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Bienne: aide sociale

La difficile inversion de la courbe

Le taux de bénéficiaires ne diminue pas, mais la réorganisation des services doit améliorer la situation

Parmi les 14 villes prises en compte dans l’étude, Bienne reste en tête et voit son taux d’aide sociale légèrement augmenter en 5 ans. source: OFS

Julien Baumann

La réorganisation du Département des affaires sociales (DAS) est en marche. Les autorités compétentes, sous la direction du conseiller municipal UDC Beat Feurer, ont détaillé hier l’avancé du projet et les mesures déjà mises en œuvre. L’objectif est de «rendre les services plus performants et transparents et d’aider les bénéficiaires à se détacher de l’aide sociale», écrit la Ville dans un communiqué. Cette réforme, décidée au printemps 2015, va donc pouvoir commercer à déployer ses effets, notamment en donnant davantage de temps aux assistants sociaux.

Le taux d’aide sociale est depuis des années la bête noire des autorités biennoises puisqu’il se situe dans les plus élevés de Suisse et qu’aucune politique n’a réussi pour l’instant à inverser la courbe de façon durable. Parallèlement à la présentation de cette réorganisation a été publié le rapport annuel de l’Initiative des villes pour la politique sociale. Le document compare le taux d’aide social de différentes villes de Suisse. Bienne reste en tête du classement avec 11,6% en 2015, contre 11,5% en 2014.

Contexte difficile

Beat Feurer n’a pas cherché à minimiser l’ampleur du problème. «La situation n’est pas satisfaisante, il s’agit d’un niveau élevé», a-t-il reconnu. Il a tout de même tenu à souligner que Bienne, «contrairement à ce qui est souvent dit, n’est pas la ville de Suisse avec le taux le plus élevé.» Le rapport de l’Initiative des villes ne compare effectivement que 14 communes. Genève, Neuchâtel ou Thoune ne figurent, par exemple, pas dans la liste.

Quelles sont ces localités où le taux d’aide sociale est plus élevé qu’à Bienne?Beat Feurer se refuse à donner des noms, ne voulant pas «montrer du doigt d’autres communes.» Selon les chiffres de 2014 de l’Office fédéral de la statistique (OFS), parmi les 20 villes les plus peuplées du pays, seules deux d’entre elles ont un taux comparable à Bienne:La Chaux-de-Fonds (11,6%) et Neuchâtel (10%).

Au-delà de la bataille des chiffres, le conseiller municipal a répété qu’il ne pouvait pas maîtriser tous les facteurs:  «Nous ne pouvons pas empêcher les mouvements de réfugiés et nous n’avons que très peu de pouvoir sur le marché du travail. Avec la hausse du chômage et le franc fort, nous sommes dans une dynamique qui s’annonce difficile pour l’avenir. Malgré tout, les chiffres sont stables et nous allons gentiment dans la bonne direction.»

Lausanne y arrive

Le rapport de l’Initiative des villes montre que Lausanne réussit depuis quelques années à inverser la tendance. Le taux d’aide sociale dans la capitale vaudoise est passé de 10,3% à 8,8% entre 2011 et 2015 notamment car la commune a mis en place davantage de mesures d’insertion depuis 2009. Le nouveau responsable du DAS à Bienne, Thomas Michel, estime que cet exemple n’est pas comparable à Bienne: «Depuis 2012, il y a eu des changements de loi au niveau cantonal. Les jeunes, les familles et les personnes âgées sont désormais pris en charge séparément dans tout le canton de Vaud. Ils ont aussi mis en place des services régionaux pour les étrangers, ce qui a une influence sur les chiffres de la ville de Lausanne.»

Le cas lausannois, notamment en ce qui concerne la formation des jeunes, est un exemple à suivre selon Beat Feurer: «Ils bénéficient directement de bourses d’études. C’est un système que je soutiens et que l’on pourrait mettre en place sans que ça coûte plus cher. C’est maintenant au canton de se bouger.»

Si des changements sont en cours, les chiffres publiés hier restent peu reluisants pour le directeur de l’Action sociale et de la sécurité. Une réalité qui entache le bilan du politicien mais qui ne le déstabilise pas pour autant. «J’ai dit au début de mon mandat qu’il fallait formuler des objectifs mesurables en matière d’aide sociale et nous l’avons fait. Tout le monde pourra le vérifier d’ici trois ans.»

Avec cette réorganisation, le DAS vise à mieux évaluer ses objectifs. Il doit rendre des comptes d’ici la fin de l’année 2018. Les services de Beat Feurer ne fixent pas de taux d’aide sociale à atteindre d’ici là. Un des objectifs principaux est de faire mieux que la moyenne cantonale, notamment en ce qui concerne le nombre de personnes qui quittent l’aide sociale. Le rapport de l’Initiative des villes montre en outre des signes encourageants pour la ville de Bienne. En 2015, le taux de croissance du nombre de bénéficiaires s’est monté en moyenne à 2,2% dans les villes concernées alors qu’à Bienne cette proportion s’est limitée à 1,6%.

Davantage de temps pour les assistants sociaux et prise en charge ciblée

La réorganisation du Département des affaires sociales (DAS), décidée au printemps 2015, a abouti à la création de 14 postes à temps plein. Ces derniers seront occupés dès cet automne. La Ville indique que cette réforme vise plus d’efficacité, de performance et veut optimiser les coûts. Une des mesures centrales est de permettre aux assistants sociaux de consacrer davantage de temps au traitement des dossiers pour qu’ils «puissent se concentrer sur le travail pour lequel ils sont formés.

On prévoit aussi d’aller plus souvent voir les bénéficiaires chez eux pour obtenir des informations précises sur leur situation», a expliqué hier le conseiller municipal Beat Feurer. Pour ce faire, les assistants sociaux auront à charge moins de travail administratif et ils pourront être soutenus par un service de révision interne pour traiter les abus ou les dossiers complexes.

Le DASvise aussi à prendre en charge plus efficacement les cas ciblant davantage les entretiens individuels. Les bénéficiaires seront désormais rangés dans trois catégories: A, B et C. Les premiers, considérés comme ayant plus de chance de se réinsérer rapidement, seront davantage conseillés. Les autres, pour qui il est plus difficile de changer de situation (working poor, invalides), auront droit à des entretiens plus espacés.

La réorganisation permettra aussi de mieux définir et contrôler les objectifs du DAS. Il devra rendre des comptes sur son fonctionnement d’ici la fin 2018. La Ville note que d’importantes transformations sont encore à venir, telles que la gestion numérique des cas et le regroupement du département sous un même toit.

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