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Bienne: musique

«On est trop pointus pour la Suisse»

Rencontre avec les DJs et producteurs d’electro Simpig, deux Biennois d’adoption qui se produiront cet été au Paléo Festival de Nyon

Mr Pigman et Shake It Machine du duo Simpig. «Il peut arriver mille et une choses en club. On a eu droit à des invasions scéniques, par exemple. Mais c’est lorsque les gens se taisent, subjugués par la musique, que ça devient magique!» Reto Probst

Pierre-Yves Theurillat

«En 2011, avant qu’on se produise ensemble pour la première fois à Bienne, à la Coupole, je trouvais que cette ville avait quelque chose d’effrayant. En vérité, on y a découvert beaucoup d’effervescence créative et une scène musicale hyperactive. On en est tombé amoureux. C’est la musique qui nous a amenés à Bienne, où nous vivons désormais!»

Yoan Jaquenoud, alias Shake It Machine sur scène, a 27 ans et est Nyonnais. Son comparse, Mike Licci, alias Mr Pigman, en a 22 et est Neuchâtelois. Ensemble, ils forment Simpig, un duo de DJs et producteurs electro prometteurs au point d’avoir été engagés cet été au Paléo Festival. «Je me réjouis qu’on puisse jouer devant autant de monde. C’est démesuré de voir comment les gens s’arrachent les billets pour ce festival. On détonne peut-être un peu avec notre musique, au milieu de cette programmation. Mais pour nous, la musique est avant tout un partage, qui nous permet de nous enrichir au contact de Monsieur  et Madame Tout-le-monde! C’est notre drogue à nous!»

Simpig n’en est pas à son coup d’essai. Depuis qu’ils travaillent ensemble, ils se produisent plus de 20 fois par an et ont déjà foulé des scènes importantes en Suisse romande comme le Montreux Jazz, Festi’Neuch, le défunt Electrosanne, l’Electron de Genève ou encore La Superette à Neuchâtel.

Tournée en Chine

En mars dernier, ils étaient en tournée en Chine pour six dates dans des clubs et des salles de concerts. Ils en sont revenus totalement enthousiastes. «L’accueil a été sensationnel. Nous avions le sentiment d’être vraiment écoutés. Une expérience inoubliable», relate Yoan Jaquenoud. «On est trop pointus pour la Suisse. Les oreilles d’ici ne sont pas prêtes pour les sons qui viennent de Chicago, Londres ou Tokyo.»

En 2015, après avoir mis en ligne gratuitement plusieurs morceaux, Simpig publie un album vinyl intitulé «Strangers», produit par le label Argent Sale. «Nos ventes restent confidentielles, mais nous étions prévenus que la musique ne se vend plus. Il s’agit surtout de laisser une trace musicale.»

A la ville, Yoan Jaquenoud est graphiste et Mike Licci logisticien: «Ça se partage entre 50% de vrai travail, et 100% de musique. Les heures de sommeil en pâtissent. Il faut assumer de finir certains shows à 6h ou 7h du matin!»

Oiseaux de nuit, Shake it the Machine et Mr Pigman produisent une musique contrastée, puissante sans être violente, et planante, entre dubstep et footwork (voir encadré). Afin de donner une dimension cinématographique à leur musique, Simpig fait profiter son public d’une installation visuelle, créée par Gertrude Tuning, connue pour avoir déjà collaboré avec l’Usine de Genève.

Actuellement, le duo bosse sur une prochaine publication agendée pour la fin de l’année, mixant mélodies, atmosphères, percussions. «On essaie plein de recettes différentes en s’échangeant des fichiers. Une manière de travailler un peu autiste», plaisante le porte-parole du duo.
Simpig trépigne aussi car Shake It Machine participera cet automne à la Red Bull Music Academy 2016, à Montréal. «C’est un gros festival sur deux semaines avec 60 artistes sélectionnés. Des performances sont organisées sur les meilleures scènes de la ville. C’est l’occasion de faire de la  promo et de créer des connexions entre artistes émergeants et confirmés, qui viennent d’autres paysages culturels que le nôtre», conclut-il.

Courant électronique

LONDON CALLING Avec sa multitude de genres et sous-genres, l’electro et ses appellations ont de quoi désorienter. «Plusieurs foyers sont à la base de l’electro. Deux courants se sont particulièrement développés à partir du style garage: celui de Londres et celui de Chicago», explique Shake It Machine. Le garage produit au Royaume-Uni a généré divers sous-genres,  dubstep, jungle et uk funky.

L’école londonienne produit principalement une musique pour danser. Très variée stylistiquement, elle s’écoute tout aussi bien, avec des artistes comme Kode9 et le label Hyperdub. Ce DJ de renom, Shake It Machine l’a rencontré. «Kode9 a mis une année à me répondre suite à un remix que j’avais concocté. Il m’a finalement avoué qu’il le trouvait meilleur que son original», sourit le producteur biennois.

CHICAGO Le courant de Chicago, constitué de tempi rapides et d’accélérations est plutôt footwork. DJRashad est l’un de ses éminents représentants. «Mais cette musique de clubs est soignée et s’écoute aussi de plus en plus». Plusieurs artistes émergents cherchent leur propre formule parmi ces genres. La tendance est de butiner dans les différents courants et forger son style. «Entre footwork, dubstep et UK bass music, notre style est un immense pot-pourri de musiques d’inspiration anglo-saxonne. La scène mondiale est petite et nous avons des contacts amicaux avec la plupart de ses acteurs», conclut Simpig.

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