Le fromage du cru a attiré la foule

Par Bernard Schindler/ Photos Stéphane Gerber

Les deux précédentes fêtes avaient connu la pluie voire les giboulées, l’édition 2018 a innové en convoquant le beau temps. Président du Copil et maire de Saicourt, Markus Gerber s’en réjouit et il n’est pas le seul. Les sculpteurs de foin, les vendeurs du marché, les producteurs des fromages de l’Etivaz, hôtes d’honneur, et les visiteurs ont aussi le sourire bien accroché.

Orateurs unanimes
Samedi à la cérémonie officielle, les orateurs ont fait preuve d’une touchante unanimité quant au rôle économique et social de la tête-de-moine. Président de l’Interprofession tête-de- moine, Jacques Gygax a situé l’actualité, en pleine croissance, avec 2500 tonnes produites en 2017, dont 1570 exportées, et 3000 prévues en 2018. Le succès est affaire de savoir-faire de pointe, d’engagement total de la filière et du grand travail de promotion. Il note aussi le rôle fédérateur à cultiver: «Il faut que la filière reste unie!» D’un ton simple et direct, le Conseiller d’état bernois Christophe Ammann a promis une prochaine visite en famille. «Le succès de la tête-de-moine est contagieux!», dit-il, citant le trend des produits régionaux, les projets intercantonaux, les institutions concernées et les industries innovantes liées. Présidente de Pays romand-Pays gourmand (PRPG) et du Groupement suisse pour les régions de montagne (SAB), la conseillère nationale singinoise Christine Buillard-Marbach a mis en exergue le périmètre AOP, «… petit par son territoire, grand par sa renommée» avec un apport marquant: «La diversité des produits du terroir est une force». Ministre des finances du canton du Jura, Charles Juillard a donné à l’interview une image forte: «Produire du fromage, c’est travailler avec le vivant, c’est prendre des risques!» Le président Olivier Yersin de l’AOP Etivaz a décrit sa région, première AOP fromagère suisse (1999) qui a été voulue sans compromis: la cuisson du lait de fait au feu de bois, dans la région.

Parrain de la manifestation, Daniel Bloch dirige les Chocolats Camille Bloch à Courtelary, producteurs du célèbre Ragusa. Avec beaucoup de finesse, il a mis en relief le rôle de l’humain dans l’ancrage régional de son entreprise, né de plusieurs générations d’ouvriers très impliqués. Le nouveau centre d’accueil «Chez Camille» prolonge cette préoccupation humaine auprès du grand public. Au final, Christian Burger a présenté la sculpture sur foin dont il est promoteur et qui restera l’image de marque visuelle 2018.

Après les officialités, des invités se sont confiés. Directeur de la FRI partenaire de la fête, Olivier Girardin a souligné le rôle vital de la tête-de-moine pour les agriculteurs qu’il forme. Présidente de Jura bernois Tourisme, Raymonde Bourquin pense que le tourisme ici serait possible sans la tête-de-moine, mais que c’est beaucoup mieux avec. La préfète Stéphanie Niederhauser aime-t-elle la tête de moine? «Oh oui! Et l’Etivaz aussi, c’est ma moitié fribourgeoise toute proche qui parle!». Les cors des Alpes de l’Echo du Vorburg ont égayé la cérémonie, ils ont continué en plein air, habillés en moines.

Un marché, des animations
Autour de la Maison de la tête-de-moine, l’espace est en fête. A l’entrée du parking, Lévy Gerber, 12 ans, a recruté ses meilleurs copains de Reconvilier et Tavannes pour placer les voitures. Les Samaritains de Montfaucon sont là pour les premiers secours. Les échoppes sont sélectionnées, provenance BE-JU-NE et produits du terroir labellisés. La variété est bien là: les vins de Vermes, «L’Ancestrale» absinthe de l’herboriste de Fleurier, «Le Plotrilo» chocolat d’Audrey en meules à passer à la girolle pour faire des fleurs, les saucisses d’Ajoie et d’ailleurs. Bien sûr, les fromages dominent, les petits «chèvres» doux de la Bise-sur-les-Roches, le Bleuchâtel des Ponts-de-Martel, l’Etivaz en démonstration ou les têtes-de-moine en concours pour la «Girolle d’Or ». Au vote des visiteurs, la Fromagerie de la Suze d’Harald Kämpf, à Corgémont, a récidivé et gagné cette fois les deux catégories, classic et réserve. «La ferme» sous tente attire les familles, avec ses bovins tous âges, ses lapin et poussins, ses démonstrations de traite. Sous le chapiteau, Marc Donnet Monay & Yann Lambiel ont fait le plein vendredi soir et les productions artistiques variées ont suivi, dont celles, remarquables, de l’école de cirque de Delémont. A l’abbatiale, le concours international de plateaux de fromages a montré des merveilles, jugées par les visiteurs. Devant Sandrine Monard des Ponts-de-Martel, le Français Yann Cauchy est «Girolle d’Or», il a monté un jardin extraordinaire et campagnard, plein de fleurs et de vaches, avec un carrousel pour les enfants.

Bilan au format XXL
Le président du copil Markus Gerber pourra fêter l’année de tous les records. Sur la base des taxes de parking, près de 15000 visiteurs sont venus, soit le double au moins de la précédente édition, et la fête a drainé une large région de part et d’autre de la frontière linguistique. Les animations ont été très suivies, sous le chapiteau, sur la place de fête et à l’abbatiale. Avec 38exposants, le marché a pris de l’ampleur et la centaine de bénévoles n’a pas chômé, issue en majorité de l’Interprofession. Son président Jacques Gygax nous a donné ses impressions, très positives. Les sculptures de foin ont donné une touche de forte originalité visuelle, la filière de la tête-de-moine s’est impliquée au mieux, les intervenants et les invités de la cérémonie officielle étaient de haut niveau, l’AOP de l’Etivaz a été très présente. Les partenaires de la fête, à savoir l’Interprofession, les Chambres d’agriculture du Jura et du Jura bernois, la FRI, Jura bernois Tourisme et la commune de Saicourt, se sont aussi investis sans réserves au sein du copil, les synergies ont fonctionné autour de la Maison de la tête-de-moine. Il conclut, méditatif: «La clé qui ouvre la porte du succès reste la mobilisation de tous et la fête est là pour renforcer la cohésion autour d’un élément commun!»

Forte de son succès, l’équipe du président Markus Gerber est prête à répéter l’aventure l’année prochaine: les premiers travaux sont à prévoir au mois d’août déjà.

Coup d’œil nocturne d’une sculpture de foin.