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Les richesses du terroir (2)

C’est reparti pour un tour

Désormais incontournable dans le Jura bernois au mois de mai, la Fête de la tête-de-moine concocte déjà sa 4e édition.

De g. à d.: Bernard Leuenberger, David Gogniat, Olivier Isler, Jean-Marc Soldati, Markus Gerber, Jean-Pierre Froidevaux, Stéphanie Chouleur et Magali Ackermann. Photo: Stéphane Gerber

Par Dan Steiner

Notre région est riche en produits du terroir. L’occasion de proposer une série d’articles tout au long de cette année, en collaboration avec la Fondation rurale interjurassienne (FRI). Après un premier épisode le 22janvier –la charte et les lables de notre terroir–, place aujourd’hui à la tête-de-moine. Et à sa grande fête annuelle.

Une fois déclinée en fines rosettes, c’est peu dire que la tête-de-moine est un fromage aérien. Parrain de la 4e édition de la fête de cette AOP, produite par les moines de Bellelay depuis le 12e siècle déjà, Jean-Marc Soldati en sait quelque chose.

Le chef étoilé l’a même envoyée en l’air il y a quelques années. Pour le compte de la compagnie SWISS, ses créations culinaires avaient fait monter les passagers des classes business et first au septième ciel. Notamment avec de la tête-de-moine. «Les gens ne connaissaient pas forcément. Ils se sont demandé où elle était produite. Cela a contribué à faire connaître notre région», se rappelle le grand chef du Restaurant du Cerf, à Sonceboz, 16 points au Gault & Millau.

Bon, mais revenons tout de même sur le plancher des bovins, solidement attelés à brouter. «Oh la vache!» Tel sera en effet le thème de la Fête de la tête-de-moine, ode au(x) produit(s) de notre terroir, et désormais bien implantée dans le Jura bernois. Au mois de mai, comme à chaque fois depuis 2016, du 3 au 5 cette année en l’occurrence.

Un secret vachement caché
Ce matin, toutes les parties prenantes à la manifestation – Interprofession de la tête-de-moine, Chambres d’agriculture du Jura nord et sud, Fondation rurale interjurassienne (FRI), Jura bernois Tourisme et la commune de Saicourt – en ont fait le tour. A Bellelay, bien entendu. Maire de Saicourt, Markus Gerber, en tant que président du Copil du rendez-vous gourmand, a expliqué que la vache était l’emblème le plus logique pour célébrer le millésime 2019, l’édition précédente ayant fait la part belle au foin. «L’animal a participé de manière déterminante à l’implantation de population dans les zones décentralisées», arguent les organisateurs. «Elle a permis de valoriser les herbages en produits de grande qualité, qui ont contribué à la réputation de leur région.»

Parrain et thème étant connus, restait à ces derniers à dévoiler le fromage invité d’honneur. Après l’Etivaz, le printemps passé, c’est l’Appenzeller et ses représentants qui descendront de leurs montagnes de Suisse orientale. Mais Markus Gerber de tuer tout espoir: «Ils risquent hélas bien de repartir d’ici avec leur secret...» Sauf si quelqu’un parvient à cuisiner les membres de la chorale de la région appenzelloise, qui se produira plusieurs fois dimanche, à l’abbatiale...

Avant de détailler quelques éléments de programme (à retrouver en intégralité ici, également pour les réservations), notons tout de même la nouveauté de cette édition, bien qu’il sera difficile d’attirer plus que les 15'000 visiteurs de l’an passé. «Le vendredi soir, un afterwork-apéro gourmand aura lieu», dévoile Magali Ackermann, conseillère à la FRI. «Sur le marché des produits de la région (réd: du domaine BEJUNE), il sera possible de goûter à tout sur le pouce, avec de petites portions de 5 fr. maximum.» Quant à l’artiste du soir – show payant –, les organisateurs ont invité l’humoriste Nathanaël Rochat..

Fin de semaine méritée
Autrement, le reste sera déjà une sorte de tradition. Imaginé dès le départ, le concours de dégustation permettra au public de décerner le prix de la meilleure tête-de-moine – classique et réserve. A chaque fois, le vainqueur succédera au regretté Harald Kaempf, emporté l’été dernier par sa passion...

Plus joyeux, un un autre concours aura lieu, celui des plateaux de fromage, mais aussi une expo de photos signées Robert Spaderna, dans la Maison de la tête-de-moine. Celle-ci se prolongera d’ailleurs jusqu’à l’automne, tout comme, à l’extérieur cette fois, celle des sculptures de Jean-Pierre Froidevaux. Après les œuvres en foin du Français Christian Burger en 2018, l’agriculteur des Emibois érigera des formes à l’aide de racines d’arbres des Franches-Montagnes. Mais, il prévient, il ne se muera «pas en sculpteur, mais en rassembleur des merveilles de la nature», sourit-il.

Les girolles ont donné le tournis en 2018
Mais quand est-ce que ce fromage arrêtera de faire tourner les têtes? S’il n’y a pas besoin de répondre à cette question, il est cependant utile d’exposer les raisons qui nous amènent à l’avoir posée. Eh bien, c’est simple, l’année 2018 a été propice à «de nouveaux records historiques», a déclaré Olivier Isler, gérant de l’Interprofession. Par exemple, cette dernière a dépassé pour la première fois les 30 millions de kilos de lait transformés sur un an (+6,4%). Soit 3,2 millions de meules. Avec 2'600 tonnes de fromage vendues, les volumes écoulés ont également atteint un pic (+3,4%).

Finalement, autre nouvelle marque à tenter de dépasser en 2019, les exportations ont représenté l’an passé 61% (+1,6% à 1'600 tonnes). «Depuis 1982 et l’arrivée sur le marché de la girolle, on maintient le rythme», a exposé Olivier Isler, graphique à l’appui. Un rythme régulier de croissance, et non de «simple» stabilité. «Mais la situation internationale reste fragile», a prévenu le gérant. Et à l’instar de ces dernières années, ce sont les Allemands qui absorbent le plus de tête-de-moine (54% des exportations), devant les Français (26%).

Loin de se reposer sur ses lauriers, l’Interprofession a révélé que des réflexions étaient en cours pour encore augmenter l’attrait touristique de la Maison de la tête-de-moine ces prochaines années. Celle-ci ainsi que les fromageries de Saint-Imier et de Saignelégier ont drainé à elle trois un nombre de visiteurs estimé à 60'000 en 2018 (+20%!), dont 15'300 entrées payantes. «Un succès qui s’explique notamment grâce aux sculptures en foin, qui ont été exposées durant toute la saison touristique ici, soit jusqu’à fin octobre», a analysé Olivier Isler. Bref, l’avenir s’annonce doré pour l’Interprofession, d’autant que ses rangs s’étofferont encore en avril, avec l’ouverture de la Fromagerie des Franches-Montagnes, au Noirmont.

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