres majeurs consécutifs à son palmarès: or sur 5000m en 2011 à Daegu (Mondiaux), or sur 5000m et 10 000m en 2012 à Londres (JO), or sur 5000m et 10 000m en 2013 à Moscou (Mondiaux), or sur 5000m en 2015 à Pékin (Mondiaux). Farah courra encore le 5000m samedi. Franchement, on ne voit pas qui pourrait l’empêcher d’apporter la preuve par sept.

Déconvenue pour Abraham Mis à part Kariem Hussein, Mujinga Kambundji, Lea Sprunger, Caroline Agnou et Petra Fontanive, trois autres Suisses étaient engagés ce week-end. En heptathlon, la Zurichoise Valerie Reggel a souffert le martyre: un genou droit opéré l’automne passé et encore très douloureux et trois essais nuls à la longueur. Zéro pointé!

Reggel a logiquement renoncé au 800m. Parfaitement dans le coup jusqu’à la mi-course (5e), Tadesse Abraham, quant à lui, a échoué au19erang final du marathon, samedi matin, en 2h19’24’’. Une douleur à l’aine et un ravitaillement manqué ont précipité la chute de l’Erythréen d’origine.

Ils ont aussi gagné Les autres titres du week-end sont revenus à l’Erythréen Ghirmay Ghebreslassie (marathon), à l’Allemande Christina Schwanitz (poids), à l’Espagnol Miguel Angel Lopez (20 km marche), au Polonais Pawel Fajdek (marteau) et à l’Américain Joe Kovacs (poids). Mention toute spéciale à la Britannique Jessica Ennis-Hill. Pour son retour à la compétition, la championne olympique en titre s’est imposée dans l’heptathlon après être devenue maman l’an dernier. Quelle femme!

Aujourd’hui

Finales (heure suisse)

13h05 Perche messieurs.
13h30 Triple saut dames.
14h35 10000 m dames.
15h15 3000 m steeple messieurs.
15h35 100m dames (avec éventuellement Mujinga Kambundji).

Les Suisses engagés

3h30 Perche dames (avec Nicole Büchler et Angelica Moser).
13h10 400 m haies dames, demi-finales(avec Petra Fontanive et Lea Sprunger).
13h40 100 m dames, demi-finales (avec Mujinga Kambundji).

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