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Environnement

Le changement climatique va causer davantage de décès dans le monde

Les experts dénoncent des effets directs et indirects sur la santé entre 2030 et 2050

Le réchauffement des températures s’accompagne de la propagation des épidémies de maladies infectieuses. Keystone

Delphine Touitou

Experts et médecins s’accordent à dire que le changement climatique a des effets directs et indirects sur la santé. Entre 2030 et 2050, il pourrait ainsi entraîner près de 250000 décès supplémentaires par an, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Cette sentinelle planétaire a déjà dressé le macabre bilan de ces futures victimes. Parmi ces morts, environ 38000 seraient dus à l’exposition à la chaleur des personnes âgées, 48000 à la diarrhée, 60000 au paludisme et 95000 à la sous-alimentation des enfants. Selon l’agence de l’ONU, le coût des dommages directs pour la santé se situe entre deux et quatre milliards de dollars par an d’ici 2030.

Lors de la canicule de l’été 2003 en Europe, plus de 70000 décès supplémentaires avaient été enregistrés.

«Comme tout phénomène de catastrophe lente, il n’y a pas une cause qui entraîne une seule conséquence. C’est un ensemble d’événements» qui sont susceptibles d’affecter la santé, résume le Dr Patrice Halimi, secrétaire général de l’association Santé Environnement France.
Il observe ainsi que ce n’est pas le réchauffement climatique qui conduit à une épidémie du choléra, mais celui-ci crée les conditions favorables à la survenue d’épidémies plus importantes.

«La difficulté est de mesurer la part exacte du réchauffement climatique dans les problèmes de santé. Nous sommes encore dans l’observation», note Robert Barouki, spécialiste de cette problématique à l’institut français Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale).

Canicule et catastrophes

Les températures caniculaires provoquent des décès par maladies cardiovasculaires ou respiratoires, en particulier chez les personnes âgées. «Il y a toujours eu des canicules, mais leur fréquence et leur intensité ont augmenté», analyse encore Barouki. Et plus d’ensoleillement signifie davantage de problèmes de peau liés à une exposition plus forte aux rayons ultraviolets (UV), qui peuvent conduire à des cancers de la peau, estime-t-il.

Même constat pour les catastrophes naturelles liées à la météorologie (inondations, ouragans). Avec un triplement depuis les années 1960, elles ont conduit à une surmortalité. «Chaque année, ces catastrophes ont provoqué plus de 60000 décès, principalement dans les pays en développement», estime l’OMS.

Les températures élevées favorisent également le développement de plantes allergisantes telles que l’ambroisie, qui devrait progressivement envahir toute l’Europe avec une concentration en pollens multipliée par quatre d’ici à 2050.

Davantage de dengue

«Le réchauffement favorise la propagation de maladies infectieuses qui dépendent de vecteurs tels que les moustiques», note le Dr Patrice Halimi. En France métropolitaine, sont ainsi apparus des cas de chikungunya transmis localement.

«Le changement climatique allongera probablement la saison de transmission de certaines grandes maladies à transmission vectorielle et modifiera ainsi leur répartition géographique. Selon les projections, la Chine, par exemple, connaîtra une extension sensible de sa zone d’endémie de la schistosomiase», poursuit-il.

Cette maladie parasitaire transmise par un ver touche plus de 200 millions de personnes dans les zones tropicales, selon l’OMS.

Le climat exerce aussi une forte influence sur le paludisme. Transmis par des moustiques du genre anophèles, il tue près de 800 000 personnes par an, indiquent encore les données de l’agence basée à Genève.

«Les moustiques du genre aedes, vecteurs de la dengue, sont également très sensibles aux conditions météorologiques. Selon certaines études, deux milliards de personnes de plus pourraient être exposées au risque de transmission de la dengue d’ici les années 2080», ajoute-t-elle.

Le réchauffement climatique est par ailleurs à l’origine d’une hausse des concentrations d’ozone (observées surtout en cas de fort ensoleillement). Celles-ci affectent les personnes souffrant de pathologies respiratoires chroniques telles que l’asthme.

Il augmente également la pollution aux particules fines, par le biais des feux de forêts qui devraient se multiplier et migrer vers le nord dans les années à venir, selon Bruno Housset, président la Fédération française de pneumologie.

Ces particules fines, capables de pénétrer profondément dans l’appareil respiratoire, peuvent favoriser le cancer du poumon et certaines maladies cardiovasculaires, mais également l’asthme. Environ 300millions de personnes souffrent d’asthme dans le monde, selon l’OMS.

«L’accroissement des températures devrait augmenter la mortalité» liée à cette pathologie. ATS

 

Grande chaîne humaine à Paris, marches en Suisse

La Coalition climat 21, regroupant 130 organisations, a dû renoncer à marcher dans les rues de Paris à la suite de l’interdiction de manifester imposée dans le cadre de l’état d’urgence décrété après les attentats du 13 novembre. Malgré tout, plus de 10000 manifestants ont commencé hier à former une chaîne humaine le long d’un boulevard de l’est parisien. Ils dénoncent «l’état d’urgence climatique» à la veille de l’ouverture de la COP21.

Nombre d’entre eux ont apporté des pancartes sur lesquelles on peut lire «Ils ne sont grands que si nous sommes à genoux» ou encore «Ils exploitent, ils polluent, ils profitent! L’urgence est sociale et climatique».

Un important cortège a serpenté hier dans les rues de Lugano. Keystone

Ailleurs dans le monde, des dizaines de milliers de personnes ont défilé en Australie, avant des rassemblements à Londres, Rio ou New York, au troisième jour de marches mondiales pour exiger un accord ambitieux à Paris. Depuis vendredi, des dizaines de manifestations sont ainsi organisées partout dans le monde pour réclamer des mesures fortes contre le réchauffement climatique.

Hier, 45000 personnes ont défilé à Sydney en Australie, 5000 autres plus au sud à Adélaïde tandis qu’un millier de manifestants ont bravé la pluie dans les rues de Séoul en Corée du Sud et qu’un rassemblement s’est tenu à Delhi en Inde.

Londres, Rio de Janeiro, New York ou Mexico devaient reprendre dans la journée le flambeau de cette mobilisation mondiale. En Suisse aussi, des milliers de gens ont participé à des marches: entre 2500 et 5000 à Genève, plus de 1000 à Berne sur la Place fédérale et plus de 1000 aussi à Zurich et Lugano notamment. ATS

 

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