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Reconvilier

Les blessures du prévenu sont des automutilations

Au terme d’une longue instruction, le procureur Raphaël Arn est convaincu que le prévenu de l’assassinat d’une Kenyane, en 2017, s’est mutilé volontairement.

L’immeuble de la rue Jolimont, où s’est déroulé le drame, en janvier 2017. Photo: archives

Par Blaise Droz

L’assassin présumé d’une jeune femme retrouvée dans un appartement de Reconvilier le 25 janvier 2017 s’est infligé lui-même ses blessures. C’est la conviction du Ministère public du Jura bernois-Seeland, deux ans après les faits. En s’automutilant, le suspect a vraisemblablement cherché à faire passer son agression pour une bagarre durant laquelle les deux protagonistes s’infligeaient mutuellement des coups.

Or l’enquête a démontré que les blessures du prévenu ont été occasionnées par lui-même. Il conteste cette version des faits.

Cela fait un peu plus que deux ans que ce crime avait été découvert, à la rue Jolimont. C’est vers 19h que la police avait été avertie d’une bruyante dispute. Arrivés sur les lieux, les agents étaient tombées sur le corps sans vie d’une ressortissante kenyane de 30 ans, mariée à un Suisse, ainsi qu’un homme de 31 ans, blessé et de nationalité américaine. La victime comme son mari, en déplacement au Kenya au moment des faits, évoluaient dans le milieu du sport d’élite, en course à pied.

Père champion olympique
Le père de la victime n’est autre que Julius Korir, médaillé d’or du 3000 m steeple aux JO de LosAngeles, en 1984. Quant au meurtrier, il serait un parent éloigné de la victime. De nationalité américaine, il appartenait aux US Marines, selon la presse kenyane. Le procureur Raphaël Arn ne tient pas à s’exprimer sur ce lien de parenté présumé. «Il n’en est fait la relation dans aucun des communiqués officiels et il n’appartient pas à la justice d’en faire mention durant l’enquête.»

Peu avant le drame, le couple helvético-kenyan se trouvait encore ensemble au Kenya, où il faisait construire une résidence. L’épouse était rentrée quelques jours plus tôt que son mari afin de reprendre son travail.

Occupant un grand appartement à la rue Jolimont, le couple hébergeait des athlètes kenyans, notamment en vue des courses Morat-Fribourg. «L’enquête a duré un peu plus que deux ans en raison des commissions rogatoires qu’il a fallu établir, tant au Kenya qu’aux Etats-Unis. Cela prend énormément de temps», explique le procureur.

Sur le déroulement du drame, il tient à rester discret: «Le prévenu conteste une partie des faits, et il n’appartient pas au Ministère public de dévoiler ce qu’il sait avant l’audience.»

La nature de l’arme du crime, par exemple, n’est pas révélée, sinon par le terme usuel d’objet coupant. La presse kenyane fait mention d’un couteau qui aurait été retrouvé sur les lieux, mais elle ajoute que la police ne confirmait pas s’il était ou non l’arme utilisée.
Quant à l’acte d’accusation dressé par le procureur contre le suspect au terme de son enquête, il fait état de la prévention d’assassinat, éventuellement de meurtre et de séquestration.$

Préméditation et sang-froid ou crime gratuit et odieux
Raphaël Arn explique que la qualification d’assassinat, la gradation la plus élevée en cas d’homicide, peut se justifier par une préméditation suivie d’un acte accompli de sang-froid. Or elle peut également s’appliquer à un crime gratuit, commis de manière odieuse et en l’absence de scrupule. Qu’en est-il dans l’affaire de Reconvilier? Il ne le dit pas, mais c’est bel et bien l’assassinat qu’il va plaider lors du procès qui s’ouvrira en juin prochain.

La séquestration, elle, est une qualification également plus grave que la contrainte, mais qui ne signifie pas que la personne séquestrée a été retenue pendant plusieurs heures ou jours. «Quelques minutes suffisent si la personne a été très manifestement empêchée de prendre la fuite.»

Jusqu’ici, le prévenu a été maintenu en détention préventive. Quant à savoir s’il y restera jusqu’au procès, le procureur, ne peut pas se prononcer pour la simple raison que cette décision ne relève pas sa juridiction mais de l’autorité d’exécution des peines.

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